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dimanche, 24 juin 2012

Les « élites » et « l'écroulement d'un monde », selon Frédéric Lordon

 

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Les « élites » et « l'écroulement d'un monde », selon Frédéric Lordon

Ex: http://verslarevolution.hautetfort.com/

« (...) la catastrophe étant sans doute le mode historique le plus efficace de destruction des systèmes de domination, l’accumulation des erreurs des "élites" actuelles, incapables de voir que leurs "rationalités" de court terme soutiennent une gigantesque irrationalité de long terme, est cela même qui nous permet d’espérer voir ce système s’écrouler dans son ensemble.

Il est vrai que l’hypothèse de l’hybris, comprise comme principe d’illimitation, n’est pas dénuée de valeur explicative. (...) Car c’est bien l’abattement des dispositifs institutionnels de contention des puissances qui pousse irrésistiblement les puissances à propulser leur élan et reprendre leur marche pour pousser l’avantage aussi loin que possible. Et il y a bien quelque chose comme une ivresse de l’avancée pour faire perdre toute mesure et réinstaurer le primat du "malpropre" et du "borné" dans la "rationalité" des dominants.

Ainsi, un capitaliste ayant une vue sur le long terme n’aurait pas eu de mal à identifier l’État-providence comme le coût finalement relativement modéré de la stabilisation sociale et de la consolidation de l’adhésion au capitalisme, soit un élément institutionnel utile à la préservation de la domination capitaliste – à ne surtout pas bazarder ! Évidemment, sitôt qu’ils ont senti faiblir le rapport de force historique, qui au lendemain de la seconde guerre mondiale leur avait imposé la Sécurité sociale – ce qui pouvait pourtant leur arriver de mieux et contribuer à leur garantir trente années de croissance ininterrompue –, les capitalistes se sont empressés de reprendre tout ce qu’ils avaient dû concéder. (...)

Il faudrait pourtant s’interroger sur les mécanismes qui, dans l’esprit des dominants, convertissent des énoncés d’abord grossièrement taillés d’après leurs intérêts particuliers en objets d’adhésion sincère, endossés sur le mode la parfaite généralité. Et peut-être faudrait-il à cette fin relire la proposition 12 de la partie III de l’Éthique de Spinoza selon laquelle "l’esprit s’efforce d’imaginer ce qui augmente la puissance d’agir de son corps", qu’on retraduirait plus explicitement en "nous aimons à penser ce qui nous réjouit (ce qui nous convient, ce qui est adéquat à notre position dans le monde, etc.)".

Nul doute qu’il y a une joie intellectuelle particulière du capitaliste à penser d’après la théorie néoclassique que la réduction du chômage passe par la flexibilisation du marché du travail. Comme il y en a une du financier à croire à la même théorie néoclassique, selon laquelle le libre développement de l’innovation financière est favorable à la croissance. Le durcissement en énoncés à validité tout à fait générale d’idées d’abord manifestement formées au voisinage immédiat des intérêts particuliers les plus grossiers trouve sans doute dans cette tendance de l’esprit son plus puissant renfort.

C’est pourquoi la distinction des cyniques et des imbéciles est de plus en plus difficile à faire, les premiers mutant presque fatalement pour prendre la forme des seconds. À bien y regarder, on ne trouve guère d’individus aussi "nets" – il faudrait dire aussi intègres – que le Patrick Le Lay de TF1 qui, peu décidé à s’embarrasser des doctrines ineptes et faussement démocratiques de la "télévision populaire", déclarait sans ambages n’avoir d’autre objectif que de vendre aux annonceurs du temps de cerveau disponible ; rude franchise dont je me demande s’il ne faut pas lui en savoir gré : au moins, on sait qui on a en face de soi, et c’est une forme de clarté loin d’être sans mérite.

Pour le reste, il y a des résistances doctrinales faciles à comprendre : la finance, par exemple, ne désarmera jamais. Elle dira et fera tout ce qu’elle peut pour faire dérailler les moindres tentatives de re-réglementation. Elle y arrive fort bien d’ailleurs ! Il n’est que de voir l’effrayante indigence des velléités régulatrices pour s’en convaincre, comme l’atteste le fait que, depuis 2009, si peu a été fait que la crise des dettes souveraines menace à nouveau de s’achever en un effondrement total de la finance internationale. Pour le coup, rien n’est plus simple à comprendre : un système de domination ne rendra jamais les armes de lui-même et cherchera tous les moyens de sa perpétuation.

On conçoit aisément que les hommes de la finance n’aient pas d’autre objectif que de relancer pour un tour supplémentaire le système qui leur permet d’empocher les faramineux profits de la bulle et d’abandonner les coûts de la crise au corps social tout entier, forcé, par puissance publique interposée, de venir au secours des institutions financières, sauf à périr lui-même de l’écroulement bancaire. Il faut simplement se mettre à leur place ! Qui, en leur position, consentirait à renoncer ?

Il faudrait même dire davantage : c’est une forme de vie que ces hommes défendent, une forme de vie où entrent aussi bien la perspective de gains monétaires hors norme que l’ivresse d’opérer à l’échelle de la planète, de mouvementer des masses colossales de capitaux, pour ne rien dire des à-côtés les plus caricaturaux, mais bien réels, du mode de vie de l’ "homme des marchés" : filles, bagnoles, dope. Tous ces gens n’abandonneront pas comme ça ce monde merveilleux qui est le leur, il faudra activement le leur faire lâcher.

C’est en fait à propos de l’État que le mystère s’épaissit vraiment. Préposé à la socialisation des pertes bancaires et au serpillage des coûts de la récession, littéralement pris en otage par la finance dont il est condamné à rattraper les risques systémiques, n’est-il pas celui qui aurait le plus immédiatement intérêt à fermer pour de bon le foutoir des marchés ?

Il semble que poser la question ainsi soit y répondre, mais logiquement seulement, c’est-à-dire en méconnaissant sociologiquement la forme d’État colonisé qui est le propre du bloc hégémonique néolibéral : les représentants de la finance y sont comme chez eux. L’interpénétration, jusqu’à la confusion complète, des élites politiques, administratives, financières, parfois médiatiques, a atteint un degré tel que la circulation de tous ces gens d’une sphère à l’autre, d’une position à l’autre, homogénéise complètement, à quelques différences secondes près, la vision du monde partagée par ce bloc indistinct.

La fusion oligarchique – et il faudrait presque comprendre le mot en son sens russe – a conduit à la dé-différenciation des compartiments du champ du pouvoir et à la disparition des effets de régulation qui venaient de la rencontre, parfois de la confrontation, de grammaires hétérogènes ou antagonistes. Ainsi par exemple a-t-on vu, aidé sans doute par un mécanisme d’attrition démographique, la disparition de l’habitus de l’homme d’État tel qu’il a pris sa forme accomplie au lendemain de la seconde guerre mondiale, l’expression "homme d’État" n’étant pas à comprendre au sens usuel du "grand homme" mais de ces individus porteurs des logiques propres de la puissance publique, de sa grammaire d’action et de ses intérêts spécifiques.

Hauts fonctionnaires ou grands commis, jadis hommes d’État parce que dévoués aux logiques de l’État, et déterminés à les faire valoir contre les logiques hétérogènes – celles par exemple du capital ou de la finance –, ils sont une espèce en voie de disparition, et ceux qui aujourd’hui "entrent dans la carrière" n’ont pas d’autre horizon intellectuel que la réplication servile (et absurde) des méthodes du privé (d’où par exemple les monstruosités du type "RGPP", la Révision générale des politiques publiques), ni d’autre horizon personnel que le pantouflage qui leur permettra de s’intégrer avec délice à la caste des élites indifférenciées de la mondialisation.

Les dirigeants nommés à la tête de ce qui reste d’entreprises publiques n’ont ainsi rien de plus pressé que de faire sauter le statut de ces entreprises, conduire la privatisation, pour aller enfin rejoindre leurs petits camarades et s’ébattre à leur tour dans le grand bain des marchés mondiaux, de la finance, des fusions-acquisitions – et "accessoirement" des bonus et des stock-options.

Voilà le drame de l’époque : c’est qu’au niveau de ces gens qu’on continue à appeler – on se demande pourquoi tant leur bilan historique est accablant – des "élites", il n’y a plus nulle part aucune force de rappel intellectuelle susceptible de monter un contre-discours. Et le désastre est complet quand les médias eux-mêmes ont été, et depuis si longtemps, emportés par le glissement de terrain néolibéral ; le plus extravagant tenant à la reconduction des éditorialistes, chroniqueurs, experts à demi vendus et toute cette clique qui se présente comme les précepteurs éclairés d’un peuple nativement obtus et "éclairable" par vocation.

On aurait pu imaginer que le cataclysme de l’automne 2008 et l’effondrement à grand spectacle de la finance conduirait à une non moins grande lessive de tous ces locuteurs émergeant en guenilles des ruines fumantes, mais rien du tout ! Pas un n’a bougé !

Alain Duhamel continue de pontifier dans Libération ; le même journal, luttant désespérément pour faire oublier ses décennies libérales, n’en continue pas moins de confier l’une de ses plus décisives rubriques, la rubrique européenne, à Jean Quatremer qui a méthodiquement conchié tous ceux qui dénonçaient les tares, maintenant visibles de tous, de la construction néolibérale de l’Europe. Sur France Inter, Bernard Guetta franchit matinée après matinée tous les records de l’incohérence – il faudrait le reconduire à ses dires d’il y a cinq ans à peine, je ne parle même pas de ceux de 2005, fameuse année du traité constitutionnel européen… L’émission hebdomadaire d’économie de France Culture oscille entre l’hilarant et l’affligeant en persistant à tendre le micro à des gens qui ont été les plus fervents soutiens doctrinaux du monde en train de s’écrouler, parmi lesquels Nicolas Baverez par exemple, sans doute le plus drôle de tous, qui s’est empressé de sermonner les gouvernements européens et de les enjoindre à la plus extrême rigueur avant de s’apercevoir que c’était une ânerie de plus. Et tous ces gens plastronnent dans la plus parfaite impunité, sans jamais que leurs employeurs ne leur retirent ni une chronique ni un micro, ni même ne leur demandent de s’expliquer ou de rendre compte de leurs discours passés.

Voilà le monde dans lequel nous vivons, monde de l’auto-blanchiment collectif des faillis. (...)

Dans ce paysage où tout est verrouillé, où la capture "élitaire" a annihilé toute force de rappel, je finis par me dire qu’il n’y a plus que deux solutions de remise en mouvement : une détérioration continue de la situation sociale, qui conduirait au franchissement des "seuils" pour une partie majoritaire du corps social, c’est-à-dire à une fusion des colères sectorielles et à un mouvement collectif incontrôlable, potentiellement insurrectionnel ; ou bien un effondrement "critique" du système sous le fardeau de ses propres contradictions – évidemment à partir de la question des dettes publiques – et d’un enchaînement menant d’une série de défauts souverains à un collapsus bancaire – mais cette fois autre chose que la bluette "Lehman"…

Disons clairement que la deuxième hypothèse est infiniment plus probable que la première… quoiqu’elle aurait peut-être, en retour, la propriété de la déclencher dans la foulée. Dans tous les cas, il faudra sacrément attacher sa ceinture. (...)

À constater le degré de verrouillage d’institutions politiques devenues absolument autistes et interdisant maintenant tout processus de transformation sociale à froid, je me dis aussi parfois que la question ultra taboue de la violence en politique va peut-être bien devoir de nouveau être pensée, fût-ce pour rappeler aux gouvernants cette évidence connue de tous les stratèges militaires qu’un ennemi n’est jamais si prêt à tout que lorsqu’il a été réduit dans une impasse et privé de toute issue.

Or il apparaît d’une part que les gouvernements, entièrement asservis à la notation financière et dévoués à la satisfaction des investisseurs, sont en train de devenir tendanciellement les ennemis de leurs peuples, et d’autre part que si, à force d’avoir méthodiquement fermé toutes les solutions de délibération démocratique, il ne reste plus que la solution insurrectionnelle, il ne faudra pas s’étonner que la population, un jour portée au-delà de ses points d’exaspération, décide de l’emprunter – précisément parce que ce sera la seule. »

Frédéric Lordon (décembre 2011)

samedi, 23 juin 2012

La communauté ou le cauchemar du Système

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La communauté ou le cauchemar du Système

Ex: http://verslarevolution.hautetfort.com/

« L’atomisation sociétale, l’anomie sociale, la guerre de tous contre tous et l’extrême individualisation égoïsto-nombriliste des existences contemporaines ne sont pas des "dommages collatéraux" de la  société capitalisto-marchande, les  symptômes de maux superficiels qui pourraient être guéris par des "ajustements" du système, ce sont tout au contraire le substrat, la matière première et le carburant du monde libéral.

L’oligarchie financiaro-mercantile ne peut en effet régner que sur un conglomérat d’individus séparés, isolés, concurrents les uns des autres en tous domaines (emploi, sexualité, sentimentalité, consommation, représentations symboliques…) et n’ayant pas d’autre horizon que la poursuite de leurs intérêts particuliers et la satisfaction de leurs désirs matériels. C’est pour cela que la bourgeoisie financière, avec l’appui actif et empressé des idiots utiles de la gauche "libérale/ libertaire",  n’a jamais eu de cesse que de faire disparaître toutes les entités collectives et les corps intermédiaires qui séparaient encore l’individu du Marché (corporations, syndicats, églises, familles, nations…).

Car le cauchemar du système de l’individu-roi, déraciné et interchangeable, défini uniquement par sa capacité de consommation, porte un nom, celui de "communauté".

La communauté est un groupement humain rassemblant des individus qui veulent être acteurs et non spectateurs de leur existence, qui ont compris qu’il n’y a ni espoir ni avenir dans la "délégation" du politique à des "élites" expertocratiques qui ne servent jamais que leurs propres intérêts de classe.

A l’opposé du "héros solitaire", notamment vanté par la littérature commerciale et les représentations cinématographiques hollywoodiennes,  qui s’oppose au monde au nom de son exceptionnelle singularité, le membre d’une communauté sait que ce n’est que par l’action collective, l’union des qualités et des talents, la collaboration des caractères et des volontés que l’on peut trouver des issues à l’impasse contemporaine et bâtir des alternatives concrètes et durables au suicide général qu’est la mondialisation libérale.

 

La communauté n’est ni un ghetto ni un refuge, c’est un camp de base, fortifié sur ses fondations mais ouvert sur le monde, un point de ralliement et d’organisation aujourd’hui indispensable à toute perspective de résistance et de reconquête. La communauté c’est l’interdépendance au service d’un projet commun.

Si la communauté se nourrit de la proximité ethnico-culturelle, fruit de la lignée et de l’enracinement historique,  elle ne se limite nullement à elle  puisque ce qui en fait à la fois la force, la spécificité et le dynamisme est le fait d’incarner des valeurs élevées et exigeantes mais dans lesquelles, potentiellement, tout homme libre, fier et aimant peut se reconnaître.

Ainsi si la communauté offre une nécessaire image d’homogénéité, c’est une homogénéité "plurielle" c’est-à-dire qui associe la diversité des individus, des parcours, des origines et des caractères à un socle moral et politique commun et des objectifs partagés. C’est donc avant tout une homogénéité d’esprit, de vues, d’aspirations et d’espoirs.

Le Larzac plus l’Ordre

Le système se moque des contestations qui ne sont que sonores ou visuelles, des agitations vociférantes, des slogans et des palabres. Il les recycle même avec une déconcertante facilité, les transformant bien souvent en nouvelles micro-niches commerciales nourrissant généreusement le supermarché global. Tant que ses prétendus adversaires continuent à suivre ses programmes télé, à fréquenter ses centres commerciaux et ses agences de voyages, à intégrer ses codes esthétiques et son imaginaire et à apporter leur écot à l’organisation bancaire (épargne, emprunts, assurances-vie…), ils peuvent bien pondre tous les manifestes, tous les fanzines, tous les pamphlets qu’ils souhaitent, ils peuvent même organiser trois fois par an tous les saccages anti G20 ou G8 qu’ils désirent, le système s’en moque éperdument, et  même s’en pourlèche, pouvant ainsi agiter l’épouvantail factice d’une virulente et redoutable "opposition".

Aujourd’hui, la seule réelle crainte du système est clairement le retrait et le court-circuit, c’est-à-dire le fait pour des individus, regroupés et organisés au sein de communautés, de rompre non pas avec les superficialités du temps mais avec les fondements de l’époque : la consommation, l’industrie du divertissement et l’omniprésence financière. Il suffit pour s’en convaincre de constater le mépris hargneux de la "gauche" capitalo-compatible envers les tenants de la "décroissance" ou l’acharnement judiciaro-policier dont ont été victimes les SEL (Systèmes d’échanges locaux), les "casseurs de pub" ou les épiciers communautaires de Tarnac.

Que ces expériences socialo-collectivistes se débarrassent de leurs scories libertariennes, xénophiles et ethno-masochistes et s’enrichissent des préoccupations patriotiques, méritocratiques et différentialistes et la plus grand terreur de l’oligarchie prendra alors forme, réveillant les fantômes de la Commune et le souvenir de Louis Rossel.

Pour atteindre cet objectif, qui est tout sauf utopique, il n’y a pas d’autre voie que la communauté, seul "lieu" où le retrait et le court-circuit (consistant à se passer au maximum des infrastructures et des mécanismes imposés par le système)  sont viables et porteurs de sens politique. Car il ne s’agit pas d’encourager à la multiplication des retraites au désert et des vocations d’anachorètes mais d’inciter à la mise en place de structures collectives où un autre mode de vie, basé sur la décence commune, le sens de la mesure, l’altruisme, la simplicité volontaire, est possible sans être synonyme d’exclusion et de précarisation progressive.

Prêts sans intérêts entre camarades, habitat collectif, recyclage et récupération, services gratuits, troc, rejet de la lobotomie télévisuelle et de l’emprisonnement facebookien, réappropriation agraire, coopératives, loisirs collectifs, chantiers communs… les moyens, à la fois humbles et gigantesques,  sont nombreux pour poser dès aujourd’hui les premières pierres de ces communautés qui seront autant de monastères et de phalanstères conservant et entretenant la flamme de la civilisation au cœur de la longue nuit de la barbarie libérale. »

 

Zentropa

jeudi, 21 juin 2012

La démocratie jusqu’à l’indigestion

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La démocratie jusqu’à l’indigestion

par Pierre LE VIGAN

Une société suppose des règles de civilité. Et ce sont ces règles qui rendent possible le droit, et la démocratie, en d’autres termes un code raisonné des affrontements politiques. La civilité, c’est le dépassement des préjugés, des tribus, des égoïsmes. C’est un horizon commun donc une culture commune. Disons le mot : ce sont des mœurs communes. Or à quoi assistons-nous ? À la réduction de la démocratie à des procédures, à des droits sociaux déconnectés des usages culturels de notre pays.

 

Ces droits appliqués à tout constituent une hyper-démocratie : droit à la santé, à la culture, etc. Mais l’inconvénient, c’est que l’hyper-démocratie tue la vraie démocratie. Car l’hyper-démocratie est démesure, hubris (outrage), tandis que la démocratie est l’apprentissage du temps, de la patience, du travail, de l’effort. C’est l’effort même de la civilisation.

 

Nous en sommes là. L’hyper-démocratie est, explique Renaud Camus, « la transposition plus ou moins opportune de la démocratie dans des domaines où sa pertinence est moins immédiatement évidente qu’en celui qui circonscrit le processus décisionnel au sein de la cité ». Par voie de conséquence, les mots perdent leur sens. La culture ne consiste plus à élever tout le monde dans la mesure des possibles de chacun mais à dire que tout est culture. Il en est de même pour l’éducation. Tout le monde a « le niveau » puisque le niveau est celui de tout le monde. Au terme de cela, c’est une moyennisation du monde qui se met en place. Ce sont les vraies hiérarchies qui s’effacent pour laisser la place aux seules hiérarchies de l’argent. Les riches ne sont plus des gens cultivés et aisés (ce qu’ils n’étaient pas toujours mais ce que l’on attendait d’eux !). Ce sont des pauvres qui ont réussis. « Les riches ne sont plus que des pauvres avec plus d’argent », note Renaud Camus. Le festivisme de la vie sociale et l’ironisation de tout sont les conséquences de cela, avec la dépolitisation qui va avec. L’enseignement de l’ignorance se combine avec la généralisation de la muflerie. Pour refaire une démocratie, c’est tout le problème de l’éducation du peuple qui devra être repris.

 

Pierre Le Vigan

 

• Renaud Camus, Décivilisation, Fayard, 212 p., 17 €.

 


 

Article printed from Europe Maxima: http://www.europemaxima.com

 

URL to article: http://www.europemaxima.com/?p=2486

mercredi, 13 juin 2012

Civilization as political concept

Civilization as political concept

Interview with the leader of the International “Eurasian Movement”, a philosopher, and a  professor at Moscow State University Alexander Dugin

Interviewed by the Global Revolutionary Alliance’s own Natella Speranskaja 

Ex: http://www.granews.info/

- The crisis of identity, with which we faced after the Cold War and the collapse of the communist world, is still relevant. What do you think is capable of lifting us out of this crisis  – a religious revival or creation of a new political ideology? Which of the options are you  inclined to yourself?

- After the collapse of communism came the phase of the “unipolar moment” (as Charles Krauthammer called it). In geopolitics, this meant the victory of unilateralism and Atlanticism, and because the pole was left alone, the West has become a global phenomenon. Accordingly,  the ideology of liberalism (or more accurately, neo-liberalism) is firmly in place crushing the two alternative political theories that existed in the twentieth century – communism and fascism . The Global liberal West has now defined culture, economics, information and technology, and politics. The West’s claims to the universalism of it’s values, the values of Western modernity and the Postmodern era, has reached its climax. 

Problems stemming from the West during the “unipolar moment” has led many to say that this “moment” is over, that he could not yet be a “destiny” of humanity.That is, a “unipolar moment” should be interpreted very broadly – not only geopolitical, but also ideologically, economically, axiologically, civilization wide. The crisis of identity, about which you ask, has scrapped all previous identities – civilizational, historical, national, political, ethnic, religious, cultural, in favor of a universal planetary Western-style identity  – with its concept of individualism, secularism, representative democracy, economic and political liberalism, cosmopolitanism and the ideology of human rights.Instead of a hierarchy of identities, which have traditionally played a large role in sets of collective identities, the “unipolar moment” affirmed a flat one-dimensional identity, with the absolutization of the individual singularity.  One individual = one identity, and any forms of the collective identity (for example, individual as the part of the religious community, nation, ethnic group, race, or even sex) underwent dismantling and overthrow. Hence the hatred of globalists for different kind of “majorities” and protection of minorities, up to the individual.

The Uni-polar Democracy of our moment - this is a democracy, which unambiguously protects the minority before the face of the majority and the individual before face of the group.  This is  the crisis of identity for those of non-Western or non-modern (or even not “postmodern”) societies,since this is where customary models are scrapped and liquidated. The postmodern West with  optimism, on the contrary, asserts individualism and hyper-liberalism in its space and zealously  exports it on the planetary scale.

However, it’s not painless, and has caused at all levels it’s own growing rejection.  The problems, which have  appeared in the West in the course of this “uni-polar moment”, forced many to speak, that this “moment’s” conclusion, has not succeeded in becoming “the fate” of humanity.  This, therefore,  was the cost of the  possibility of passage to some other paradigm…

So, we can think about an alternative  to the “unipolar moment” and, therefore, an alternative to liberalism, Americanism, Atlanticism, Western Postmodernism, globalization, individualism, etc. That is, we can, and I think should,  work out plans and strategies for a “post-uni polar world “, at all levels – the ideological and political, the economic, and religious, and the philosophical and geo-political, the cultural and civilizational, and technology, and value.

In fact, this is what I call multi-polarity. As in the case of uni-polarity it is not only about the political and strategic map of the world, but also the paradigmatic philosophical foundations of the future world order.  We can not exactly say that the “uni-polar moment” has finally been completed. No, it is still continuing, but it faces a growing number of problems. We must put an end to it – eradicate it. This is a global revolution, since the existing domination of the West, liberalism and globalism completely controls the  world oligarchy, financial and political elites.

So they just will not simply  give up their positions. We must prepare for a serious and intense battle.   Multi-polarity will be recaptured by the conquered peoples of the world in combat and it will be able to arise only on the smoking ruins of the global West.  While the West is still dictating his will to the rest, to talk about early multipolarity  – you must first destroy the Western domination on the ground.   Crisis – this is much, but far from all.

- If we accept the thesis of the paradigmatic transition from the current unipolar world order model to a new multi-polar model, where the actors are not nation-states, but  entire civilizations, can it be said that this move would entail a radical change in the very human identity?

- Yes, of course. With the end of the unipolar moment, we are entering a whole new world. And it is not simply a reverse or a step back, but it is a step forward to some unprecedented future, however, different from the digital project of “lonely crowds”, which is reserved for  humanity by globalism. Multi-polar identity will be the complex nonlinear collection of different identities – both individual and collective, that is varied for each civilization (or even inside each civilization).

This is something completely new that  will be created.

And the changes will be radical. We can not exclude that, along with known identities, civilizations, and offering of  new ways … It is possible that one of these new identities will become the identity of “Superman” – in the Nietzschean sense or otherwise (for example, traditionalist) …  In the “open society” of globalism the individual is, on the contrary, closedand strictly self-identical.

The multi-polar world’s anthropological map will be, however, extremely open, although the boundaries of civilizations  will be defined clearly. Man will again re-open the measurement of inner freedom – “freedom for”, in spite of the flat and purely external  liberal freedom – “freedom from” (as John Mill), Which is actually,  not freedom, but its simulacrum, imposed for a more efficient operation of the planetary masses by a small group of global oligarchs.

- Alexander Gelevich Dugin, you are the creator of the theory of a multi-polar world, which laid the foundation from which we can begin a new historical stage. Your book“The theory of a multi-polar world” has been and is being translated into other languages. The transition to a new model of world order means a radical change in the foreign policy of nation-states, and in today’s global economy, in fact, you have created all the prerequisites for the emergence of a new diplomatic language. Of course, this is a challenge of the global hegemony of the West. What do you think will be the reaction of your political opponents when they realize the seriousness of the threat posed?

- As always in the vanguard of  philosophical and ideological ideas, we first have the effect of bewilderment, the desire to silence or marginalize them. Then comes the phase of severe criticism and rejection. Then they begin to consider. Then they become commonplace and a truism. So it was with many of my ideas and concepts in the past 30 years. Traditionalism, geopolitics, Sociology of imagination , Ethnosociology, Conservative Revolution , National Bolshevism, Eurasianism, the Fourth Political Theory, National-structuralism, Russian Schmittianism, the concept of the three paradigms, the eschatological gnosis, New Metaphysics and Radical Theory of the Subject , Conspiracy theories, Russian haydeggerianstvo , a post-modern alternative , and so on – perceived first with hostility, then partially assimilated, and finally became part of mainstream discourse in academia and politics of Russia, and in part, and beyond.

Each of these directions has their fate, but the diagram of their mastering is approximately identical. So it will be also with the theory of a multipolar world   It will be hushed up, and then demonized and fiercely criticized, and then they will begin to look at it closely, and then accepted. But for all this it is necessary to pay for it and to defend it in the fight.  Arthur Rimbaud said that “the spiritual battle as fierce and hard, as the battle of armies.” For this we will have to struggle violently and desperately. As for everything else.

- In the “Theory of a multipolar world,” you write that in the dialogue between civilizations the responsibility is born by the elite of civilization. Do I understand correctly, it should be a “trained” elite, that is, the elite, which has a broad knowledge and capabilities, rather than the present “elite”? Tell me, what is the main difference between these elites?

- Civilizational elite – is a new concept. Thus far  it does not exist. It is a combination of two qualities – deep assimilation of the particular civilizational culture (in the philosophical, religious, value levels) and the presence of a high degree “of drive,” persistently pushing people to the heights of power, prestige and influence. Modern liberalism channels passion exclusively in the area of economics and business, creating a preference for a particular social elevator and it is a particular type of personality (which is an American sociologist Yuri Slezkine called “mercurial type”) .

The Mercurial elite of globalism, “aviakochevniki” mondialist nomadism, sung by Jacques Attali, should be overthrown in favor of radically different types of elites. Each civilization can dominate, and other “worlds”, not only thievish, mercurial shopkeepers and  cosmopolitans.  Islamic elite is clearly another – an example of this we see in today’s Iran, where the policy (Mars) and economics (Mercury) are subject to  spiritual authority, of the Ayatollah (Saturn).

But the “world” is only a metaphor. Different civilizations are based on different codes. The main thing is that the elite must be reflected in the codes themselves, whatever they may be. This is the most important condition. The will to power inherent in any elite, shall be interfaced with the will to knowledge, that is intellectualism and activism in such a multipolar elite should be wedded. Technological efficiency and value (often religious) content should be combined in such an elite. Only such an elite will be able to fully and responsibly participate in the dialogue of civilizations, embodying the principles of their traditions and engaging in interaction with other civilizations of the worlds.

- How can you comment on the hypothesis that the return to a bipolar model is still possible?

- I think not, practically or theoretically. In practice, because today there is no country that is comparable to the basic parameters of the U.S. and the West in general. The U.S. broke away from the rest of the world so that no one on its own can compete with them. Theoretically, only the West now has a claim to universality of its values, whereas previously Marxism was regarded as an alternative. After the collapse of the Soviet Union it became clear that universalism is only  liberal, capitalist. To resist Western imperialism there can only be a coalition of large spaces – not the second pole, but immediately multiple poles, each of them with its own strategic infrastructure and with a particular civilizational, cultural and ideological content.

- How real is the sudden transition to a non-polar model? What are the main disadvantages of this model?

- Passage to a non-polar model, about which leaders are increasingly talking of in the Council on Foreign Relations (Richard Haass, George Soros,etc.), means the replacement of the facade of a uni-polar hegemony, the transition from the domination based on military and strategic power of the United States and NATO (hardware ) to dispersed domination of the West as a whole (software). These are two versions – hard-hegemony and soft-hegemony. But in both cases the West, its civilization, its culture, its philosophy, its technologies, its political and economic institutes and procedures come out as the standard universal model.  Over the long term, this will indicate  the transfer of power to a “world government”, which will be dominated by all  the same Western elites, the global oligarchy. It will then  discard it’s  mask and will act directly on behalf of the transnational forces. In some sense non-polarity is worse than uni-polarity, though, it would seem hard to believe.

Non-polarity itself, and even more sharply and rapidly, will not yet begin. For this, the world must go through the turmoil and trials until a desperate humanity itself cried for the world elite with a prayer for salvation. Prior to that, to weaken the power of the United States, world disasters occur, and war. Non-polar world under the control of a world government, consisting of direct representatives of the global oligarchy,  is expected by many religious circles as the coming “of the kingdom of the Antichrist.”

As for the “shortcomings” of such a model, I believe that it is just  “a great parody of” the sacred world empire, which  Rene Guenon warned of in his work The Reign of Quantity and the Signs of the Times. This will be a global simulacrum.  To recognize these “deficiencies” will  not be so easy, otherwise opposition “to the antichrist” would be too simple a matter, and the depth of his temptation would be insignificant.

The true alternative is a multi-polar world, everything else – evil in the truest sense of the word.

- The “counter-hegemony” by Robert Cox, who you mention in your book aims to expose the existing order in international relations and raise the rebellion against it. To do this, Cox called for the creation of counter-hegemonic bloc, which will include political actors who reject the existing hegemony. Have you developed the Fourth Political Theory as a kind of counter-hegemonic doctrine that could unite the rebels against the hegemony of the West?

- I am convinced that the Fourth Political Theory fits into the logic of building counter-hegemony, which Cox spoke of. By the way, also inthe proximity of critical theory in the MO theory, and multi-polar world is a wonderful text by Alexandra Bovdunova ,voiced at the Conference on the Theory of a multipolar world in Moscow, Moscow State University on 25-26 April 2012 .

4PT is not a complete doctrine, this is still the first steps toward the exit from the conceptual impasse in which we find ourselves in the face of liberalism, today rejected by more and more people around the world, in the collapse of the old anti-liberal political theories – Communism and Fascism. In a sense, the need for 4PT – is a sign of the times, and really can not be disputed by anyone. Another matter, what will be 4PT in its final form. The temptation appears to build it as a syncretic combination of elements of previous anti-liberal doctrines and ideologies …

I am convinced that we should go another way. It is necessary to understand the root of the current hegemony. This coincides with the root of modernity as such, and it grows from the roots of modernity in all three pillars of political theories – liberalism, communism and fascism. To manipulate them to find an alternative to modernity and liberalism, respectively, and of the liberal hegemony of the West, is in my view, pointless. We must move beyond modernity in general, beyond the range of its political actors – individual, class, nation, state, etc.

Therefore 4PT as the basis of a counter-hegemonic planetary front should be constructed quite differently. Like the theory of a multipolar world 4PT operates with a new concept – “civilization”, but 4PT puts special emphasis on the existential aspect of it. Hence the most important, the central thesis of 4PT that its subject is the actor -  Dasein. Every civilization, its Dasein, which means that it describes a specific set of existentials. On their basis, should be raised a new political theory  generalized at the following level into a “multipolar federation Of Dasein” as the concrete structure of counter – hegemony. In other words, the very counter-hegemony must be conceived existentially, as a field of war between the inauthentic globalization (global alienation) and the horizon of authentic  peoples and societies in a multipolar world (the possibility of overcoming the alienation  of civilizations).

- When we talk about cognitive uprising, however first of all, our actions should be aimed at the overthrow of the dictatorship of the West?

- The most important step is the beginning of the systematic preparation of a global revolutionary elite-oriented to multi-polarity 4PT. This elite must perform a critical function – to be a link between the local and global. At the local level we are talking about the masses and the clearest exponents of their local culture (religious leaders, philosophers, etc.). Often, these communities do not have a planetary perspective and simply defend their conservative identity before the onset of toxic globalization and Western imperialism.

Raising the masses and the traditionalist-conservatives  to a realized uprising in the context of a complex union of a counter-hegemonistic block is  extremely difficult. Simple conservatives and their supportive mass, for example, of the Islamic or Orthodox persuasion are unlikely to realize the necessity of  alliances with the Hindus or the Chinese. This will be the play  (and they are already actively playing it) of the globalists and their principle of “divide and conquer!” But the revolutionary elite, which is the elite, even within a particular traditionalist elite of society, should take the , heartfelt deep and deliberate feelings of local identity and correlate it within a total horizon of multi-polarity, and  4PT.

Without the formation of such a elite the revolt against the  post-modern world and the overthrow of the dictatorship of the West will not take place. Every time and everywhere   the West has a problem, he will come to the aid of anti-Western forces, which, however, will be motivated by narrow bills to specific civilizational neighbors – most often, just as anti-Western as they are. So it will be and already is the instrumentalization of globalists of various conservative fundamentalist and nationalist movements. Islamic fundamentalists to help the West is one. European nationalists – is another. So a “unipolar moment” extends not only to exist in itself, but also playing the antagonistic forces against him. The overthrow of the dictatorship of the West will become possible only if this strategy  will be sufficient enough to create or make appear a new counter-hegemonic elite. A initiative like Global Revolutionary Alliance – the unique example of really revolutionary and effective opposition to hegemony.

- You have repeatedly said that Eurasianism is a strategic, philosophical, cultural and civilizational choice. Can we hope that the political course chosen by Vladimir Putin (establishment of a Eurasian Union ) Is the first step towards a multipolar model?

- This is a difficult question. By himself, Putin and, especially, his environment, they act  more out of inertia, without calling into question the legitimacy of the existing planetary status quo. Their goal – to win his and Russia’s  rather appropriate place within the existing world order. But that is the problem: a truly acceptable place for Russia is not and can not exist, because the “uni-polar moment”, as well as the globalists stand for the desovereignization of Russia, eliminating it as an independent civilization, and strategic pole.

This self-destruction seems to suit, Dmitry Medvedev and his entourage (INSOR) for he was ready to reboot and go for almost all of it. Putin clearly understands the situation somewhat differently, and his criteria of “acceptability” is also different. He would most of all psychologically  arrange  a priority partnership with the West while maintaining the sovereignty of Russia. But this is  something  unacceptable under any circumstances to the unipolar globalists -  practically or theoretically.

So Putin is torn between multipolarity, where he leads the orientation of  sovereignty and Atlanticism, where he leads the inertia and the tireless work of a huge network of influence that permeates all of the structure of Russian society. Here’s the dilemma. Putin makes moves in both directions – he proclaims multi-polarity, the Eurasian Union, to protect the sovereignty of Russia, even spoke of the peculiarities of Russian civilization, strengthening vertical power, shows respect (if not more) to Orthodoxy, but on the other hand, surrounds himself with pro-American experts (eg, “Valdai Club”), rebuilds, education and culture under the globalistic Western models, has a liberal economic policy and suffers comprador oligarchs, etc.

The field for maneuver Putin is constantly shrinking. The logic of the circumstances pushes him to a more unambiguous choice. Inside the country this uncertainty of course causes growing hostility, and his legitimacy falls.

Outside the country  the West only increases the pressure on Putin to persuade him towards globalism and the recognition of “unilateralism”, specifically – to cede his post to the Westerner Medvedev. So Putin, while continuing to fluctuate between multipolarity and Westernism, loses ground and support here and there.

The new period of his presidency will be very difficult. We will do everything we can to move it to a multipolar world, the Eurasian Union and 4PT. But we are not alone in Russian politics – against us for influence in Putin’s circles we have an army of liberals, agents of Western influence and the staff of the global oligarchy. For us, though, we have the People and the Truth. But behind them – a global oligarchy, money, lies, and, apparently, the father of lies. Nevertheless, vincit omnia veritas. That I have no doubt.

mercredi, 23 mai 2012

La boussole s’est rompue par Costanzo PREVE

 

La boussole s’est rompue

par Costanzo PREVE

 

I

 

costanzop.gifOn ne peut décemment demander au marin de partir en mer sans compas, surtout lorsque le ciel est couvert et que l’on ne peut s’orienter par les étoiles. Mais qu’arrive-t-il, si l’on croit que le compas fonctionne, alors qu’il est falsifié par un aimant invisible placé dessous ? Eh bien, voilà une métaphore assez claire de notre situation présente.

 

II

 

En Italie, avec le gouvernement Monti, les choses sont devenues à la fois plus claires et plus obscures. Plus claires, parce qu’il est bien évident que la décision politique démocratique (dans son ensemble, de gauche, du centre, de droite) a été vidée de tout contenu; et que nous sommes devant une situation que n’avaient jamais imaginée les manuels d’histoire des doctrines politiques (bien évident : du moins pour ces deux pour cent de bipèdes humains qui entendent faire usage de la liberté de leur intelligence; je ne tiendrai pas compte ici des quatre-vingt dix-huit pour cent restant).

 

En bref, nous sommes devant une dictature d’économistes, à légitimation électorale référendaire indirecte et formelle. Il est évident  que cette dictature s’exerce pour le compte de quelqu’un, mais ce serait se tromper que de trop « anthropomorphiser » ce quelqu’un : les riches, les capitalistes, les banquiers, les Américains, etc. Cette dictature d’économistes est au service d’une entité impersonnelle (que Marx aurait qualifiée de « sensiblement suprasensible »), qui est la reproduction en forme « spéculative » de la forme historique actuelle du mode de production capitaliste (1). À ce point de vue, les choses sont claires.

 

Ce qui n’est pas clair du tout, et même obscur, c’est la manière dont cette junte d’économistes peut « conduire l’Italie hors de la crise ». Elle est au service exclusif de créanciers internationaux; son unique horizon est la dette. La logique du modèle néo-libéral consiste à « délocaliser » de Faenza jusqu’en Serbie la fabrication des chaussures Omca, afin de pouvoir payer les ouvrier deux cents euros.

 

Dans cette situation, le maintien du clivage Droite/Gauche n’est plus seulement une erreur théorique. C’est potentiellement un crime politique.

 

III

 

Dernièrement, je suis resté ébahi en lisant un tract du groupuscule La Gauche critique. Je ne comprenais même pas pourquoi, et puis tout d’un coup j’ai cru comprendre. Le terme même de « gauche critique » est une contradiction, puisque le présupposé principal et très essentiel de toute critique, sans lequel le terme de « critique » perd tout son sens, est justement le dépassement de cette dichotomie « Droite/Gauche ». On ne peut plus être à la fois critiques, et de gauche; non plus que de droite, ce qui revient au même.

 

Comunitarismo.jpgJe viens de renvoyer au dernier livre de Diego Fusaro. Dans cette histoire philosophique du capitalisme, depuis ses origines au XVIe siècle jusqu’à aujourd’hui, ces deux petits mots, Droite et Gauche, n’apparaissent absolument jamais, par ce fait tout simple et nu que la mondialisation capitaliste, et la dictature des économistes qui   nécessairement en est la forme, a entièrement vidé ces catégories de leur sens. Norberto Bobbio (2) pouvait encore en parler en toute bonne foi, en un temps où existait encore une souveraineté monétaire de l’État national, et où les partis de « gauche » pouvaient appliquer des politiques économiques de redistribution plus généreuses que celle des partis « de droite ». Mais aujourd’hui, avec la globalisation néo-libérale, le discours de Bobbio ne correspond plus à la réalité.

 

Il y a, bien sûr, un problème, du moment que la dictature « neutre » des économistes a cependant toujours besoin d’être légitimée constitutionnellement par des élections, fussent-elles vides de tout sens de décision. C’est donc ici que se met en scène une comédie à l’italienne; personnages : la « gauche responsable » : Bersani, D’Alema, Veltroni, tout le communisme togliattien recyclé; le bouffon qui fait la parade, Vendola, dont on sait bien a priori que  ses suffrages iront de toute façon au Parti démocrate (3); les « témoins du bon vieux temps » Diliberto et Ferrero, dont les suffrages iront toujours au même Parti démocrate, sous le prétexte du péril raciste, fasciste, populiste, etc.; les petits partis à préfixe téléphonique (respectivement Pour la refondation de la IVe internationale bolchevique, Refondateurs communistes), de Turigliatto et Ferrando, fidèles au principe olympique « L’important n’est pas de vaincre, mais de participer »; enfin, les « Témoins de Jéhovah » du communisme (Lutte communiste), dans l’attente du réveil du bon géant salvifique, la classe ouvrière et salariée mondiale (4).

 

L’idéal serait que, selon la fiction du romancier portugais José Saramago, personne n’allât plus voter; je souligne : personne. Si personne n’allait plus voter, la légitimation formelle de la dictature des économistes s’écroulerait. Le magicien capitaliste trouverait encore le moyen de tirer un nouveau lapin de son chapeau, mais on s’amuserait bien en attendant. Hélas ! Cela est un rêve irréalisable. La machine Attrape-couillons est trop efficace pour qu’on la laisse tomber en désuétude.

 

IV

 

Et pourtant, la solution pourrait bien être à la portée de la main : une nouvelle force politique radicalement critique à l’égard du capitalisme libériste mondialisé, et tout à fait étrangère au clivage Droite/Gauche. Une force politique qui laisse tomber tous les projets de « refondation du communisme » (la pensée de Marx est encore vivante, mais le communisme historique est mort), et qui retrouve plutôt des inspirations solidaristes et communautaires (5). En théorie, c’est l’œuf de Christophe Colomb; en théorie, il faudra encore plusieurs décennies, à moins d’improbables accélérations imprévues de l’histoire, pour que l’on comprenne bien que la boussole est hors d’usage, et que « droite » et « gauche » ne sont plus désormais que des espèces de panneaux de signalisation routière.

 

V

 

Et c’est ici que je vais donner l’occasion à tous les scorpions, araignées, et vipères de m’accuser : « Preve fasciste ! ». Il est vrai que, si l’on a peur de briser les tabous, mieux vaut se reposer et lire des romans policiers.

 

Voici : un cher ami français vient de m’envoyer le livre qu’a écrit Marine Le Pen (6). Je sais déjà qu’on va parler d’une astucieuse manœuvre d’infiltration populiste par l’éternel fascisme; mais ce livre, lisez-le, au moins. Il est étonnant. Moi, il ne m’étonne pas, puisque je connais bien la dialectique de Hegel, l’unité des contraires, et la logique du développement tant de la gauche que de la droite depuis une vingtaine d’années.

 

Voyons cela. À la page 135, Marine Le Pen écrit : « Je n’ai pour ma part aucun état d’âme à le dire : le clivage entre la gauche et la droite n’existe plus. Il brouille même la compréhension des enjeux réels de notre époque ». Je vois que ses principales références philosophiques dont deux penseurs « de gauche » : Bourdieu et Michéa (p. 148). Je vois que Georges Marchais, ce représentant du vieux communisme français, est cité, favorablement. Plus de Pétain ni de Vichy. Sarkozy est condamné tant pour sa politique extérieure au service des États-Unis que pour sa politique intérieure qui aggrave l’inégalité sociale. Sur la question du marché, sa principale référence théorique est Polanyi (p. 26). Le non français à la guerre d’Irak de 2003 est revendiqué (p. 37). Marx est cité (p. 61); le grand économiste Maurice Allais est souvent cité, pour soutenir l’incompatibilité du marché et de la démocratie. Mais surtout, j’y ai retrouvé avec plaisir ce qui me séduisait dans le communisme des années soixante, à savoir que la parlotte polémique à courte portée marche derrière, et non devant : le livre commence par un long chapitre intitulé, à la française « Le mondialisme n’est pas un humanisme ». La globalisation est très justement qualifiée d’« horizon de renoncement », et il y est réaffirmé que « l’empire du Bien est avant tout dans nos têtes », ce qui est vrai.

 

Je pourrais continuer. Je sais que j’ai donné aux vipères et aux scorpions une belle occasion de m’outrager; et c’est ce qui va arriver.

 

Mais pour moi, tout ce que je veux, en réalité, c’est faire réfléchir.

 

VI

 

Pour comprendre ce que sont aujourd’hui la Droite et la Gauche, nul besoin de s’adresser à des défenseurs « idéal-typiques » de la fameuse dichotomie, en termes de valeurs éternelles et de catégories de l’Esprit, comme un Marco Revelli. Il suffit de lire des défenseurs du système comme Antonio Polito (dans le Corriere della sera, 25 février 2012). Polito dit ouvertement que la compétition politique peut désormais avoir lieu dans le seul cadre, tenu pour définitif, de l’économie globalisée; que tout le reste, du pitre Nichi Vendola (Mouvement pour la gauche) à Forza Nuova (d’« extrême droite »), n’est qu’agitation insignifiante; que cela est notre destin.

 

Que proposent donc les « gauches » encore en activité, d’Andrea Catone à Giacche et à Brancaccio ? Une relance du keynesisme  et de la dépense publique en déficit, à l’intérieur de l’Union européenne ? Une nouvelle mise en garde après tant d’autres contre la menace du racisme, de la Ligue du Nord, du populisme ? Une « alter-globalisation à visage humain » ? À présent que le Grand Putassier n’occupe plus le devant de la scène, avec quoi va-t-on continuer à fanatiser comme des supporters de foot le « peuple de gauche » ?

 

Si on lit le dossier « Chine 2020 » de la Banque mondiale, récemment présenté à Pékin, on verra que la dictature des économistes s’étend sur le monde entier. Aujourd’hui, la révolution n’est pas mûre; elle n’est à l’ordre du jour ni selon sa variante stalinienne (Rizzo), ni selon sa variante trotskiste (Ferrando). Ni même le réformisme, puisque le réformisme suppose la souveraineté de l’État national. Et il y en a encore qui jouent comme des enfants avec la panoplie du petit fasciste contre le petit communiste ? Ou du petit communiste contre le petit fasciste ? Aujourd’hui, l’ennemi, c’est la dictature des économistes néo-libéraux. Avec ceux-ci, pas de compromis ! Voilà le premier pas. Si on le fait, on pourra faire les suivants.

 

Deux mots encore à propos de la manie du vote compulsif.

 

1Il-Popolo-al-Potere-di-Costanzo-Preve.jpgIl est probable que l’américanisation intégrale et radicale, bien plus grave encore que l’européisme, que va apporter le gouvernement Monti, produise une diminution de la participation électorale des Italiens, qui depuis 1945 a toujours atteint des niveaux délirants. Cette compulsion électoraliste, qui est évidente chez les personnes âgées, était liée à l’opposition Démocratie chrétienne/Parti communiste; elle s’est prolongée, par inertie, au temps de Craxi, de Prodi, et de Berlusconi. Mais à présent que l’État prend tout et ne donne plus rien, elle devrait diminuer; pas assez vite, hélas ! Il y aura toujours du champ pour des clowns comme les Casini, les Veltroni, les Vendola, etc.

 

À côté de cet affaiblissement du vote compulsif, on notera un second aspect de l’américanisation : le déclin des débats sur la politique extérieure. Aux États-Unis, il est naturel que les gens ne sachent pas où sont l’Afghanistan, l’Irak, la Syrie, etc., dont les bombardements sont confiés à d’obscurs spécialistes. Les temps où tous s’intéressaient à la Corée ou au Vietnam sont bien passés, irréversiblement. Toute la caste journalistique, sans aucune exception, est devenus une parfaite machine de guerre qui produit joyeusement du mensonge.

 

Au temps de la guerre du Golfe de 1991, il y avait encore de la discussion; puis elle s’est tue. On a eu alors ce que Carl Schmitt a appelé la reductio ad hitlerum, c’est-à-dire l’attribution de tous les malheurs de la société et du monde à de féroces dictateurs, et l’invention (dont l’origine est « de gauche ») de peuples unis contre les dictateurs. Les peuples furent médiatiquement unis contre des Hitler toujours nouveaux, ennemis des droits de l’homme. Le jeu commença avec Caucescu, continua avec Noriega, puis ce furent Saddam Hussein, Ahmadinejad, Milosevic, Kadhafi, et maintenant Assad. L’histoire a été abolie; on l’a remplacée par un canevas de comédie, toujours le même : un peuple uni contre le féroce dictateur; le silence coupable de l’Occident; les « bons » dissidents, auxquels est réservé le droit à la parole. Depuis un an, je n’ai jamais entendu à la télévision manipulée un seul partisan d’Assad, et pourtant, la Syrie en est pleine.

 

C’est seulement lorsque le jeu se durcit qu’il importe que les durs commencent à jouer. Tant que règne la comédie italienne de la parodie Droite/Gauche, il en est toujours comme de ces spectacles de catch américain où tout n’est que simulation devant des spectateurs idiots.

 

État national, souveraineté nationale, programme de solidarité et de communauté nationale, non à la globalisation sous toutes ses formes, et à la dictature des économistes anglophones !

 

Costanzo Preve
Traduit de l’italien par Yves Branca

 

Notes

 

1 : cf. Diego Fusaro, Minima mercatazlia. Philosophie et capitalisme, Bompiani, Milan, 2012.

 

2 : Norberto Bobbio (1909 – 2004). Turinois, professeur de philosophie politique, socialiste, célèbre en Italie. Plusieurs de ses ouvrages ont été traduits en français. Signalons, Droite et gauche, Paris, Le Seuil, 1996; L’État et la démocratie internationale. De l’histoire des idées à la science politique, Bruxelles, Éditions Complexe, 1999. Ce dernier ouvrage est considéré comme son œuvre majeure. Costanzo Preve a correspondu avec lui et a écrit une étude critique courtoise, mais radicale, de sa pensée, comme forme classique d’un politiquement correct de gauche : Les contradictions de Norberto Bobbio. Pour une critique du bobbioisme cérémoniel, Petite plaisance, 2004.

 

3 : Fondé en 2007, par une coalition de divers courants de gauche et centristes (démocrates chrétiens); d’une tonalité analogue au Nouveau Centre, allié de l’U.M.P. en France.

 

4 : Respectivement trotskiste à la manière du Parti des travailleurs [aujourd’hui remplacé par le Parti ouvrier indépendant, N.D.L.R. d’E.M.] ou de Lutte ouvrière, et refondateur communiste. Susceptibles de s’unir dans une sorte de « front de gauche » à l’italienne. Diliberto et Ferrero cités auparavant sont les chefs de file d’autres courants gauchistes et « refondateurs communistes ».

 

5 : Preve a quant à lui retrouvé l’inspiration aristotélicienne; à ses yeux, la communauté est la société même.

 

6 : Marine Le Pen, Pour que vive la France, Grancher, Paris, février 2012.

 

• Écrit à Turin, le 3 mars 2012, et mis en ligne le jour même sur le site italien ComeDonChisciotte.


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samedi, 19 mai 2012

Contre la proportionnelle

Contre la proportionnelle

par Georges FELTIN-TRACOL

 

Le 19 février 2012, lors d’une émission de « Méridien Zéro » consacrée à une « Histoire non-conformiste de l’élection présidentielle », Emmanuel Ratier critiqua la constitution de la Ve République, condamna le mode de scrutin majoritaire et en appela à l’établissement de la proportionnelle (1).

 

Dans le « camp national », il n’est pas le seul à la réclamer. À l’occasion des « clans de la presse » en première partie du « Libre-Journal de la Résistance française » sur Radio Courtoisie qu’Emmanuel Ratier anime un mercredi sur quatre, un autre de ses invités réguliers, Jérôme Bourbon, directeur du coruscant hebdomadaire Rivarol, défend lui aussi ce point de vue.

 

Il est exact que le scrutin majoritaire uninominal à deux tours déforme considérablement les résultats électoraux. Ainsi, aux élections législatives de juin prochain, il est très probable que le Front national n’ait que un, deux, voire aucun député, alors que sa présidente, Marine Le Pen, a recueilli à la présidentielle 6 421 426 suffrages (17,90 %). Dans le même temps, grâce à un accord électoral passé avec les socialistes, Europe Écologie – Les Verts peut espérer obtenir une trentaine de sièges malgré les 828 345 voix (2,31 %) de leur candidate, Éva Joly. Déjà, cinq ans plus tôt, François Bayrou, alors troisième homme de la présidentielle avec 18,57 % (6 820 119 voix), n’eut finalement que quatre députés !

 

Le scrutin majoritaire appliqué actuellement dans l’Hexagone crée de l’injustice politique et organise une réelle discrimination civique en rejetant des portions importantes du corps électoral. Tous les spécialistes des systèmes électoraux relèvent judicieusement que « cette injustice se double d’une certaine immoralité, dans la mesure où nombre de marchandages sont possibles à l’heure des désistements (2) ». Le scrutin proportionnel gomme ces travers et reflète le « corps des représentés, exprimant toutes les variétés, toutes les nuances physiques, idéologiques, économiques du corps social considéré (3) ». Mais, outre les problèmes arithmétiques de répartition des sièges entre les listes selon le plus fort reste, la plus forte moyenne, la méthode d’Hondt ou le quotient rectifié, la proportionnelle comporte de grands inconvénients tels que susciter l’instabilité ministérielle, favoriser des coalitions gouvernementales précaires et renforcer les partis politiques. Un peu comme leurs prédécesseurs ultra-royalistes sous la Seconde Restauration qui, à leur corps défendant, acclimatèrent en France le régime parlementaire anglomorphe alors qu’ils se présentaient en chantres de l’Ancien Régime (magnifique exemple d’hétérotélie historique), Emmanuel Ratier, Jérôme Bourbon et d’autres défendent avec passion le scrutin proportionnel afin que leur famille politique puisse être représentée à l’Assemblée nationale. Cependant, « il serait inexact de tenir le système proportionnel pour plus démocratique que d’autres, souligne Carl Schmitt. Les divisions qu’il introduit ne sont certes pas territoriales mais elles n’en traversent que plus fortement l’État entier (4) ».

 

Ce dysfonctionnement majeur a été perçu par un autre observateur attentif de l’Occident, Alexandre Soljénitsyne. De son exil forestier du Vermont, il soulignait que « les élections à la proportionnelle avec scrutin de liste renforcent exagérément le pouvoir des instances des partis, qui constituent les listes de candidats, l’avantage allant alors aux grands partis organisés (5) ». Du fait de son principe qui ne peut  concevoir que des listes, la proportionnelle avantage la partitocratie et la forme partisane avec une nette prédilection pour des candidats médiocres et serviles envers leur direction. Le révolutionnaire conservateur allemand et le dissident russe avaient compris que « ce sont […] les partis qui règnent au sein du Parlement en faisant et défaisant les majorités et les gouvernements sans tenir compte de l’opinion publique. Le régime des partis c’est également et surtout l’irresponsabilité des partis d’où la crise qu’ils provoquent dans le fonctionnement du régime parlementaire (6) ». Profondément partitocratique, la proportionnelle attise les coteries personnelles et attire les groupes de pression.

 

Il est néanmoins vrai qu’en France, le système partitocratique a su proliférer et s’implanter grâce au scrutin majoritaire. Est-ce pour autant une raison pour instituer une représentation proportionnelle ? Le raisonnement dans ces circonstances repose souvent sur une démonstration binaire et franchement manichéen. D’autres solutions existent pourtant au-delà des scrutins majoritaire à deux tours et proportionnel. Citons par exemple le vote préférentiel, le scrutin proportionnel à deux tours en vigueur aux élections municipales et régionales, le système proportionnel personnalisé allemand, le vote alternatif ou préférentiel appliqué en Australie ou le vote unique transférable en cours en Irlande et que les libéraux-démocrates britanniques ont tenté d’introduire sans succès à la Chambre des Communes. Ce mode de scrutin original assure à chaque parti « une représentation proportionnelle à sa force réelle et les électeurs ont élu les candidats de leur choix (7) ».

 

Mais tous ces systèmes électoraux entérinent l’existence des partis politiques. Or ce sont ces nuisances politiciennes qui perturbent par leur présence même l’ordre de la Cité. Ne faut-il pas dès lors envisager une alternative démocratique impartiale, c’est-à-dire sans la présence parasitaire et nocive de formations politiques, électorales ou politiciennes ? N’est-il pas temps de s’extraire des schémas vieillots, carrément obsolètes même, de la « représentation nationale » et d’abandonner le système représentatif ?

 

En effet, plutôt que de soutenir la proportionnelle, œuvrons en faveur d’une démocratie post-moderne. Ses fondements en seraient l’interdiction effective des partis politiques (comme en Iran), la généralisation de la pratique référendaire à chaque échelon administratif territorial avec des choix autres que les habituels « oui » ou « non » (des projets plutôt) – plus loin donc que la Suisse -, la révocation et le mandat impératif pour les magistrats (les exécutants gouvernementaux des décisions populaires), l’instauration du vote parental (8) et l’introduction massive du tirage au sort (embryon de clérocratie).

 

Imaginée par François Amanrich, président du Mouvement des clérocrates de France, la clérocratie est une solution d’avenir souhaitable dont les effets – hasardeux – seraient préférables à l’actuel système électif avec ses candidats pré-sélectionnés par les appareils militants pour leur obéissance, leur naïveté et leur avidité au gain (9). Les partis politiques ne servent à rien, faisons plutôt confiance aux aspirations du peuple incarné par ses citoyens. À la condition bien sûr qu’on entende par « citoyen » « l’enfant né de parents tous deux citoyens (10) ».


Georges Feltin-Tracol


Notes

1 : « Histoire non-conformiste de l’élection présidentielle » à « Méridien Zéro », le 19 février 2012, animée par le Lieutenant Sturm et Pascal G. Lassalle en compagnie d’Emmanuel Ratier et de Georges Feltin-Tracol. Le passage évoqué débute vers la vingt-cinquième minute.

2 : Jean-Marie Cotteret et Claude Emeri, Les systèmes électoraux, P.U.F., coll. « Que sais-je ? », n° 1382, Paris, 1983, p. 55.

3 : Id., p. 56.

4 : Carl Schmitt, Théorie de la Constitution, P.U.F., coll. « Léviathan », 1993, p. 378.

5 : Alexandre Soljénitsyne, Comment réaménager notre Russie ? Réflexions dans la mesure de mes forces, Fayard, Paris, 1990, p. 76.

6 : Gwénaël Le Brazidec, René Capitant, Carl Schmitt : crise et réforme du parlementarisme. De Weimar à la Cinquième République, L’Harmattan, coll. « Logiques juridiques », Paris, 1998, p. 133.

7 : Jean-Marie Cotteret et Claude Emeri, op. cit., p. 80.

8 : cf. Frederico Fubini et Danilo Taino, « Et si l’on accordait le droit de vote aux enfants ? », Corriere della Sera, repris dans Courrier international du 8 au 14 décembre 2011. Sur l’histoire du vote parental (ou familial), on peut se reporter – avec précaution car hostile à cette véritable idée d’avant-garde – à Jean-Yves Le Naour (avec Catherine Valenti), La famille doit voter. Le suffrage familial contre le vote individuel, Hachette, Paris, 2005. L’Autriche a abaissé le droit de vote à 16 ans et ces jeunes nouveaux électeurs apprécient beaucoup le parti populiste F.P.Ö.

9 : Le tirage au sort comme mode de désignation commence à être examiné avec attention par des juristes, des journalistes et des citoyens. Outre Georges Feltin-Tracol, « Plus loin que Simone Weil » et « La clérocratie comme alternative politique » dans Orientations rebelles (Les Éditions d’Héligoland, 2009) et Étienne Chouard (cf. son site <http://etienne.chouard.free.fr/> et son texte « Tirage au sort ou élection ? Démocratie ou aristocratie ? Qui est légitime pour faire ce choix de société ? Le peuple lui-même ou ses élus ? » repris par Polémia, le 29 avril 2012), un « grand » quotidien vespéral a évoqué cette idée révolutionnaire radicale à la fois traditionnelle et post-moderne dans ses pages intérieures : Pierre Barthélémy, « Et si on tirait au sort nos députés ? », Le Monde, 24 mars 2012, et Pierre Mercklé, « La démocratie au hasard », Le Monde, 28 avril 2012.

Dans son article d’improbablologie et en s’appuyant sur un modèle de calcul inspiré de la physique statistique, Pierre Barthélémy explique qu’une « Chambre aléatoire à 100 % est un échec retentissant. Certes, les projets de loi adoptés profitent tous au plus grand nombre, mais les 500 députés virtuels par ce modèle sont tellement indépendants les uns des autres que la plupart des textes n’obtiennent pas la majorité suffisante pour être votés ! Efficacité presque nulle ». Preuve rationnelle que la clérocratie est incompatible avec le système représentatif.

10 : Aristote, La politique, Vrin, introduit et traduit par J. Tricot, Paris,  1995, III, 2, p. 172.


 Article printed from Europe Maxima: http://www.europemaxima.com

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dimanche, 13 mai 2012

Volk und Nation

Michael PAULWITZ:

Volk und Nation

Ex: http://www.jungefreiheit.de/

PhilippVeit-Germania-I-DateUnknown.jpgDer „zweifache Nationsbegriff“ der Ungarn sei einer der Gründe, warum EU-Alteuropa den Magyaren so sehr mißtraut, führt Georg Paul Hefty in einem lesenswerten, leider nicht kostenfrei zugänglichen Beitrag in der Samstags-FAZ vom 5. Mai aus. Politischen Ausdruck findet der „zweifache Nationsbegriff“ in der neuen ungarischen Verfassung, die zwischen Staatsnation und Volk als Sprach- und Abstammungsgemeinschaft differenziert und vor allem deswegen – und wegen des expliziten Gottes- und Familienbezuges – zum Ziel eines regelrechten Kulturkampfes von seiten der EU-Kommission geworden ist.

Hefty zitiert aus der „Nationales Glaubensbekenntnis“ überschriebenen Präambel der neuen Verfassung: „Wir versprechen, daß wir die geistige und seelische Einheit unserer in den Stürmen des vergangenen Jahrhunderts in Teile zerrissenen Nation bewahren.“ Und weiter: „Geleitet von der Idee der einheitlichen ungarischen Nation, trägt Ungarn Verantwortung für das Schicksal der außerhalb seiner Grenzen lebenden Ungarn, fördert den Bestand und die Entwicklung ihrer Gemeinschaften, unterstützt ihre Anstrengungen zur Bewahrung ihres Ungarntums, bringt ihre Zusammenarbeit untereinander und mit Ungarn voran.“

Man muß schon Eurokrat oder komplett geschichtsignorant sein, um solche Formulierungen anstößig zu finden. Den meisten Europäern sei der doppelte Nationsbegriff fremd oder zumindest fremd geworden, stellt Hefty fest; die Deutschen hätten mit der Wiedervereinigung aufgehört, darüber nachzudenken, während die Ungarn gerade wieder damit anfingen.

Im Grundgesetz nur noch den Buchstaben nach vorhanden

Das ist zweifach fatal: Zum einen, weil es auch nach der Wiedervereinigung noch Deutsche außerhalb der deutschen Grenzen gibt, die politische Fürsorge verdient hätten – als Folge der Niederlagen in beiden Weltkriegen, nach deren zweiter Deutschland noch ärger zerstückelt wurde als Ungarn nach dem ersten, aber auch, weil das historisch entstandene Volksdeutschtum in Mittel-, Ost- und Südeuropa in Resten noch immer besteht.

Man könnte in den zitierten ungarischen Verfassungstexten mühelos statt „Ungarn“ „Deutschland“ bzw. „Deutsche“ einsetzen und das Resultat als konkreten Auftrag begreifen. Im Grundgesetz ist dagegen der volksbezogene Nationsbegriff zwar dem Buchstaben nach noch vorhanden, faktisch kümmert sich die Politik schon lange nicht mehr drum.

Das ist um so ärgerlicher, als der „zweifache Nationsbegriff“ ja recht eigentlich in Deutschland entstanden ist. Anders als die meisten Sprachen, auch das Ungarische, kennt das Deutsche sogar verschiedene Begriffe für beide Aspekte: „Volk“ und „Nation“. Nation beschreibt dabei das politisch organisierte Staatsvolk, das als Träger eines Nationalstaates zugleich handelndes und souveränes Subjekt im internationalen Verkehr mit anderen Nationen ist, während unter Volk eine ethnisch-kulturelle, durch gemeinsame Geschichte und Überlieferungen verbundene Abstammungs-, Sprach- und Kulturgemeinschaft zu verstehen ist.

Der deutsche Volksbegriff stand bei dem ungarischen Pate

Volk und Nation sind nicht notwendig deckungsgleich und waren es tatsächlich in der europäischen und insbesondere deutschen Geschichte häufig auch nicht. Angehörige desselben Volkes können in verschiedenen Staaten leben und Glieder unterschiedlicher Nationen sein, während Angehörige unterschiedlicher Völker oder Volksgruppen durchaus zu einer Nation verbunden sein können. Auch die neue ungarische Verfassung sieht die in Ungarn lebenden Nationalitäten und Ethnien selbstverständlich als Teile der ungarischen Nation.

Der Widerstreit zwischen dem französischen Nationsbegriff („Franzose ist, wer in Frankreich lebt“) und dem deutschen „volkstumsbezogenen Vaterlandsbegriff“ („so weit die deutsche Zunge klingt“) prägte das Ringen der Deutschen um die Gründung des modernen deutschen Staates im 19. Jahrhundert und wirkt bis heute fort. Mit der „kleindeutschen“ Reichsgründung von 1871, der Österreich nach tausendjährigem gemeinsamem Weg von der Mehrheit der Deutschen trennte, war entschieden, daß der Nationalstaat der Deutschen nicht das ganze deutsche Volk umfassen würde.

Der französische Nationsbegriff führte in der Vergangenheit zu mitleidloser Zwangsassimilation autochthoner Volksgruppen. Auch Ungarn wandte dieses Prinzip im 19. Jahrhundert an, als sein Reich noch viele fremde Völkerschaften umfaßte, und ist daran gescheitert. Den Volksbegriff der Deutschen entdeckten die Ungarn erst nach dem Vertrag von Trianon 1920.

Der französische Nationsbegriff setzt sich in der EU durch

In der Welt der EU-Politklasse soll es nur noch eine technokratisch reduzierte Version des französischen Nationsbegriffs geben: Staat gleich territoriale Verwaltungseinheit, Staatseinwohnerschaft gleich Nation, nationale Fragen und Bindungen sind auszuschalten, weil sie die freien Waren- und Menschenströme stören.

Aber gerade in Frankreich läßt sich studieren, daß dieser abstrakte Nationsbegriff angesichts massiver außereuropäischer Einwanderung ins Absurde umschlägt und zum Scheitern verurteilt ist. Nordafrikaner und Türken werden nicht dadurch zu Franzosen und Deutschen, daß man sie automatisch einbürgert. Zugehörigkeit zur Staatsnation wird üblicherweise durch Bekenntnis und Einbürgerung erworben, die im Idealfall eine bewußte Integrations- und Assimilationsentscheidung vollendet und nicht etwa Voraussetzung von „Integration“ ist; Zugehörigkeit zum Volk als Abstammungsgemeinschaft ist dagegen das Ergebnis eines längeren, über Generationen hinweg sich vollziehenden Einschmelzungs- und Vermischungsprozesses.

Voraussetzung für das eine wie für das andere ist der beiderseitige Wille zur Zusammengehörigkeit und ein ausreichender Vorrat an Gemeinsamkeiten. Wer zwischen Volk und Nation unterscheiden kann, weiß das. Auch deshalb täten wir besser daran, gemeinsam mit den Ungarn den „zweifachen Nationsbegriff“ hochzuhalten, statt uns dem einfältigen und wirklichkeitsignoranten EU-Sprech auszuliefern.

Michael Paulwitz , freier Journalist und Redakteur. Geboren 1965 in Eichstätt, studierte Geschichte, Latein und Slavistik in München und Oxford. Inhaber eines Büros für Presse- und Öffentlichkeitsarbeit in Stuttgart. Ständiger JF-Autor seit 2001. Verheiratet, Vater von zwei Kindern.

mardi, 08 mai 2012

The cooperative principle as the basis of Swiss political culture – past and present

Val-Ferret-Suisse.jpg

The cooperative principle as the basis of Swiss political culture – past and present

by Dr phil René Roca

Ex: http://www.currentconcerns.ch/

The cooperatives in their various forms provide an essential foundation for the Swiss federal state. As economic self-help organizations cooperatives are based on the personal concept of man. Cooperatives should not merely be considered as a form of organization but in a broader sense as an important form of society. A cooperative is supported by a community that raises the highest ethical demands to respective tasks and that assumes much responsibility as the owner of a common cause. The total property, which must be protected, belongs to the association of people and the individual cooperative members. The functioning of a cooperative is guided by strict rules. These are monitored and in case of violations the community is supposed to impose sanctions. The cooperative is always locally based and often embedded in a federal-subsidiary political system. Cooperative members democratically decide on every question, everyone has a one vote.

The purpose of a cooperative is that all the members of such an association have the optimal benefit of their common cause. Utilization can vary but the purpose must always serve the Bonum Commune, the common good anchored in natural law.

The well-known Swiss historian Professor Dr Adolf Gasser has highlighted the importance of the economic co-operative principle in a very clear and plausible way. According to his findings, the history of Europe was characterized and shaped by the strong contrast of two different ethical principles, namely domination and cooperative. In this manifestation, Gasser states, two worlds were facing each other that were subject to very different laws of development: the world in which the political system was established from above and the other world in which the structures developed from the bottom up, or in other words: the world of domination and the world of cooperative, the world of subordination and the world of co-ordination, the world of centralism and the world of communalism, the world of command and the world of self-government, the world of communal bondage and the world of communal freedom:
“The contrast between domination and cooperative might be the most important antithesis known in social history. This contrast of authoritarian state – state of society is simply about very fundamental issues: namely about the elementary foundations of human social life.”

In his major work “Gemeindefreiheit als Rettung Europas. Grundlinien einer ethischen Geschichtsauffassung” (Communal Freedom as a Rescue of Europe. Outlines of an ethical conception of history) Gasser explains that it is the cooperative organizing principle which leads to community ethics:

“Whereas in an authoritarian-bureaucratic state, politics and morality always base on different levels, they are inseparable in a social-communal state. Accordingly, it is the cooperative organizing principle, as it is the foundation of the bottom up community, which can be called ‘communal community ethics’.”

In Switzerland this cooperative principle has not only been applied since 1848, but even before it had been an integral part of the federal ethos for centuries. This can be shown by a look at history.

The origin and history of the cooperative principle

The cooperative principle itself is probably as old as mankind, but it lacks written sources. Even for Late Antiquity and the Early Middle Ages, the sources are sparse. But a look at the ensuing written sources and the knowledge about man’s social nature reveal that cooperative forms of organization were prevailing at that time. Most of the cooperatives developed from the medieval cadastral constitution or in other words, they emerged from the “medieval common Mark”.
One theory is that the free Mark cooperatives date back to the conquest of the Germanic peoples at that time. The land acquisition was done by clans, called ‘groups of a hundred’, assigned to them by the prince in their areas. These areas were just called “Mark(graviates)”, and their soil was cultivated cooperatively. The communal and economic life within the clan was thus a free Mark cooperative. The Frankish constitution and the feudal system have suppressed this early medieval order in many parts of Europe, except in some places, such as the pre-Alpine regions of today’s Switzerland. This tradition has partly been kept alive until today on the existing common land cooperatives, alpine and forest cooperatives.

Another approach emphasizes that the Mark cooperatives were only established in the high and late Middle Ages as a merger of existing rural cooperatives; or they were created by concentration of neighborhood associations. The residents wanted to regulate the use of the common Mark within a larger framework. The population increase, the then prevailing three-field system and the further development of the country supported this development. The regulations along borders and roads as well as agreements were necessary to cope with the joint work.

Both explanations are important and deserve attention when exploring the origin and development of the cooperative principle in the European Middle Ages. These early roots of the cooperative system are essential for the understanding of the Swiss political system. The historian Professor Dr Wolfgang von Wartburg writes:

“These small, natural, self-governing communities have been fertile ground and seminary of Swiss freedom and democracy and they still are today. The most extensive and most viable Mark cooperatives could however be found in the mountains, where the joint Alp and cattle farming encompassed entire valleys.”1

Development of the cooperative principle in the Middle Ages and the Early Modern Age

In Switzerland, the Allmend, i.e. the common grounds or commons, were central to the spreading and development of the cooperatives. These areas were used for pasture, as forest and desert ground and they were open to everyone. To establish their commons, the inhabitants of a village association – of one or more villages, hamlets or groups of farms – designated a specific area for collective economic use. A peasant family’s work was thus divided into three parts: Besides the agricultural land and the residential area with gardens and homesteads the commons represented a third zone, which was jointly worked. Since the early Middle Ages the European nobility had sought to restructure the common lands constitution or at least influence it. In many places, including the territory of modern Switzerland, the cooperative principle could however be maintained. Due to the diversity of local conditions and human relations a variety of forms of cooperatives have developed over time.

For Switzerland, the preconditions of settlement history were particularly important. In the Swiss Central Plateau, where the dwellings concentrated and became villages, the common Mark or Allmend alongside with house, garden and fields was essential for all villagers. Therefore, regulations on the use of the commons and on the management of arable ground seemed necessary. Such land utilization systems had been in use since the 10th century. A prerequisite for the use of commons was often the long-term possession of a farm within the village district. Newcomers had to buy this right and pay an entry fee. By establishing and claiming definite rules the rural population was often able to resolve their conflicts via neighborly agreements. The cities also had a common Mark and enacted a similar legislation. In the hilly Alpine foreland the farms united and formed so-called Allmend cooperatives. In many places of the Alps so-called valley cooperatives were established – on the basis of the valley communities as rural associations – as for example in Uri, Ursern, Schwyz, Glarus, Entlebuch, in the Grisons, the Valais and the Ticino valleys.

The commons were of fundamental importance for the livestock until silage feeding in summer was introduced. In addition to the meadows and the stubble of the arable land, farmers grazed the forest, in particular with pigs. The forest also provided wood for construction and fireplaces. The collection of fruit and berries or mushrooms complemented the people’s nutrition and secured them in case of crop failure. The Allmend has always been a kind of land reserve the people could resort to if necessary. From the 16th century onward the commons were divided and became separate property, but many also stayed intact until the rise of the Helvetic Republic and beyond.

The Nobel Prize in Economy laureate Professor Dr Elinor Ostrom studied the basic “constitution of the commons” in a comprehensive, world-wide study.2 Based on historical examples from different continents, she revealed the importance of the cooperative principle for the present. Based on the commons her study is a reminder of how people organize in view of scarce natural resources, in order to jointly solve complex problems. In her comprehensive studies Elinor Ostrom concludes that cooperation of those directly affected is better than state control or privatization if they want good management of their local commons and their resources. So she impressively appreciates the cooperative principle and clearly reveals its importance for the economies of the 21st century.

In the Middle Ages the commons formed an important foundation of social interaction; their rules provided order and security for the geographical area we now call Switzerland. Special types of cooperatives that serve specific purposes developed in addition to the commons which could be found in all agricultural villages until the 18th century. The Alpine cooperatives that are numerous in the Alps and the Jura are of great importance. Moreover, along the rivers and streams the so-called ‘weir cooperatives’ developed. In hydraulic engineering the term ‘weir’ means barrage. For the irrigation of lawns the so-called irrigation cooperatives developed, too.

The landlords and rulers repeatedly tried to exert influence on the organization of cooperatives, such as the Habsburgs in Central Switzerland. The early Confederation could however fend off such requests successfully. In the course of the 13th century Uri and Schwyz were given charters and they were even able to maintain this imperial competence later on. It enabled these valley cooperatives to freely dispose of their commons and use them without any outside interference. On this basis, the federal states and the Federal Charter of 1291 developed. In Uri and Schwyz the big valley cooperatives – the corporations Uri and Ursern in the canton Uri and the corporations Oberallmeind Unterallmeind in the canton Schwyz – have survived until today. The term “corporation” emerged in the late Middle Ages and can be equated with “cooperative”.

The Genossame has always been the highest authority of the cooperative. The meetings were chaired by a president who was elected as governor, beadle or Alp master. The chairman had to take decisions, carry out inspections and was responsible for administration and judiciary. The common public work was completed in the cooperative association. The rights and obligations were laid down in statutes and codes.

The cooperatives were of major political significance for the later development of the Confederation. They developed a community-building spirit, without which a nation forged by the will of the people like Switzerland could never have emerged. Therefore, during the late Middle Ages and in Early Modern Age the rural or valley cooperatives took over other tasks of common work besides their traditional ones. Such were the maintenance of roads and bridges or hydraulic engineering, water supply, the building of churches or even the duty to care for the poor. Thus, the rural and valley cooperatives developed slowly into rural and valley communities, the foundation of the future federal state.

Wolfgang von Wartburg aptly writes about this process: “The Swiss ideal of freedom has emerged from this human reality, not from an abstract idea [...]. Thus, the formation of the Swiss government differs from all other state formations in Europe. It is not based on the desire for political unity, but rather on the desire to preserve the original character and freedom of the members, thereby helping to maintain their diversity. Its unity is not created by a superior power or by uniformity but by free cooperation in joint tasks.”3

The comrades became citizens of the village and the former village cooperatives developed into public village communities. By the time this led to the development of the so-called “Bürgergemeinde”4 (citizens’ communes) that are still in existence in several cantons.

The Helvetic Republic of 1798 resulted in the separation of residents’ communes and citizens’ communes. The division of the commons was intensified then. Some commons were on lease or in private ownership, others were owned by residents’ communes, or corporations formed under private law.

The corporations and citizens’ communes in Switzerland are still an important traditional good and establish human connections to a commune’s history and culture. In the canton of Grisons, for example, the old rural cooperatives are still alive in the residents’ communes, so these are also the owners of most of the commons. In the central Swiss area around Bern the citizens’ communes as successors of the original rural cooperatives own the common property and manage it; this is also true for the canton of Valais. In the north of the Alps and the Ticino, the corporations or corporate citizens’ communes are the owners and managers of the commons.

Cooperative movement in the 19th Century – the cooperative as a moral foundation of democracy

Without the tradition of the commons and the described “cooperative spirit” in Switzerland the foundation of the Confederation in 1848 would never have taken place. Adolf Gasser emphasizes that this Swiss “cooperative spirit” always roots in the small unit, i.e. in the small neat unit of the commune, whose origin goes back to the cooperative principle. Only in such a unit a vibrant co-operative autonomy can develop. Adolf Gasser comments on that:
“Large-scale political bodies of national character could only develop in a cooperative spirit, if they emerged from an assembly of free, fortified people’s communities.” Based on the Swiss tradition of the commons and the cooperative, a large cooperative movement formed itself in the course of the 19th century, especially with the increasing industrialization.

This movement – in Switzerland and in Europe – infiltrated into new industrial areas but not without preserving the basic cooperative principles. The various types of cooperatives will be briefly presented below.

Agricultural cooperatives

In particular, the agricultural crisis of the 1880s in Switzerland triggered a wave of creation of new cooperatives, especially purchasing and marketing cooperatives. Farmers drew on the tradition of the commons and Alpine corporations as well as the dairy cooperatives. In the course of the 19th century, these cooperatives spread as milk and dairy cooperatives from the mountains to the lowlands, i.e. to the Central Plateau cantons of the German and French part of Switzerland. Towards the end of the 19th century there were about 2,000 of these cooperatives. At the beginning of the 20th century they joined to form associations without weakening the local cooperatives. The Eastern Swiss Association of Agricultural Cooperatives (Volg) is a pioneer of such a cooperative association. In the 1890s, cooperatives also emerged in the livestock branch. Agricultural cooperatives are still of significant importance in the agricultural sector.

Production cooperatives

During the industrial revolution production cooperatives were also established in Switzerland. Here, the cooperative members are not only owners but also employees of the cooperation. The idea of cooperative production was primarily developed by early socialist and social reform movements, who sought an answer to the social issue. In this context, the Englishman Robert Owen with his cooperative model plays a pioneer role. Under the influence of the early French socialists Charles Fourier and Louis Blanc the first production cooperatives were established in the 1840s, especially in the French part of Switzerland. Again, the cooperative explicitly stood in the tradition of cooperative self-help, as it had been important in rural commons corporations or Alpine corporations.

Consumer Cooperatives (Consumer associations)

The consumer cooperatives became particularly important for the economy. of The consumer cooperatives’ antecedents were the bread and fruit clubs, in which workers, craftsmen and farmers united, sometimes supported by manufacturers, to enable the cheap purchase of grain, other food or fuel and to make bread.

In the second half of the 19th century workers and later employees, officials and farmers joined to protect and foster their interests as consumers through joint procurement of essential goods. In 1851, eight members of the patriotic Grütli association around Karl Bürkli founded the Consumer Society Zurich (KVZ) which was the first to be called “consumer society”. The cooperative principles included an open membership, democratic management, the potential refunding and political and religious neutrality. The consumer society Zurich was soon imitated all over Switzerland (Founding of the Swiss Consumers’ Societies; from 1890 on called the Swiss Association of Consumer Associations, VSK; Coop since 1970). The consumer cooperation also stood in the cooperative tradition of Switzerland, of course.

Housing cooperatives

In the course of the 19th century the population of Switzerland doubled. At the same time, the shifting from home industry to factory-based industry in rural territories as well as in towns led to poor housing conditions and severe housing shortage. In the mid-19th century private housebuilding was mainly in the hands of speculators. At the beginning of the 20th century, finally, the cooperative and communal principle also became more and more important in the housebuilding sector. One reason was that the public authorities intervened extensively in the housing market for the first time and accepted housebuilding as a task of general public interest. Thus non-profit housing cooperative came into the necessary money to realise own communal building projects.

Credit cooperatives and savings cooperatives

Since the first quarter of the 19th century, savings and lending banks had been established in Switzerland in the course of industrialisation. Rural and urban homeworkers and factory workers wanted to invest their saved money and plan the provisions for their old age. Communes and cantons often founded their own savings banks or promoted their development by providing guarantees and donating capital funds. In 1850 already 150 savings banks were existent in Switzerland which devoted themselves in particular to the mortgage business and then also to the granting of operating credits. As many savings and lending banks risked their non-profit status over time, they lost importance from 1860 on. Sensible alternatives were the upcoming cantonal banks and the foundation of numerous cooperative local banks, inter alia the Raiffeisen banks. Due to a broader capital basis they had more freedom to grant credits; and as cooperatives they deserved the confidence of many citizens.

The main focus of Raiffeisen banks was on the savings and mortgage business. Until this day, every Raiffeisen bank is legally independent and each of them belongs to its cooperative members. The first Raiffeisen bank of Switzerland was founded in 1899 in Bichelsee on the initiative of the Catholic priest Johann Evangelist Traber. He was guided by the example of Friedrich Wilhelm Raiffeisen who had founded credit cooperatives in Germany around 1850. They were to strengthen the rural population by collective self-help and thus protect them against usury.


Traber describes the Raiffeisen banks as follows:

“What are Raiffeisen banks? They are credit unions which are based on altruism and charity, willing to make sacrifices; they are intended to enhance the status of farmers, craftsmen, trade and commerce morally and economically and to strengthen the financially weak.”5

The cooperative movement of the 19th century emphasised the cooperative tradition in Switzerland. So they succeeded in connecting conservative political forces with early socialism which was solidly connected to trade unions and labour parties via the Grütliverein. Similar to the development of direct democracy they succeeded – outgoing from the communal level up to the cantonal and national level – in establishing a national movement which internalised the cooperative idea across party lines.

Cooperative movement in the 20th century – social capital and the third way

The cooperative as a legal form was established in 1881 in the Swiss code of obligations and was becoming increasingly popular. Thus the number of cooperatives massively increased in Switzerland around the turn of the century (in 1883: 373; in 1890: 1,551; in 1910: 7,113). Above all, the most important reasons were the recurrent crises of the capitalist economy. With the big crisis of the 1930s the founding of cooperatives strongly rose again, until they reached a culmination point in 1957 with more than 12,000 cooperatives.

Barely half of the cooperatives were of agricultural nature; in addition, new ones came from tertiary sectors, as for example the electricity industry. After the Second World War building and housing cooperatives were founded and promoted particularly often.

The Migros, founded in 1925, was based on a business idea of Gottlieb Duttweiler. He had set himself the target to sell cheaper food by avoiding intermediary trade. In 1941 the Migros was converted into a cooperative. The intention was to protect the consumers’ interests and orient the business policy towards the “social capital”. For Duttweiler, the idea of the social capital was based on the cooperative principle: the capital must serve the community in a responsible way and foster solidarity in society. According to Duttweiler, the cooperative idea also fosters democracy in a decentralised sense and from bottom up.

The cooperative principle did not only win many supporters as an economic concept; in politics as well a number of personalities tried to establish this principle as the third way – beyond capitalism and communism. The political concept wanted to convert the capitalistic society into a society based on public service. Thus the labour movement in Switzerland also accepted the so-called “three-pillar-model” consisting of “party, trade unions and cooperatives”. Among other things, the trade unions supported the creation of production cooperatives and the social democratic party incorporated the support of the cooperatives in their programme from the outset. In 1895 a programme revision failed, inspired by Stefan Gschwind from Basel Land, who wanted the socialisation of cooperatives instead of nationalisation make the key tool for the transition to socialism.

After the First World War religious-socialist circles around Leonhard Ragaz also accepted the cooperative idea and saw in it an important basis for a fairer society. Leonhard Ragaz turned against Marxist, state-centred approaches and held the view of a federalist, cooperative and pacifist socialism.

From 1970 on, the discussions about self-government and alternative economic management provided the cooperative movement with new impulses. This was also reflected in the social democratic party of Switzerland. Toward the end of the 1970s the comrades discussed a revised version of the party programme. Famous personalities like the philosopher Professor Dr Arnold Künzli added the Yugoslavian model of self-government to the discussion. This model should form the basis to overcome capitalism and to establish a democratic, socialist society with the help of the cooperative principle. However, the Yugoslavian model entered only sparsely the revised programme sanctioned in 1982. Many suggestions remained in cold storage and were not resumed in the newest programme, which has been sanctioned only recently. Thus the social democrats reject their traditional “three-pillar-model” and ignored the cooperative principle without which, however, they are not able to realise their aim of a “social-ecological economic democracy”.

And today?

Today in Switzerland there still are more than 12,000 cooperatives. This number must yet be increased and the cooperative principle as a comprehensive and sensible economic model must be appreciated appropriately. The cooperative approach must be discussed again broadly and be taught in schools and universities. If we study and investigate Swiss history and culture, we will become aware of the rich cooperative fund. Once more Wolfgang von Wartburg:

“Thus the Swiss person finds his political orientation in his homeland not in abstract ideas, but in the real world. However, this reality is the person himself as a free, autonomous personality – and the alliance of free personalities in small and smallest communities.” 6

Elinor Ostrom lists principles for a successful economic activity as a résumé of her research about the commons. She was able to monitor these principles on the basis of examples worldwide. They serve as an approach toward economic problems. If we followed them in Switzerland we would continue a long cooperative tradition and pursue it in a dignified manner. Ostrom’s cooperative principles are the following:

1. Clearly defined boundaries and an effective exclusion of external non-entitled parties.
2. Rules for appropriation and provision of resource units must be related to local conditions.
3. Users can participate in modifying operational rules so that an improved adaptation to changing conditions becomes possible.
4. Monitoring of compliance with the rules.
5. Graduated sanctions in case of violations of rules.
6. Conflict-resolution mechanisms.
7. The independent rights of communes are not challenged by superior governmental authorities.     •

1    Von Wartburg, Wolfgang: Geschichte der Schweiz, München 1951, p. 17
2    Governing the Commons: The Evolution of Institutions for Collective Action, Ostrom, Elinor, Cambridge University Press, 1990
3    Von Wartburg, Wolfgang: Geschichte der Schweiz, München 1951, p. 11
4    Bürgergemeinde is a statutory corporation in public law in Switzerland. It includes all individuals who are citizens of the Bürgergemeinde, usually by having inherited the Bürgerrecht (citizenship), regardless of where they were born or where they may currently live. (Wikipedia)
5    Traber, Joh. Ev.: Kurze Aufklärung über Raiffeisensche Darlehenskassenvereine im Lichte eines praktischen Beispiels, St Gallen 1907, p. 3
6    Von Wartburg, Geschichte der Schweiz, p. 10

Housing cooperatives in today’s Switzerland

mw. Even in the 21st century, housing cooperatives still play an important role in Switzerland. Primarily in towns there are, according to the Schweizerischer Verband für das Wohnungswesen (SVW – Swiss cooperative housing federation) around 1,500 housing cooperatives operate about 160,000 housing units which represent 5.1% of all housing units. In the city and the canton of Zurich alone, there are about 60,000 cooperative housing units.

Housing cooperatives do not only rent flats; they also include several cooperative activities: from neighbourly help to the compost team, parades for children with lamps made of turnips, excursions for seniors and the cooperative festivities. Once a year the cooperative assembly takes place, where the associates, i.e. the tenants of the flats, vote on legal issues – for example for the restoration of buildings or the construction of a district heating – and elect members to the cooperative bodies. Primarily in cities housing cooperatives contribute fundamentally to social cohesion of the people, especially in urban areas.

Source: www.mietbar.ch/index.cfm?&js=1 

jeudi, 03 mai 2012

North American New Right, vol. 1

North American New Right, vol. 1

North American New Right, volume 1
Edited by Greg Johnson
366 pages

hardcover: $120

paperback: $30

Publication date: May 30, 2012

North American New Right is the journal of a new intellectual movement, the North American New Right. This movement seeks to understand the causes of the ongoing demographic, political, and cultural decline of European peoples in North America and around the globe — and to lay the metapolitical foundations for halting and reversing these trends.

The North American New Right seeks to apply the ideas of the European New Right and allied intellectual and political movements in the North American context. Thus North American New Right publishes translations by leading European thinkers as well as interviews, articles, and reviews about their works.

NOTE: The hardcover edition of NANR is so expensive because it is a premium available to donors who give more than $120 in a given year. If you have already given such a donation, you already own a copy.

CONTENTS

INTRODUCTION

“Toward a North American New Right”
Greg Johnson

FRANCIS PARKER YOCKEY: IN MEMORIAM

“The Death of Francis Parker Yockey”
Michael O’Meara

“Spiritual & Structural Presuppositions of the European Union”
Julius Evola

“A Contemporary Evaluation of Francis Parker Yockey”
Kerry Bolton

“The Overman High Culture & the Future of the West”
Ted Sallis

Six Poems for Francis Parker Yockey
Juleigh Howard-Hobson

INTERVIEWS

Interview with Alain de Benoist
Bryan Sylvain

Interview with Harold Covington
Greg Johnson

ESSAYS

“What is to be Done?”
Michael O’Meara & John Schneider

“Pan-European Preservationism”
Ted Sallis

“Vanguard, Aesthetics, Revolution”
Alex Kurtagić

“Absolute Woman: A Clarification of Evola’s Thoughts on Women”
Amanda Bradley

“D. H. Lawrence’s Women in Love
Derek Hawthorne

“’The Flash in the Pan’: Fascism & Fascist Insignia in the Spy Spoofs of the 1960s”
Jef Costello

TRANSLATIONS

“The Lesson of Carl Schmitt”
Guillaume Faye & Robert Steuckers

“Homer: The European Bible”
Dominique Venner

“Mars & Hephaestus: The Return of History”
Guillaume Faye

“Post-Modern Challenges: Between Faust & Narcissus”
Robert Steuckers”

“Jean Thiriart: The Machiavelli of United Europe”
Edouard Rix

REVIEW ESSAYS

Michael O’Meara’s Toward the White Republic
Michael Walker”

Michael Polignano’s Taking Our Own Side
Kevin MacDonald

“A Serious Case: Guillaume Faye’s Archeofuturism
F. Roger Devlin

Julius Evola’s Metaphysics of War
Derek Hawthorne

Abir Taha’s The Epic of Arya
Amanda Bradley

Jack Malebranche’s Androphilia
Derek Hawthorne

“Sir Noël Coward, 1899–1973: The Noël Coward Reader
James J. O’Meara

Arkham Asylum: An Analysis”
Jonathan Bowden

“Christopher Nolan’s Batman Begins & The Dark Knight
Trevor Lynch

ABOUT THE EDITOR

Greg Johnson, Ph.D., Editor-in-Chief of Counter-Currents Publishing Ltd. and Editor of the annual journal North American New Right. From 2007 to 2010 he was Editor of The Occidental Quarterly. In 2009, he created TOQ Online with Michael J. Polignano and was its Editor for its first year.

He is the author of Confessions of a Reluctant Hater (San Francisco: Counter-Currents, 2010).

He is editor of Alain de Benoist, On Being a Pagan, trans. John Graham (Atlanta: Ultra, 2004); Michael O’Meara, Toward the White Republic (San Francisco: Counter-Currents, 2010); Michael J. Polignano, Taking Our Own Side (San Francisco: Counter-Currents, 2010); Collin Cleary, Summoning the Gods: Essays on Paganism in a God-Forsaken World (San Francisco: Counter-Currents, 2011); Irmin Vinson, Some Thoughts on Hitler and Other Essays (San Francisco: Counter-Currents, 2011); and Kerry Bolton, Artists of the Right: Resisting Decadence (San Francisco: Counter-Currents, 2012).

dimanche, 29 avril 2012

Staat-Recht=Mafia!

Staat-Recht=Mafia!

samedi, 28 avril 2012

Parteien-Mafia? - Die Deutschlandakte - H. H. von Arnim

Parteien-Mafia? - Die Deutschlandakte

H. H. von Arnim

jeudi, 26 avril 2012

Platon, encore et toujours

Platon, encore et toujours

par Claude BOURRINET

Est-il une époque dans laquelle la possibilité d’une prise de distance ait été si malaisée, presque iplatocooperativeindividualismorg.jpgmpossible, et pour beaucoup improbable ? Pourtant, les monuments écrits laissent entrevoir des situations que l’on pourrait nommer, au risque de l’anachronisme, « totalitaires », où non seulement l’on était sommé de prendre position, mais aussi de participer, de manifester son adhésion passivement ou activement.

L’Athènes antique, l’Empire byzantin, l’Europe médiévale, l’Empire omeyyade, et pour tout dire la plupart des systèmes socio-politiques, de la Chine à la pointe de l’Eurasie, et sans doute aussi dans l’Amérique précolombienne ou sur les îles étroites du Pacifique, les hommes se sont définis par rapport à un tout qui les englobait, et auquel ils devaient s’aliéner, c’est-à-dire abandonner une part plus ou moins grande de leur liberté.

S’il n’est pas facile de définir ce qu’est cette dernière, il l’est beaucoup plus de désigner les forces d’enrégimentement, pour peu justement qu’on en soit assez délivré pour pouvoir les percevoir. C’est d’ailleurs peut-être justement là un début de définition de ce que serait la « liberté », qui est avant tout une possibilité de voir, et donc de s’extraire un minimum pour acquérir le champ nécessaire de la perception.

Si nous survolons les siècles, nous constatons que la plupart des hommes sont « jetés » dans une situation, qu’ils n’ont certes pas choisie, parce que la naissance même les y a mis. Le fait brut des premières empreintes de la petite enfance, le visage maternel, les sons qui nous pénètrent, la structuration mentale induite par les stimuli, les expériences sensorielles, l’apprentissage de la langue, laquelle porte le legs d’une longue mémoire et découpe implicitement, et même formellement, par le verbe, le mot, les fonctions, le réel, l’éducation et le système de valeurs de l’entourage immédiat, tout cela s’impose comme le mode d’être naturel de l’individu, et produit une grande partie de son identité.

L’accent mis sur l’individu s’appelle individualisme. Notons au passage que cette entité sur laquelle semble reposer les possibilités d’existence est mise en doute par sa prétention à être indivisible. L’éclatement du moi, depuis la « mort de Dieu », du fondement métaphysique de sa pérennité, de sa légitimité, accentué par les coups de boutoir des philosophies du « soupçon », comme le marxisme, le nietzschéisme, la psychanalyse, le structuralisme, a invalidé tout régime s’en prévalant, quand bien même le temps semble faire triompher la démocratie, les droits de l’homme, qui supposent l’autonomie et l’intégrité de l’individu en tant que tel.

Les visions du monde ancien supposaient l’existence, dans l’homme, d’une instance solide de jugement et de décision. Les philosophies antiques, le stoïcisme, par exemple, qui a tant influencé le christianisme, mais aussi les religions, quelles qu’elles soient, païennes ou issues du judaïsme, ne mettent pas en doute l’existence du moi, à charge de le définir. Cependant, contrairement au monde moderne, qui a conçu le sujet, un ego détaché du monde, soit à partir de Hobbes dans le domaine politique, ou de Descartes dans celui des sciences, ce « moi » ne prend sa véritable plénitude que dans l’engagement. Aristote a défini l’homme comme animal politique, et, d’une certaine façon, la société chrétienne est une république où tout adepte du Christ est un citoyen.

On sait que Platon, dégoûté par la démagogie athénienne, critique obstiné de la sophistique, avait trouvé sa voie dans la quête transcendante des Idées, la vraie réalité. La mort de Socrate avait été pour lui la révélation de l’aporie démocratique, d’un système fondé sur la toute puissance de la doxa, de l’opinion. Nul n’en a dévoilé et explicité autant la fausseté et l’inanité. Cela n’empêcha pas d’ailleurs le philosophe de se mêler, à ses dépens, du côté de la Grande Grèce, à la chose politique, mais il était dès lors convenu que si l’on s’échappait vraiment de l’emprise sociétale, quitte à y revenir avec une conscience supérieure, c’était par le haut. La fuite « horizontale », par un recours, pour ainsi dire, aux forêts, si elle a dû exister, était dans les faits inimaginables, si l’on se souvient de la gravité d’une peine telle que l’ostracisme. Être rejeté de la communauté s’avérait pire que la mort. Les Robinsons volontaires n’ont pas été répertoriés par l’écriture des faits mémorables. Au fond, la seule possibilité pensable de rupture socio-politique, à l’époque, était la tentation du transfuge. On prenait parti, par les pieds, pour l’ennemi héréditaire.

Depuis Platon, donc, on sait que le retrait véritable, celui de l’âme, à savoir de cet œil spirituel qui demeure lorsque l’accessoire a été jugé selon sa nature, est à la portée de l’être qui éprouve une impossibilité radicale à trouver une justification à la médiocrité du monde. L’ironie voulut que le platonisme fût le fondement idéologique d’un empire à vocation totalitaire. La métaphysique, en se sécularisant, peut se transformer en idéologie. Toutefois, le platonisme est l’horizon indépassable, dans notre civilisation (le bouddhisme en étant un autre, ailleurs) de la possibilité dans un même temps du refus du monde, et de son acceptation à un niveau supérieur.

Du reste, il ne faudrait pas croire que la doctrine de Platon soit réservée au royaume des nuées et des vapeurs intellectuelles détachées du sol rugueux de la réalité empirique. Qui n’éprouve pas l’écœurement profond qui assaille celui qui se frotte quelque peu à la réalité prosaïque actuelle ne sait pas ce que sont le bon goût et la pureté, même à l’état de semblant. Il est des mises en situation qui s’apparentent au mal de mer et à l’éventualité du naufrage.

Toutefois, du moment que notre âge, qui est né vers la fin de ce que l’on nomme abusivement le « Moyen Âge », a vu s’éloigner dans le ciel lointain, puis disparaître dans un rêve impuissant, l’ombre lumineuse de Messer Dieu, l’emprise de l’opinion, ennoblie par les vocables démocratique et par l’invocation déclamatoire du peuple comme alternative à l’omniscience divine, s’est accrue, jusqu’à tenir tout le champ du pensable. Les Guerres de religion du XVIe siècle ont précipité cette évolution, et nous en sommes les légataires universels.

Les périodes électorales, nombreuses, car l’onction du ciel, comme disent les Chinois, doit être, dans le système actuel de validation du politique, désacralisé et sans cesse en voie de délitement, assez fréquent pour offrir une légitimité minimale, offrent l’intérêt de mettre en demeure la vérité du monde dans lequel nous tentons de vivre. À ce compte, ce que disait Platon n’a pas pris une ride. Car l’inauthenticité, le mensonge, la sidération, la manipulation, qui sont le lot quotidien d’un type social fondé sur la marchandise, c’est-à-dire la séduction matérialiste, la réclame, c’est-à-dire la persuasion et le jeu des pulsions, le culte des instincts, c’est-à-dire l’abaissement aux Diktat du corps, l’ignorance, c’est-à-dire le rejet haineux de l’excellence et du savoir profond, plongent ce qui nous reste de pureté et d’aspiration à la beauté dans la pire des souffrances. Comment vivre, s’exprimer, espérer dans un univers pareil ? Le retrait par le haut a été décrédibilisé, le monde en soi paraissant ne pas exister, et le mysticisme n’étant plus que lubie et sublimation sexuelle, voire difformité mentale. Le défoulement électoraliste, joué par de mauvais acteurs, de piètres comédiens dirigés par de bons metteurs en scène, et captivant des spectateurs bon public, niais comme une Margot un peu niaise ficelée par une sentimentalité à courte vue, nous met en présence, journellement pour peu qu’on s’avise imprudemment de se connecter aux médias, avec ce que l’humain comporte de pire, de plus sale, intellectuellement et émotionnellement. On n’en sort pas indemne. Tout n’est que réduction, connotation, farce, mystification, mensonge, trompe-l’œil, appel aux bas instincts, complaisance et faiblesse calculée. Les démocraties antiques, qui, pourtant, étaient si discutables, n’étaient pas aussi avilies, car elles gardaient encore, dans les faits et leur perception, un principe aristocratique, qui faisait du citoyen athénien ou romain le membre d’une caste supérieure, et, à ce titre, tenu à des devoirs impérieux de vertu et de sacrifice. L’hédonisme contemporain et l’égalitarisme consubstantiel au totalitarisme véritable, interdisent l’écart conceptuel indispensable pour voir à moyen ou long terme, et pour juger ce qui est bon pour ne pas sombrer dans l’esclavage, quel qu’il soit. Du reste, l’existence de ce dernier, ce me semble, relevait, dans les temps anciens, autant de nécessités éthiques que de besoins économiques. Car c’est en voyant cette condition pitoyable que l’homme libre sentait la valeur de sa liberté. Pour éduquer le jeune Spartiate, par exemple, on le mettait en présence d’un ilote ivre. Chaque jour, nous assistons à ce genre d’abaissement, sans réaction idoine. La perte du sentiment aristocratique a vidé de son sens l’idée démocratique. Cette intuition existentielle et politique existait encore dans la Révolution française, et jusqu’à la Commune. Puis, la force des choses, l’avènement de la consommation de masse, l’a remisée au rayon des souvenirs désuets.

Claude Bourrinet


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mercredi, 25 avril 2012

Julien Freund. Del Realismo Político al Maquiavelismo

Julien Freund. Del Realismo Político al Maquiavelismo

Ex: http://disenso.org

Por Jerónimo Molina Cano*

Memoria de un hombre de acción escritor político

freund11.jpgEl pasado día diez de septiembre del 2003 se cumplió el décimo aniversario de la desaparición del filósofo político y polemólogo francés Julián Freund. Había nacido en 1921 en un pueblecito lorenés de poco más de seiscientos habitantes (Henridorff), criándose, hijo de un peón ferroviario, en el ambiente de una familia muy humilde de clase obrera. Desde principios de los años ochenta Freund vivía en su retiro de Villé (Alsacia), su San Casciano, apartado de la burocratizada vida universitaria. En 1993 su muerte no trascendió del círculo de sus adictos, discípulos y amigos. Unas pocas necrológicas, la edición póstuma de un magnífico libro sobre La esencia de lo económico, en el que laboró tenazmente los últimos meses de su vida para dejar constancia «de [mi] lucha permanente y obstinada contra la enfermedad», y la promesa —hasta el día de hoy, por desgracia, frustrada— de una pronta publicación de sus Cartas desde el valle (Lettres de la vallée), cifra de un realismo que denuncia las ensoñaciones políticas del prescriptor de los intelectuales del siglo XX, Rousseau, autor de las Cartas escritas desde la montaña (Lettres écrites de la montagne): esta escueta relación, a la que se pueden añadir algunos estudios predoctorales, sentidas necrológicas y unos cuantos artículos agota la reacción de la inteligencia europea e hispanoamericana ante la muerte de uno de los más brillantes escritores políticos franceses de la segunda mitad del siglo veinte, cuya obra raya sin duda en lo excepcional.

No han cambiado mucho las cosas en este año 2003, aunque merecen todo nuestro reconocimiento diversas iniciativas editoriales en Argentina, Italia y España, ya concretadas o en proyecto. No parece pues que la injusticia que se ha cometido con Freund vaya a enderezarse, ni siquiera a corto plazo. Arbitrariedad que, ciertamente, no es de estos últimos años, sino que viene de muy atrás, cuando recién terminada la guerra su rectitud personal e independencia de espíritu le apartaron de la politiquería de quienes, por entonces, se ufanaban por la restauración de las libertades francesas. Freund, comprometido desde el otoño de 1944 con la guerrilla de los «Francotiradores y partisanos franceses», de rígida observancia marxista-leninista, tomó parte en numerosas acciones de sabotaje, incluido el atentado contra el Ministro de sanidad del gobierno petainista de Pierre Laval. Recompensado, como miles de jóvenes socialistas, con un puesto secundario en el departamento del Mosela y la dirección de un periódico regional El porvenir lorenés (L’avenir lorraine), la descarnada lucha de las izquierdas por el poder y la cruel depuración política del nuevo régimen le asquearon. Esa conmovedora experiencia vital le determinó a estudiar lo político como en realidad es: no según las representaciones abstractas y desinhibidas de los doctrinarios, sino como una de las esencias fundadoras de lo humano, mediadora entre la metafísica y la historia. La esencia de lo político fue el fruto de un trabajo que se prolongó durante quince años (1950-1965), hasta su defensa como tesis doctoral en la Sorbona, ante una sala abarrotada de público.

Se recuerda de aquella ocasión la intervención de Raymond Aron, quien, como director de una tesis de la que no quiso hacerse cargo Jean Hyppolite por sus escrúpulos pacifistas —«yo soy pacifista y socialista; no puedo patrocinar una tesis en la que se declara que sólo existe política donde hay un enemigo»—, señaló el valor de aquella obra y el coraje de su autor. Pero trascendió particularmente la discusión entre Freund e Hyppolite, miembro este último de la comisión juzgadora. Si Freund tenía razón con respecto a la categoría del enemigo, elevada a presupuesto fenomenológico de la politicidad, entendía Hyppolite que sólo le quedaba ya dedicarse a su jardín. Freund le reprochó la ingenuidad irresponsable de su argumentación, pues la pureza de intención ni conjura las amenazas ni suprime al enemigo. Más bien es éste quien nos elige u hostiliza. Si así lo decide debemos afrontar políticamente su enemistad, pues puede impedir que nos ocupemos de nuestros asuntos particulares, incluso de1 cultivo del jardín. La salida de Hyppolite, sorprendentemente, apelaba al suicidio: aniquilarse antes que reconocer la realidad.

El pensamiento de Freund, profundo pero al mismo tiempo claro en la exposición formal, no se agota en la concienzuda y sistemática exploración de lo político —la insociable sociabilidad humana como antecedente metafísico (natura naturata); mando y obediencia, público y privado, amigo y enemigo como presupuestos formales (in re) de lo político; el bien común y la fuerza como finalidad y medio específicos de lo político 2—, sino que se proyecta sobre todas las esencias u órdenes imperativos primarios —lo político, lo económico, lo religioso, lo ético, lo científico y lo estético— y sobre algunas de las dialécticas antitéticas u órdenes imperativos secundarios —lo jurídico, lo social, lo pedagógico, lo cultural, lo técnico—. Freund, que en último análisis se consideraba un metafísico —«ha sido mi ambición ser un teórico» solía decir—, fue un pensador del orden y las formas, pues en estas y en aquel se deja traslucir la multiplicidad del ser. La ambición de su sistema de pensamiento sorprende en una época como la actual, cuyo afán de novedades académicas, incompatible con la vocación, imposibilita o al menos dificulta la necesaria articulación de las ideas. Muy pocos comprendieron en su día la subordinación filosófica del problema que representa cada esencia singular (y sus tratos respectivos) en la distensión temporal (historia) a lo verdaderamente decisivo según el polemólogo francés: la «significación » o, dicho de otra manera, la «jerarquía» de las esencias. Esta temática constituye el cierre metafísico de su fenomenología de las actividades humanas —incoativamente sistematizada en sus conferencias de Lovaina la Nueva de 1981 3—. De todo ello hubiese querido dar razón en un libro apenas imaginado: La jerarquía.

La obra freundeana tiene tres vías de acceso, íntimamente relacionadas por su común raíz metafísica y determinadas cada una de ellas por su ubicación en diversos planos de una teoría científica englobante: metafísica, filosofía política y polemología, en este preciso orden. En cuanto al pensamiento metafísico de Freund, más desatendido si cabe que el resto de su obra, aparece en forma en el libro Filosofía filosófica 4. El último ontólogo de la política caracterizaba en esas páginas a la genuina filosofía por la «libertad de presupuestos», afirmando, después de examinar cómo la trayectoria de la filosofía moderna se agota en la «razón racionalista», que la filosofía filosófica, como saber gratuito e irrefutable, es un «pensamiento segundo que se da por objeto el examen especulativo de las diversas actividades primeras». Al margen de esta consideración necesaria, su pensamiento transita, muy a la manera de Weber, de la epistemología implícita en su teoría de las esencias a la sociología del conflicto o polemología 5, intermediando su densa filosofía de lo político.

Un reaccionario de izquierdas en el mundo hispánico

Freund, cuyo temperamento se opuso polarmente a la actitud complaciente con la degradación de la política, no gozó, como puede suponerse, del favor de los que a si mismos se llamaron «humanistas», «intelectuales» o «progresistas». Esta terminología, sagazmente explotada por el internacionalsocialismo, le parecía vacía, pero sobre todo inapropiada, pues presumía maniqueamente que los adversarios eran, sin más, «reaccionarios». Desde el punto de vista de la esencia de lo político, estas categorías y otras similares —sobre todo «derecha» e «izquierda»—, propias de la que el autor llamó política ideologizada6, apenas si servían para incoar una sociología del conocimiento. ¿Era Freund un hombre de derechas o de izquierdas, conservador o progresista? «Este asunto, escribió en su bella autobiografía intelectual, siempre me pareció ridículo, pues desde el fin de la Guerra había asistido a la polémica entre comunistas y socialistas, quienes se excluían recíprocamente llamándose derechistas»7. Así pues, en escritor político puro, nunca se dejó seducir por esas dicotomías, a la postre fórmulas complementarias de hemiplejía moral e instrumentos del peor maquiavelismo —el antimaquiavelista—. Por eso, a quienes pretendían zaherirle adjudicándole no pocas veces el sello de la Nueva Derecha 8, les respondía irreverente que él era, ante todo, un «reaccionario de izquierdas». En esta paradójica terminología se denuncia en realidad el particularismo de la gavilla de categorías políticas con las que ha operado la mentalidad político-ideológica europea continental (rectius socialdemócrata). En contra de lo que se pretende, nada dice de un gobierno, ni a favor ni en contra, el que se defina como liberal o socialista, monárquico o republicano, igualitario, democrático, solidario, pacifista, etcétera, pues la piedra de toque de cualquier acción de gobierno es el bien común, no la realización de una doctrina. La política es definida al final de La esencia de lo político como la «actividad social que se propone asegurar por la fuerza, generalmente fundada en el derecho, la seguridad exterior y la concordia interior de una unidad política particular, garantizando el orden en medio de las luchas propias de la diversidad y la divergencia de opiniones e intereses» 9. Nada que ver pues con la salvación del hombre o su manumisión histórica.

No era fácil mantener este tipo de actitudes intelectuales durante los años del s i n i s t r i s m o, mentalidad indulgente con los crímenes cometidos en nombre de las buenas intenciones, según Aron, en la que se sigue viendo todavía un pozo emotivo de nobleza. El mundo hispánico, como se sabe, no fue ajeno a los avatares de la política ideológica y a los estragos que han causado sus tres grandes mitos, el de la Revolución, el del Proletariado y el de la Izquierda. Ello dificultó, hasta hacerla casi imposible, la divulgación y recepción del pensamiento freundeano. Aún así, hubo episodios singulares que no pueden ocultarse. Aunque Freund no se ocupó nunca de la política hispánica —salvo alguna mención a la jefatura militar de Franco y a sus tropas «blancas», adelantando, por cierto, la reciente polémica sobre el revisionismo histórico de la Guerra de España1 0, a la dictadura chilena del General Pinochet 11 o a la Guerra de las Malvinas y del Atlántico Sur1 2— , ni se encuentran en su obra más referencias al pensamiento hispánico que Unamuno y Ortega y Gasset 13, no se dejó llevar por los tópicos izquierdistas que, particularmente durante los años setenta, llegaron a constituir el repertorio de un verdadero Kulturkampf contra España.

Tiene aquí algún interés recordar la presencia editorial y personal de Freund en el mundo hispánico, circunscrita a España, Argentina y Chile, países gobernados entonces por dictaduras de estabilización14. En cuanto a la primera, desde finales de los años sesenta y durante una década se registró el primer intento de divulgar su pensamiento en los ambientes jurídico políticos y de la sociología académica, bien a través de las versiones o traducciones de libros como Sociología de Max Weber15, La esencia de lo político 16 o Las teorías de las ciencias humanas 17, bien a la publicación de algún artículo de temática jusinternacionalista, «La paz inencontrable» 18, su breve prefacio a la obra de Francis Rosenstiel El principio de supranacionalidad19 y dos textos aparecidos en la revista de Vintila Horia Futuro presente 2 0. Se produjeron entretanto sendos viajes del profesor estrasburgués a Barcelona (mayo de 1973) y Madrid (septiembre de 1973). En Barcelona impartió una conferencia sobre «Naturaleza e historia » en el Instituto de Estudios Superiores de la Empresa (IESE), dependiente de la Universidad de Navarra, concediendo también una entrevista para la edición barcelonesa del diario Te l e - E x p r e ss 2 1. AMadrid, en cambio, le llevó una invitación al Congreso de la Asociación Mundial de Filosofía del Derecho, celebrado en la Facultad de Derecho complutense2 2. La década de los 90 ha comprendido la segunda etapa de la difusión del pensamiento de Freund, que propició la traducción de Sociologie du conflit2 3, alcanzando hasta la publicación del primer estudio sistemático sobre su pensamiento político 2 4. De Freund se ocuparon entonces las tres revistas más importantes del pensamiento liberal y conservador español finisecular: Hespérides, Razón Española y Ve i n t i u no 2 5.

Se diría que Argentina y Chile hubiesen tomado el relevo, durante la década de los 80 26, de la difusión en el orbe hispánico del realismo político freundeano. En las prensas australes se imprimieron, sucesivamente, El fin del Renacimiento 27 La crisis del Estado y otros estudios 28 y Sociología del conflicto 29. En el invierno de 1982 Freund, que ya vivía retirado de la Universidad en su San Casciano de los Vosgos, viaja Santiago y Buenos Aires, ciudades en las que leyó varias conferencias. El Instituto de Ciencia Política de la Universidad de Chile y la Fundación del Pacífico le habían invitado a participar en un seminario sobre «Cuestiones fundamentales de la política contemporánea», celebrado en la institución universitaria durante la semana del 21 al 28 de junio. Tres fueron sus disertaciones: «La crisis del Estado», «La crisis de valores en Occidente» y «Capitalismo y socialismo», recogidas ese mismo año en un libro 30. El día 4 de julio apareció publicada en El Mercurio la extensa entrevista que le hizo Jaime Antúnez Aldunate 31, aunque para entonces ya se había trasladado a Buenos Aires, ciudad en la que al menos impartió dos conferencias: una sobre «La esencia de lo político» en la Universidad del Salvador y otra sobre el estudio científico de lo político y su metodología en la Facultad de Derecho de la Universidad de Buenos Aires 32. También en la prensa porteña quedó constancia de su visita, pues La Nación dio el breve ensayo referido más arriba: «El conflicto de las Malvinas a la luz de la polemología». El autor se refería en él al papel de tercero mediador desempeñado por los Estados Unidos, así como a la alianza de éstos con Gran Bretaña, lo que determinó el curso de la Guerra de las Malvinas y del Atlántico sur. Consecuencia directa de aquel viaje hispanoamericano fue la relación de Freund con los hermanos Massot, editores de uno de los diarios decanos de la prensa argentina, La nueva provincia, en cuyo suplemento cultural Ideas Imágenes aparecieron «Una interpretación de George S o r e l» 3 3, «Carl Schmitt. Una existencia hecha de contrastes» 34 y «Presupuestos antropológicos para una teoría de la política en Thomas Hobbes»3 5.

Después de algunos años de cierta indiferencia, mas sólo aparente, pues Freund seguía siendo leído por numerosos intelectuales vinculados generalmente a las Universidades católicas o a los círculos militares argentinos y chilenos 36, los últimos años 90 han conocido una progresiva actualización del interés por la obra política y jurídica del escritor francés. No poco de esta Freund-Renaissance en Argentina se ha debido,men primera instancia, a la labor divulgadora del jurista político bahiense Néstor Luis Montezanti, de la Universidad Nacional del Sur, traductor de ¿Qué es la política? 37, El derecho actual 38 y Política y moral 39. A estas ediciones le han seguido, en fechas recientes, el opúsculo Vista de conjunto sobre la obra de Carl Schmitt 40 y ¿Qué es la política? 41, ambos textos al cuidado de Juan Carlos Corbetta, de la Universidad Nacional de La Plata 42. Tal vez en los próximos años, particularmente en Argentina, asistamos a la recepción académica integral del modo de pensar político de Freund, por encima de toda leyenda ideológica.

El "maquiavelianismo" político

Si hubiésemos de condensar en términos simples la obra y el pensamiento de Freund optaríamos, sin dudarlo, por la fórmula del «maquiavelianismo» o «realismo político». A pesar de los equívocos que suscita y de la mala prensa de todo escritor realista o relacionado con el Secretario florentino 43. Renunciaremos ahora a exponer con detalle qué debe entenderse genéricamente por realismo, pues ello excede del objeto de esta semblanza intelectual, orientada a poner en claro algunos supuestos del pensamiento del profesor de sociología de Estrasburgo 44. Apartaremos la disputa clásica sobre el realismo político como una con- secuencia del «método» —«el primado de la observación sobre la ética» 45—, tesis divulgada por Aron pero que acaso sólo tenga alguna utilidad dentro del horizonte de preocupaciones metodológicas propias de los profesores de ciencia política 46. El realismo político se asimila en realidad al «punto de vista político», perífrasis que, a pesar de su carácter puramente descriptivo, casi puede considerarse como una de esas banalidades superiores, pues ¿quién dudará cabalmente de que lo político tiene un medio propio de acceso que no resulta intercambiable con el propio de la moral —moralismo político—, la economía —economicismo— o la religión —teocratismo—? A esta actitud espiritual le dan gracia y carácter (a) la centralidad o primado histórico de lo político; (b) la convicción de que los medios políticos no siempre se presentan bajo la especie de lo agible, pues en ocasiones no hay elección posible; (c) el agnosticismo en cuanto a la forma de gobierno, pues no existe una organización óptima de la convivencia política; (d) la distinción entre lo político (das Politisch) y el Estado (der Staat) y entre lo político (le politique) y la política (la politique) o, por último, (e) la determinación del pensamiento jurídico-político por la configuración de la forma política.

La querella sobre el realismo es consecuencia, según Freund, de las dificultades inherentes al paso de la teoría a la acción. En rigor, sólo tiene sentido predicar el realismo de una cierta forma de proceder el político, inspirada en la evaluación de la relación de fuerzas, más allá de todo ardid político, propaganda o ideología, pues todo cálculo del poder debe orientarse al beneficio de la comunidad. «No sólo se trata, puntualiza el autor, de sopesar correctamente las fuerzas de los adversarios, sino de no engañarse sobre las propias. La relación de fuerzas indica un límite que una colectividad política no debe sobrepasar, so riesgo de poner su existencia en peligro» 47. Aún así, Freund se mostró reticente a utilizar la expresión «realismo político» en el desarrollo de su fenomenología. Sucede a veces, en efecto, que el realismo puede llegar a convertirse en una versión del maquiavelismo, es decir, en una ideología del poder. Pero, ¿qué sucede entonces con la dignidad teórica del «realismo»? ¿Es el realismo político el método que, en opinión de uno de sus estudiosos contemporáneos, «hace suya, poniéndola al día críticamente, una cierta tradición del pensamiento político europeo, cuya primaria ambición ha sido la comprensión de la política y sus manifestaciones históricas en términos científicos, es decir, avalorativos y puramente descriptivos» 48? Freund, en realidad, prefirió no entrar en los pormenores de una polémica que, en gran medida, consideraba estéril. Pues, «no se trata de ser realista o idealista —palabras recubiertas, por lo demás, de una pátina ética asaz turbia— sino de captar la política en su realidad de esencia humana» 49. Ésta es la actitud del maquiaveliano, no la del realista. Fue, pues, el propio autor quien rechazó definirse intelectualmente como realista político.

Estas observaciones clarifican la actitud de Freund ante las vías de acceso a lo político, si bien todavía de una manera imprecisa. Hasta cierto punto, su posición es atípica en el panorama actual de las ideas. Por lo pronto, se trata de un filósofo reacio a aceptar como verdades intangibles los prejuicios de la política ideológica. Su repertorio no se agotó en las nociones más ideologizadas, pues también analizó críticamente algunas categorías o postulados aparentemente sanos: pensar la política políticamente también incluye la reflexión sobre la tradición heredada. Mas detrás de esta temática, dispersa en apariencia, se encuentra una gran divisoria intelectual de la comprensión de lo político. De un lado, el estilo «idealista, utópico e ideológico», del otro, el «realista, científico, polemológico» 50. El realismo científico y polemológico se corresponde con el punto de vista maquiaveliano.

La primera dificultad que hay que sortear es la confusión terminológica, puesto que el autor distingue netamente entre maquiavelismo y maquiavelianismo. «Ser maquiaveliano» consiste, prima facie, en adoptar un estilo teórico sin concesiones al moralismo. No se trata, sin embargo, de que el sabio devenga inmoral, ni siquiera amoral. El pensador maquiaveliano se limita a reclamar la dignidad de la política, su derecho a ser pensada políticamente. Por eso rechaza las interpretaciones del maquiavelista, cuya óptica es la del moralista. El maquiavelismo, solía decir Freund, es el cinismo de los amantes de la justicia abstracta. En cualquier caso, maquiavelismo y antimaquiavelismo le parecían dos especies del mismo moralismo político. Al elegir ser maquiaveliano, Freund optó por estudiar la actividad política como tal. Su visión no es limitada o reduccionista como la del pensador maquiavelista: trátase de «examinar lo político en sus relaciones con la naturaleza humana y la sociedad para mostrar que no se justifica en sí mismo, sino que sirve para justificar casi todos los actos decisivos del hombre en la sociedad» 51.

El maquiavelianismo es concebido epistemológica y metodológicamente según la fórmula que Freund denomina demostrativa. A pesar de las dificultades cognoscitivas que se presentan en el campo pragmático de la política, o de la constatación de la dimensión polémica de la política, que impregna la adscripción del científico a una u otra escuela, el método demostrativo «se libera de la fascinación de lo político mostrando su presencia ineluctable y su potencia constituyente de las relaciones sociales» 52. El contraejemplo del método demostrativo es el método justificativo. Si el primero aspira a ver más allá de la contingencia de los regímenes, buscando los mecanismos o los elementos comunes a todos ellos, el segundo, «centrado en los fines, renuncia a los presupuestos del análisis y de la investigación positivos». Sus aspiraciones se orientan hacia el estudio de los regímenes, los partidos y las instituciones a la luz de una supuesta ética. Pero no le corresponde al maquiaveliano justificar una especie de poder o de régimen, prefiriendo unos a otros. Cuando el filósofo o el politicólogo traspasan este umbral convierten su saber, como decía Aron, en un «sistema para justificar» 53. Abandonado entonces el punto de vista polemológico, su posición deviene abiertamente polemógena.

* Sociedad de Estudios Políticos de la Región de Murcia. Universidad de Murcia (España)

NOTAS

1 Véase J. Freund, L’essence du politique. Epílogo de Pierre-André Taguieff. París, Dalloz, 2003.

2 Véase J. Freund, L’essence du politique. París, Sirey, 1990, passim. Una exposición sistemática del pensamiento político freundeano en J. Molina, Julien Freund, lo político y la política. Madrid, Sequitur, 2000.

3 J. Freund, Philosophie et sociologie. Lovaina La Nueva, Cabay, 1984.

4 J. Freund, Philosophie philosophique. París, La Découverte, 1990

5 La polemología freundeana, como elaborado corpus teórico, es una «sociología del conflicto» en sentido estricto, y no sólo, según la interpretación de Gastón Bouthoul, una «sociología de las guerras». Cfr. J. Feund, Sociologie du conflit. París, P. U. F., 1983. G. Bouthoul, Traité de polémologie. Sociologie des guerres. París, Payot, 1991.

6 J. Freund, Qu’est-ce que la politique idéologique?, en Revue européenne des sciences sociales, vol. XVII, nº 46, 1979.

7 J. Freund, «Ébauche d’une autobiographie intellectuel», en Revue européenne des sciences sociaes, vol. XIX, nº 45-46, 1981, pág. 33.

8 Alain Bhir, «Julien Freund: de la résistence à la collaboration», en Histoire et Anthropologie, nº 7, abril y junio de 1994. Las opiniones de este artículo, parte de una miserable campaña de difamación intelectual, fueron refutadas por Jean-Paul Sorg, «Julien Freund, ou de la difficulté de penser la politique!», Histoire et Anthropologie, nº 8, julio y agosto de 1994.

9 J. Freund, L’essence du politique, p. 751.

10 Franco, que como gobernante «estatificó» la forma política española tradicional y «nacionalizó» la dinastía borbónica, se puso en 1936 al frente de un «contra-terror que combate un régimen de terror», el «terror blanco» de la polemología de Julien Freund. El terror blanco se genera espontáneamente en situaciones atravesadas por graves y violentos conflictos, bien en pleno periodo revolucionario, bien una vez que un gobierno despótico ha sido derrocado. Clásicamente se citan como ejemplos la resistencia de los campesinos vendeanos frente a la Revolución francesa y la de los Ejércitos blancos frente al Ejército rojo de Trotsky. Esta violencia defensiva casi nunca tiene éxito, aunque según Freund, entre las rarísimas excepciones se halla la victoria del bando nacional en la Guerra de España: «Las concepciones de Franco no fueron las de un fascista, sino las de un adepto del terror blanco». J. Freund, Utopie et violence. París, Marcel Rivière, 1978, pág. 191. Otras precisiones en J. Molina, «Raymond Aron y el Régimen de Franco», en Razón Española, nº 121, septiembre-octubre de 2003, espec. Págs. 206-10.

11 Merece la pena, a este respecto, reproducir la opinión del autor sobre el desplome del imperio soviético, forma ecclesiae del marxismo-leninismo: «En Alemania la repercusión fue grande, pues el asunto le afectaba directamente. En Francia, España e Italia la noticia se recibió con júbilo. Pero en el resto del mundo la onda de choque fue muy débil. En Mozambique, Etiopía o Nicaragua la información estuvo teledirigida, llegando como un rumor lejano. Por último, la ONU no se movió. No dijo ni una palabra, lo que muestra a las claras cuál es la orientación de los representantes de los Estados. Si todo eso hubiese sucedido en Chile, no me cabe duda que la ONU se habría hecho oír». J. Freund, L’aventure du politique. París, Criterion, 1991, pág. 169.

12 J. Freund, «El conflicto de las Malvinas a la luz de la polemología», en La Nación, junio de 1982.

13 En su libro sobre la decadencia se encuentra también la elogiosa referencia a un notable libro hispánico: Horacio Cagni y Vicente Massot, S p e n g l e r, pensador de la decadencia. Buenos Aires, Grupo Editor Hispanoamericano, 1993 (19781ª) Véase J. Freund, La décadence. París, Sirey, 1984, pág. 214, nota 63.

14 Ello le valió, lo mismo que a otros intelectuales liberales o conservadores, el desdén sordo del sinistrismo, pues como decía Jean-Paul Sorg en su defensa del maestro, «los prejuicios son tenaces y las reputaciones indelebles». Véase J.-P. Sorg, «Julien Freund, ou de la difficulté de penser la politique», en loc. cit., pág. 129. Mas, en último análisis, recordando lo que el mismo Freund decía de Schmitt, ilustre visitante de la España franquista, el polemólogo lorenés no fue el único intelectual que profesó conferencias en países gobernados por dictadores. El caso de Schmitt sigue siendo paradigmático, pues difícilmente se puede exagerar su identificación con España, nación por la que sentía gran admiración. En la correspondencia del viejo de Plettenberg con su amigo, discípulo y traductor español Javier Conde se encuentra este fantástico párrafo: «Mi siempre querido amigo… todo concurre en las circunstancias actuales para sacarnos a la palestra tanto a mis amigos y a mi como, visto del otro lado, a mis asediadores. Comprenderá que en un momento como este le tenga a usted tan presente. No olvide nunca que los enemigos de España han sido siempre también mis propios enemigos. Es esta una coincidencia que afecta a mi posición particular en la esfera del espíritu objetivo». Carta de C. Schmitt a J. Conde de 15 de abril de 1950. Nordrhein-Westfälisches Hauptstaatsarchiv de Düsseldorf: RW 265-12874.

15 Barcelona, Península, 1967.

16 Madrid, Editora Nacional, 1968.

17 Barcelona, Península, 1975.

18 En Revista de política internacional, nº 69, 1963.

19 Madrid, Instituto de Estudios Políticos, 1967.

20 «Futurología y escatología», en Futuro presente, nº 39, 1977; «Vilfredo Pareto y el poder», en Futuro presente, nº 41, 1978. Se cierra esta primera etapa con «Trabajo y religión según Max Weber», en Concilium. Revista internacional de teología, nº 151, 1980.

21 «La ONU no está sensibilizada sobre la alternativa progreso-contaminación », en Tele-Express, 24 de mayo de 1973.

22 La ponencia de Freund, patrocinada por Michel Villey, exponía una teoría polemológica del derecho, cuyo contenido recogería «Le droit comme motiv et solution de conflits», en Archiv für Rechts- und Sozialphilosophie, nº 8, 1973.

23 Sociología del conflicto. Madrid, Ediciones Ejército, 1995.

24 Véase J. Molina, Julien Freund, lo político y la política.

25 En H e s p é r i d e s, dirigida por José Javier Esparza, apareció un artículo de Freund: «Algunas ideas sobre lo político» (nº 4-5, 1994). Véanse también en esta serie los artículos de J. Molina «La esencia de lo económico. Acerca de las relaciones entre la economía, la política y la política social en Julien Freund» (nº 18, 1998) y «La teoría de las formas de gobierno en Julien Freund: el problema de la democracia moral» (nº 20, 2000). En Razón Española, empresa intelectual animada por Gonzalo Fernández de la Mora, se dio a conocer «El liberalismo europeo» (nº 115, 2002). La revista Ve i n t i u n o, dirigida por Francisco Sanabria Martín, publicó «Socialismo, liberalismo, conservadurismo. Un ejemplo de confusión entre la economía y la política» (nº 33, 1997), además de sendas reseñas sobre tres libros de Freund. La Fundación Cánovas del Castillo, editora de Ve i n t i u n o, incluyó en su colección «Cuadernos Veintiuno de formación. Serie azul» el opúsculo de J. Molina sobre «La filosofía de la economía de Julien Freund ante la economía moderna». Madrid, F. C. C., 1997. Véase también J. Freund, «La cuestión social», en Cuadernos de Trabajo social, nº 11, 2000. El doctorando Juan Carlos Valderrama defenderá próximamente su tesis doctoral, que versa sobre la «Esencia y significación polemológica de lo jurídico». Del mismo puede verse una magnífica investigación predoctoral inédita: Julien Freund, estudio bio-bibliográfico (2002). La revista Empresas políticas dedicará su número 5 (2º semestre de 2004) al pensamiento del polemólogo francés.

26 No obstante: J. Freund, «Observaciones sobre dos categorías de la dinámica polemógena. De la crisis al conflicto», en Randolph Starn (ed.), El concepto de crisis. Buenos Aires, Megalópolis, 1979. Y del mismo, «La fe y la política», en Criterio, vol. 52, nº 1825-26, 1979. El último texto de este periodo es «La sociología alemana en la época de Max Weber», en Tom Bottomore y Robert Nisbet (eds.), Historia del análisis sociológico. Buenos Aires, Amorrortu, 1986.

27 Buenos Aires, Belgrano, 1981.

28 Santiago, Universidad de Chile, 1982

29 Buenos Aires, C. E. R. I. E. N., 1987. Se trata de una traducción distinta a la editada en España en 1995 y amparada por el Centro de Estudios de Relaciones Internacionales y Estrategia Nacional.

30 La crisis del Estado y otros escritos. Santiago, Universidad de Chile, 1982. El texto de «La crisis del Estado» apareció también en Revista política, nº 1, 1982.

31 «Freund: del estatismo al igualitarismo». Recogido en J. Antúnez Aldunate, C r ó n i c a de las ideas. Para comprender un fin de siglo. Santiago, Andrés Bello, 1988.

32 Debo esta información al jurista Luis María Bandieri, en esa época profesor de la Universidad del Salvador. Véase J. Freund, «La esencia de lo político», en Signos Universitarios, nº 12, 1984.

33 Nº 139, 3 de abril de 1983.

34 Nº 294, 23 de marzo de 1986.

35 Nº 435, 1º de diciembre de 1988. Reproducido más tarde en N. L. Montezanti (ed.), Estudios sobre política. Bahía Blanca, Universidad Nacional del Sur, 2001, pp. 5-20. Conste aquí mi reconocimiento al profesor Montezanti por sus precisiones, recabadas en las jornadas inolvidables que transcurrieron en Carmen de Patagones, Bahía Blanca y Mar del Plata en octubre de 2003.

36 Véanse, para el caso de la Armada chilena: Capitán de Navío y Oficial de Estado Mayor Fernando Thauby García, «Guerra y globalización», en Revista de marina, nº 2, 1998; Vicealmirante y Jefe del Estado Mayor General de la Armada Hernán Couyoumdjian Bergamali, «Paz, seguridad y estabilidad. Piedras angulares para la prosperidad», en Revista de marina, nº 5, 1998.

37 Bahía Blanca, Universidad Nacional del Sur, 19961ª, 19982ª. La segunda edición incluye «Política y moral», editado simultáneamente como folleto independiente.

38 Bahía Blanca, Universidad Nacional del Sur, 1998.

39 Bahía Blanca, Universidad Nacional del Sur, 1998.

40 Buenos Aires, Struhart y cía, 2002.

41 Buenos Aires, Struhart y cía, 2003. Se trata de la versión de Sofía Noël (1968) corregida.

42 En México se ha interesado por Freund el escritor y periodista José Luis Ontiveros. Véanse sus artículos «Freund y el mito economicista», en Página uno, suplemento semanal del diario Uno más uno, nº 828, 17 de agosto de 1997; «Realismo político», en Página uno, suplemento semanal del diario Uno más uno, nº 843, 30 de noviembre de 1997; «Revalorización de lo político », en Página uno, suplemento semanal del diario Uno más uno, nº 969, 30 de abril de 2000; y «Reivindicación de la política», en Página uno, suplemento semanal del diario Uno más uno, nº 1003, 24 de diciembre de 2000. En otros países hispanoamericanos apenas si se recogen unas cuantas referencias dispersas a algunos libros freundeanos. Así en Colombia: véase Jorge Giraldo Ramírez, «Los otros que no son el enemigo. Situación polémica y terceros en Schmitt, Freund y Bobbio», en Estudios políticos, nº 14, enero-junio de 1999. También de inspiración freundeana es, del mismo, El rastro de Caín. Una aproximación filosófica a los conceptos de guerra, paz y guerra civil. Bogotá, Foro Nacional por Colombia, 2001.

43 La renovada tradición del realismo político contemporáneo cuenta con referencias de nota en diversos países europeos y americanos: Francia, A l e m a n i a , Italia, España y Argentina. En Madrid brilló el elenco de profesores de la Escuela española de Derecho político [1935-1969]: de Javier Conde y Carlos Ollero a Jesús Fueyo y Rodrigo Fernández-Carvajal y, formando constelación con su magisterio, Gonzalo Fernández de la Mora, Álvaro d’Ors y Dalmacio Negro. En Argentina resulta insoslayable el Neomaquiavelismo hispanizado de Ernesto Palacio, del que debe verse su Teoría del Estado. Buenos Aires, Eudeba, 1973. Tampoco hay que descuidar el realismo chileno, encabezado por el jurista político Jaime Guzmán Errázuriz, schmittiano liberal; véase su Derecho político. Apuntes de las clases del profesor Jaime Guzmán Errázuriz. Santiago de Chile, Universidad Católica de Chile, 1996.

44 La inserción de Freund en la tradición del realismo político puede hacerse atendiendo al magisterio ex auditu y ex lectione de sus autores predilectos. Mientras que su m a q u i a v e l i a n i s m o le emparenta con Maquiavelo, su l i b e r alismo político le compromete con la crítica sui generis de Schmitt al demoliberalismo. En cuanto al primado de lo político, temática incoada por Aron, en Freund se presentó, en parte, como categoría mediadora fundamental en su teoría del orden. En una perspectiva distinta, acaso más epistemológica, no pueden ignorarse ni su realismo filosófico, que en Freund fue de inspiración aristotélica, ni su a n t i i n t e l e c t u a l i s m o, no en el sentido sociológico del descrédito de los intelectuales, sino como uno de los supuestos de la filosofía de We b e r, relacionado por una parte con la neutralidad axiológica (We r f r e i h e i t) y por otra con el «desencantamiento del mundo» y sus consecuencias en el orden de las diversas actividades humanas (intelectualización de la vida, i d e o l o g i z a c i ó n, etc.) Tampoco carecen de interés, desde un punto de vista sociológico, la teoría paretiana del poder, supuesto que gravita sobre la concepción freundeana de cada una de las «actividades sociales» y sus consecuencias en términos de potencia, o su teoría del conflicto, cuya configuración fenomenológica es deudora de la sociología f o r m i s t a de Simmel.

45 Véase R. Aron, Machiavel et les tyrannies modernes. París, Éditions de Fallois, 1993, pág. 63.

46 Aron ha sido un autor fundamental para el realismo político contemporáneo, sin embargo, sus diatribas de los años de la Segunda Guerra Mundial contra el maquiavelismo de Maquiavelo y Pareto han sugerido a sus exégetas, a veces, un camino equivocado, poco partidarios de aceptar en un liberal la actitud vigilante del «maquiavelista moderado». Cfr. Rémy Freymond, «Présentation» a R. Aron, op. ult. cit. Decía Aron que «el llamado método del realismo científico o racional, también denominado experiencia sistematizada les condujo [a Maquiavelo y Pareto] al amoralismo». Su visión del problema, no obstante, resulta ser más amplia que la de algunos de sus comentaristas. A nuestro juicio, el realismo como una consecuencia del método abarca una mínima parte del problema de lo que, en rigor, constituye una actitud espiritual que busca el esclarecimiento de las «ultimidades sociales». R. Aron, op. ult. cit., pág. 109. Decía el jurista político español R. Fernández-Carvajal que la ciencia política es «virtus intellectualis circa postrema socialia»; difícilmente se hallará en la literatura europea una definición más bella y precisa del realismo político. Puede verse en su libro El lugar de la ciencia política. Murcia, Universidad de Murcia, 1981, pág. 340.

47 J. Freund, L’essence du politique, pág. 748

48 A. Campi, Schmitt, Freund, Miglio. Figure e temi del realismo politico europeo. Florencia, Akropolis, 1996, pág. 10.

49 L’essence du politique, págs. 22-3.

50 J. Freund, «L'éternelle politique», en Paysans, nº 120, 1976, pág. 53.

51 L’essence du politique, pág. 23

52 J. Freund, L’essence du politique, pág. 9.

53 R. Aron, Dix-huit leçons sur la société industrielle. París, Gallimard, 1970, pág. 23.

lundi, 23 avril 2012

Actualización DISENSO

Actualización DISENSO

 

revue, argentine, théorie politique, sciences politiques, politologie, philosophie, métapolitique, amérique latine, amérique du sud, géopolitique, Sección "Metapolítica": Mesianismo tecnológico. Ilusiones y desencanto. Por Horacio Cagni.   

Sección "Geopolítica"¿Por qué Geopolítica?. Por Alberto Methol Ferré.  

Sección "Geopolítica"La Federación Rusa en la prueba del Multipolarismo. Por Tiberio Graziani.

Sección "Pensamiento Nacional": Sampay como pensador nacional, popular y católico. Por Alberto Buela.  

Sección "Pensamiento Nacional": Historia de una literatura trágica. Por Vintila Horia.  

Sección "Pensamiento Nacional": Breve historia del movimiento obrero argentino. Por Cecilia González Espul.

Sección "Pensamiento Político": Julien freund: Del realismo Político al Maquiavelismo. Por Jerónimo Molina Cano.

Sección "Filosofía": Schopenhauer. Por Leonardo Castellani.  

Sección "Filosofía": Conciencia y Método en Edmund Husserl. Por Alberto Buela.

Sección "Entrevistas": Eurasia: la visión geopolítica de Alexander Dugin. Extractos de la entrevista realizada por VOXNR.

Sección "Biblioteca": Geocultura del Hombre Americano de Rodolfo Kusch - Irán como Pivote geopolítico. Centro Superior de Estudios de la Defensa Nacional. Ministerio de Defensa Español - ABC de Pedro Godoy  

Sección "Biblioteca" especial Nimio de Anquín: Ente y Ser - De las dos inhabitaciones en el Hombre - La Ontología sin Ser de Nicolai Hartmann - El problema de la desmitologización - Las cuatro instancias filosóficas del Hombre actual - Cuadernos. Leopoldo Lugones

SE RUEGA DIFUSIÓN.

Hasta la próxima!  

www.disenso.org - info@disenso.org - Dirección Postal: Casilla 3198 (1000) Bs.As - Argentina

samedi, 21 avril 2012

Leo Strauss and the Conservative Movement

Leo Strauss and the Conservative Movement

by Paul Gottfried

Ex: http://lewrockwell.com/

   
   

 

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A book of mine, Leo Strauss and Conservative Movement in America: A Critical Appraisal, is about to come out with Cambridge University Press; and it has a special connection to the Mises Institute. Much of the critical thrust comes from attending conferences sponsored by the Mises Institute and from getting to know my fellow- participants and their writings. Although I harbored strong doubts about my latest subjects even before these encounters, my conversations with David Gordon, Murray Rothbard, Robert Higgs and Thomas DiLorenzo and later, discovering Mises’s comments about Strass gave additional substance to my suspicions. My project became a way of calling attention to a significant body of criticism that the liberal-neoconservative press and most scholarly organizations wouldn’t deign to present. I was upset in particular by the inability of David Gordon (and Lew Rockwell) to find a suitable publisher for a long, incisive work that David had produced about Harry Jaffa’s reading of American history. It was one of the most cerebral "value critiques" by a living thinker that I had seen.

Why, asks David, should Jaffa, a cult figure who is wined and dined by GOP benefactors, be immune from the type of assessment that other authors of scholarly works should have to accept? Why do Straussians like Jaffa, Allan Bloom, Thomas Pangle, and Charles Kesler achieve canonical status as "conservative" thinkers without having their ideas rigorously examined in widely accessible forums? It seems that the only appraisals such figures have to deal with are puff pieces in neoconservative publications and the scribbling of inflamed leftists attacking them as rightwing extremists.

 

 

Note that my book does not come out of any political engagement. It is in no way a statement of my political creed. Although hardly friendly to the Wilsonian Weltpolitik of the Straussians, I devote more space to defending my subjects from unjust critics than I do to dissecting their views. Nor was my book produced, as one nasty commentator writing to the executive editor of an Ivy League press explained, because I’m "a very angry person" trying to settle scores. Apparently my madness would "permanently discredit" any press that was foolish enough to publish me. My book at any rate is not an expression of pique, and I bend backward to make sense of arguments that I have trouble accepting at face value. I also treat main subject, Leo Strauss, with respect and empathy, even while disagreeing with his hermeneutic and liberal internationalism. I stress that for all his questionable judgments, Strauss was a person of vast humanistic learning, and more thoughtful and less pompous than some of his famous students. I fully sympathize with the plight that he and others of his background suffered who because of their Jewish ancestry were driven out of their homeland and forced to live in exile. My own family suffered the same fate.

What seemed intolerable, however, was the unwillingness of Straussians and their adulators to engage serious critics, some of whom have been associated with the Mises Institute. These expressions of moral self-importance may go back to Strauss himself. Murray Rothbard observed that at a Volker Fund conference, his teacher Mises had argued vainly with Strauss about the need to separate facts from values in doing research. Strauss had retorted that there are moral judgments inseparably attached to our use of facts. This supposedly indicates that one could not or, perhaps more importantly, should not draw the fact/value distinction that Mises, and before him, in a different form, Max Weber had tried to make. In response to these statements, Mises argued that facts remain such, no matter how people dress them up. "A prostitute would be plying the same trade no matter what designation we choose to confer on such a person." As the debate wore on and Strauss began to moralize, Mises lost his equanimity. He indicated to Rothbard that he was being asked to debate not a true scholar but a "gymnasium instructor."

 

 

In my book I quote David, who has taken over and elaborated on the criticism offered by his teacher and Murray’s teacher Mises, namely, that the Straussians reach for moral platitudes against those who are better- armed with "facts." One reason David is mentioned so often in my monograph, and particularly in the chapter "The Method Deconstructed," is that he did much of the deconstructing for me. While helping with the proofreading, which is another service he performed, David commented about how much he enjoyed my text; then, in typically David-fashion, he listed as his favorite parts of my book those pages on which he’s mentioned. Actually he missed more than half of the references to him, including two of them in the acknowledgements.

Like other thoughtful critics of Straussian methodology, specifically Grant Havers, Barry Shain, and Kenneth McIntyre, David was essential to my work. But in his case listening to him reel off what was wrong with how the Straussians read (or misread) selected texts, inspired my project. Without the fact that David cornered me about ten years ago at a conference in Auburn and explained to me in between Borscht Belt jokes the fallacies of Strauss and his disciple, I doubt that I would have done my book. His conversation and written comments, stored in the bowels of the Lew Rockwell Archives, made my task considerably less burdensome. One remark from David’s conversation in Auburn that I still remember was his hypothetical rejoinder to Harry Jaffa in a debate that never took place. Jaffa insisted on the pages of National Review, and in fact wherever else he wrote, that we should believe in equality because Lincoln did (never mind that Di Lorenzo, among others, has challenged this view of Lincoln with counter-evidence). David asked that "even if we assume that Jaffa was expressing Lincoln’s real opinion, why should we have to hold the same view"? And why are we supposed to impose Lincoln’s opinion on unwilling subjects by force of arms? No one else to my knowledge has asked these indelicate questions.

 

 

Even then David and I were sick of the smarminess with which certain Straussians would respond to logical and factual objections. Calling one’s opponent a "relativist" or scolding him for not embracing universal democratic values is not an answer at all. It is an arrogant evasion of a discussion. David also observed that in their attempt to find "secret writing" in texts, Straussians would almost compulsively read their own values into the past. Presumably all smart people who wrote "political philosophy," no matter when they lived, were religious skeptics, yearning for something like "liberal democracy." This speculation could be neither confirmed nor disconfirmed and contributed zip to scholarly discussion. Like me, David also wondered why none of the great minds whom the Straussians wrote about was ever shown to be a Christian heretic or something other than a forerunner of those who are now revealing their concealed meanings. One might have thought that if concealment was their intention, these fellows on at least some occasions would have been hiding non-modern thoughts from the public or their monarchs. Why do all "secret writings" seem to have originated with a Jewish agnostic residing in an American metropolitan area?

An observation in my book contrasting Straussian enterprises to the Mises Institute also warrants some attention here. The Miseans and the Straussians both claim intellectual descent from Central European Jewish scholars who fled from the Nazis. Moreover, both groups have processed these biographical experiences and incorporated them into their worldviews, but in totally different ways. Whereas the Miseans view their founder as the victim of a particularly noxious form of state socialism, the Straussians emphasize the evils of the "German connection," as explained by Allan Bloom in The Closing of the American Mind. While the Miseans focus on the link between state planning and tyranny, the Straussians finger the uniquely wicked heritage of the Germans in telling us why "liberal democracy" is always under siege. Strauss himself established this perspective, when in Natural Right and History he stressed the continuing danger of German ideas, even though the German military threat had been defeated six years earlier.

 

 

While the disciples of Mises favor an isolationist foreign policy designed to dismantle socialism at home, the Straussians are perpetually reliving Munich 1938, when the "democracies" backed down to a German dictatorship, just as they had failed to confront the supposed iniquities of Kaiser Wilhelm in 1914. One might push the contrast even further: while the Mises Institute celebrates the Vienna in which the Austrian School of Economics took form, including the generally supportive liberal monarchy of Kaiser Franz Josef, the Straussians have continued their efforts to counter a threat that they see originating in Central Europe. During the student revolts of the 1960s, Allan Bloom and his soul-brothers blamed these outbursts on German critics of modern democracy. Strauss’s star students managed to find the German threat wherever they looked. In one of my earliest encounters with Straussian professors, at Michigan State in 1967 and 1968, it was explained to me that German historicists had fueled the antiwar student protest with their antidemocratic notions. This connection seemed to me so surreal that it caused me to reflect on the life’s experiences of those who could believe such things.

Significantly, these Straussian attacks on the tainted German heritage play well in our society of letters. A Jewish liberal-neoconservative presence (perhaps predominance) in the media and in the academy renders some Straussian fixations profitable. Well-placed intellectuals are still agonizing over the "German catastrophe" in a way that they don’t about other bloodbaths, particularly those unleashed by Communist tyrants. There is also a culture of defeat and self-rejection among the Germans which fits perfectly with the Straussian war on German ideas and German illiberalism. Although the Left may attack the Straussians rhetorically as "fascists," it shares many of their sentiments, particularly their revulsion for German culture and for German politics before the First World War.

Another factor has helped the Straussians professionally: Their impassioned Zionism has enhanced their moral acceptability in Jewish and neoconservative circles. If their interpretive gymnastics may sometimes drive their political fans up the wall, Strauss’s disciples win points where it counts. They are recognized as part of the journalistic establishment. Whereas the Miseans (and a fortiori this author) would have trouble getting into the New York Times, Washington Post or neoconservative publications, Straussians (and their allies) appear in all these venues as both authors and respected subjects. Nothing is more baffling than the complaint that the "liberal media" ignore or persecute Straussians. This gripe is almost as baseless as another related one, that Straussians are excluded from elite universities. Would that I had been excluded from academic posts during my career the way the Straussians have been.

 

 

I do not mean to suggest that there is something wrong with how the Mises Institute has dealt with its founder’s experiences in Central Europe. Its approach to this aspect of twentieth-century history has been rational and even commendable. But it has certainly not won the Mises Institute the moral acceptability that the Straussians have achieved by taking the opposite position. Curiously, leftist opponents have laced into the Straussians for not being sufficiently Teutonophobic. Despite the scornful references to German ideas in their polemics, these Straussians are alleged to be perpetuating the hated German connection while pretending to denounce it. In short, one can never hate German thought sufficiently (except of course for Marx and a few other selected German leftists) to please our current cultural industry. But Straussians can at least be credited with having made a start here.

One final point may belong here: The professional and journalistic successes of Strauss’s students have had little to do with their efforts to revive a "classical heritage" or to make us appreciate Plato and Thucydides. The argument I try to make in my book is exactly the opposite: the Straussians have done so well at least partly because they have bet on the right horse in our current liberal internationalist politics. They provide window-dressing and cultic terminology for a widely propagated American creed pushed by government and the media, featuring calls for armed "human rights" campaigns, references to the Holocaust and the Anglosphere, and tributes to liberal or social democratic "values." The Straussians have made names for themselves by putting old and even stale wine into new bottles.

December 7, 2010

Paul Gottfried [send him mail] is Horace Raffensperger Professor of Humanities at Elizabethtown College and author of Multiculturalism and the Politics of Guilt, The Strange Death of Marxism, Conservatism in America: Making Sense of the American Right, and Encounters: My Life with Nixon, Marcuse, and Other Friends and Teachers. His latest book, Leo Strauss and the American Conservative Movement: A Critical Appraisal, was just published by Cambridge University Press.

 

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mercredi, 18 avril 2012

A propos de « L’essence du politique »

A propos de « L’essence du politique »

frend.jpgUn commentaire du Passant1 sur mon précédent billet m’amène à anticiper sur une série de billets que j’avais (vaguement) prévus à partir d’une lecture de Julien Freund. Jusqu’ici, je connaissais seulement de Freund ses textes d’introduction à la sociologie de Max Weber ou de Georg Simmel. La lecture de cette étrange conversation imaginée entre un certain Pierre Bérard2 et Julien Freund m’a donné envie d’en savoir plus sur la sociologie de Freund lui-même. J’ai donc profité de l’été pour lire l’ouvrage majeur de Freund qu’est L’essence du politique (1965), en complétant par une relecture de quelques classiques comme Le savant et le politique de Max Weber, Le Prince de Machiavel, mais aussi Les politiques d’Aristote ou L’histoire de la guerre du Péloponnèse.

J’en tire ici quelques réflexions ou questions sans grand ordre. Il y aura peut-être ensuite quelques billets plus systématiques.

Le Passant, dans son commentaire, réagit à la conclusion de mon précédent billet sur la nécessité affirmée par Freund d’éviter tant la moralisation de la politique que la politisation de la morale. Il affirme au contraire que la politique serait par définition une moralisation du politique. Il s’agirait moins de mettre en œuvre des liens d’appartenance ou de participation que de définir les « bons » liens. J’entends dans cette remarque comme un écho de ce que disait Jean Gagnepain sur l’hégétique, que ses lecteurs entendent très souvent comme une légalisation du légitime, mais qu’il définissait lui-même d’une façon plus complexe et problématique qu’on ne veut bien le dire. La messe, en tous cas, n’est pas dite sur ce sujet !

Il faut d’abord savoir si l’on se place 1° – dans une perspective qui est celle de l’action politique et donc de la justification de telle ou telle décision, de tel ou tel régime, ou de telle ou telle définition de ce que devrait être le politique, de même que le personnel politique, ou 2° – dans la perspective scientifique de la description du phénomène politique, quelles que soient les époques, les institutions ou les régimes. Beaucoup de lectures de ce que Gagnepain dit de l’hégétique me semblent se situer dans la première perspective. Elles regrettent que le personnel politique actuel ne soit pas nécessairement un modèle de vertu et affirment qu’à l’avenir, il devra l’être (mais c’était déjà le propos de Platon dans La République !). On est dans l’éthique de conviction au sens de Max Weber. Dans une perspective normative en tous cas. On n’est pas dans l’analyse de ce qu’est le politique.

Si on se place dans cette deuxième perspective, celle du sociologue, qui se doit d’étudier « froidement » le politique tel qu’il existe (ou la politique telle qu’elle existe — je ne me prononce pas pour l’instant sur la différence entre le et la politique), on peut remarquer que les convictions sur ce qui doit être, sur ce que sont les « bons » liens sociaux, etc. font effectivement partie du politique. Il n’y a pas de politique sans convictions, ni même sans passion, comme l’observait bien Weber. Mais ces convictions ou ces passions sont de toutes sortes. Les uns sont convaincus du caractère néfaste du « capitalisme financier », d’autres dénoncent l’immigration, d’autres encore plaident pour un développement durable ou une écologie politique, etc. Tous sont persuadés que leurs convictions sont les « bonnes » convictions, que les liens ou les associations qu’ils veulent tracer sont les « bons » liens, les « bonnes » associations… Le moins que l’on puisse dire est que la définition de ce qui est « bon » ou « bien » est pour le moins conflictuelle, polémique. Dans la perspective de l’action, comment choisir le bon « bien » ? En retenant le camp le plus vertueux ? Mais comment ? Admettons que l’on arrive à sélectionner le personnel politique (comme on sélectionne sur d’autres critères les pilotes de chasse) pour exclure des fonctions politiques celles ou ceux qui sont carrément malades (névrosés, psychopathes, mais aussi pervers et psychotiques en tout genre, car ce n’est pas plus rassurant). Il ne restera donc que des gens à peu près équilibrés, aussi capables de responsabilité que de vertu. Croit-on vraiment que l’on aura tranché la question du bien ? Non, car il y a sans doute autant de gens capables de responsabilité comme de vertu dans les différents camps et l’on retrouvera les conflits et les polémiques sur ce qui est bon et bien. On peut dire que le choix devra se faire de façon « démocratique ». Mais la démocratie elle même n’est qu’une option parmi d’autres. C’est un argument polémique contre ceux qui sont jugés non démocrates. D’ailleurs, il suffit d’avoir assisté aux blocages d’universités de ces dernières années pour constater qu’il n’y a pas accord d’emblée sur ce qui est démocratique. Chacun utilise l’argument démocratique comme argument dans la polémique et l’on se trouve embarqué dans une lutte de « démocraties » : celle des AG et du vote à main levée contre celle des instances universitaires et des cartes d’étudiant !

Autre chose. L’enfer, dit le proverbe, est pavé de bonnes intentions. C’est ce que redit à sa façon Max Weber en écrivant dans Le savant et le politique :

Il est une chose incontestable, et c’est même un fait fondamental de l’histoire, mais auquel nous ne rendons pas justice aujourd’hui : le résultat final de l’activité politique répond rarement à l’intention primitive de l’acteur. On peut même affirmer qu’en règle générale il n’y répond jamais et que très souvent le rapport entre le résultat final et l’intention originelle est tout simplement paradoxal.

On pense évidemment à l’éthique protestante qui aurait, selon Weber, favorisé l’esprit du capitalisme, bien que cela n’était l’intention ni de Luther ni de Calvin (qui n’avaient, et pour cause, jamais entendu parler de « capitalisme »). Les historiens, sans doute, discutent et discuteront longtemps de cette thèse. Mais on peut sans peine multiplier les exemples. Ainsi de Gaulle croyait léguer à la France, avec la constitution de la Cinquième République, ce qui lui permettrait d’échapper au « régime des partis ». Le résultat semble bien différent. Peut-on d’ailleurs échapper aux « partis » et autres « factions » ? Les guelfes et les gibelins n’étaient-ils pas d’autres « espèces » du genre « parti » ? De même que les frondeurs du milieu de notre XVIIe siècle ?

Le constat sociologique est donc que le politique est le domaine du conflit, de la polémique, éventuellement de la guerre. On peut certes s’accorder, passer convention, faire la paix un temps. Mais le conflit resurgira nécessairement, ici ou ailleurs, sur un sujet ou sur un autre, pour un « bien » ou pour un autre. L’histoire n’est pas seulement l’histoire de la lutte des classes, comme le pensait Marx. Elle est plus généralement l’histoire de la lutte, comme le dit Freund, des classes certes, mais aussi des peuples, des religions, etc. Il n’y a pas de « der des der » ! Il est vrai que certains révolutionnaires ont voulu croire qu’avec une bonne lutte finale (qui, justement parce qu’elle serait finale — la « der des der » — légitimerait pour le coup la pire des violences), on pourrait résoudre le problème une bonne fois pour toutes. C’est le « Français (Russes, etc.) encore un effort… C’est vrai, on s’entretue bien cette fois encore. Mais c’est pour la bonne cause. Après, c’est-à-dire une fois que l’on aura éliminé tous les ci-devant (koulaks, etc.), ce sera fini. Promis. Ce sera l’avenir radieux ».

Mais en réalité, on n’en finit jamais avec le conflit (qui bien sûr, ne va pas toujours jusqu’à la guerre). C’est ce que Freund analyse très bien quand il dit que l’une des trois grandes caractéristiques du politique (l’un des trois « présupposés » dans son vocabulaire), c’est la dialectique ami/ennemi. On trouve cela aussi chez Simmel qui insiste sur le rôle socialisateur du conflit. Le conflit fait lien dans la mesure où l’on s’allie contre un tiers. Gagnepain ne dit pas autre chose quand il rappelle dans Les leçons d’introduction que :

Les Romains par exemple définissaient le civis comme le contraire de l’hostis. C’est parce que l’on avait le même ennemi que l’on devenait concitoyens. On ne se ligue jamais que contre.

On trouve cela en d’autres mots passim dans les chapitres sociologiques du Vouloir Dire. Gagnepain s’inscrit ainsi bien plus dans la tradition de Simmel et de Freund, que du fonctionnalisme de Durkheim. De Weber aussi, qui insistait dans Le savant et le politique sur ce qu’il appelait « le polythéisme des valeurs ».

J’ajouterais que c’est vrai aussi bien de la politique étrangère (voir déjà l’alliance des cités autour d’Athènes contre celle autour de Sparte dans la guerre du Péloponnèse), que de la politique intérieure (où la « gauche » n’existe que dans son opposition à la « droite »), le même processus se reproduisant d’ailleurs à l’intérieur de chaque camp un peu comme une même structure se reproduit dans les fractales aux différentes échelles.

Le filon est riche. Je ne pourrai pas tout dire dans un seul billet. Quelques points pour la suite (dans le désordre, en mêlant peut-être perspectives d’action et perspectives de description, mais en insistant plus, je l’espère, sur les secondes) :

  • Weber dit que trois qualités font l’homme politique (on parlerait évidemment aussi bien de la femme politique aujourd’hui) : la passion, le sentiment de responsabilité et le coup d’œil. La première peut se rattacher à ce qu’il appelle l’éthique de conviction (il faut des convictions) ; le second à l’éthique de responsabilité (il faut se préoccuper des conséquences, y compris paradoxales, de ses décisions, bien qu’il soit évidemment impossible de tout prévoir) ; quant au coup d’œil, Weber l’associe à un certain détachement nécessaire, à un « calme intérieur de l’âme ». Je relie ça à ce que dit Gagnepain quand il parle de l’hégétique (DVD II, p. 108) : « L’autorité comme telle ne se fractionne pas et son intime complexité tient plutôt au fait qu’il faut pour l’exercer joindre tactique et probité ». Phrase sibylline comme souvent, mais que Weber me semble éclairer. On est en tous cas dans la même tradition intellectuelle.
  • A propos de la dialectique ami/ennemi. Le mot français ennemi est bien sûr polysémique. Freund rappelle que les Grecs distinguaient, eux, ἐχθρός et πολέμιος, comme les Romains distinguaient inimicus et hostis. Certes, les deux termes étaient eux-mêmes polysémiques en grec comme en latin. Inimicus dans certains textes devient ainsi synonyme d’hostis. Mais les premiers termes de ces paires renvoient nettement, selon les dictionnaires, à la détestation et à la haine, parfois dite « personnelle », alors que les second désignent l’ennemi politique, l’ennemi de guerre, sans cette connotation de détestation. Il y a une surdétermination axiologique ce me semble dans les premiers, pas dans les deuxièmes. Il y aurait sans doute beaucoup à dire et à observer là-dessus, y compris d’un point de vue clinique.
  • Parmi les convictions qui peuvent ou on pu inspirer le politique figurent les enseignements de l’Évangile (voir par exemple le colloque de novembre dernier au collège des Bernardins sur « Charles de Gaulle, chrétien, homme d’État »). Weber insiste sur la contradiction entre la morale des Évangiles (Aimez vos ennemis, Matthieu, 5, 44) et l’éthique de responsabilité, qui amène le politique dans certains cas à entrer en guerre. Mais l’Évangile, d’une part, ne dit pas : « Vous n’avez pas ni n’aurez pas d’ennemis ». Il reconnaît d’une certaine façon que l’on ne choisit pas ses ennemis (un des enseignements clefs de Freund, qui l’avait même conduit à devoir changer de directeur de thèse, Jean Hyppolite ne pouvant supporter cette idée — il était quand même dans le jury.). Mais il demande de les aimer. D’autre part, il n’est pas question de πολέμιος, mais d’ἐχθρός. Matthieu dit : ἀγαπᾶτε τοὺς ἐχθροὺς ὑμῶν (Diligite inimicos vestros). Il s’agit donc de charité (caritas, agapê) et surtout d’absence de haine envers l’echthros (l’inimicus). Il n’est pas question ici du polemios, de l’hostis. A supposer que cette différence terminologique soit pertinente dans le grec des Évangiles, il y a là aussi matière à réflexion (il est d’ailleurs fort probable que les docteurs de l’Église, tant dans la tradition orientale que dans la tradition latine y ont réfléchi : à vérifier). J’y vois en tous cas un point de départ pour une sociologie du ressentiment en lien avec ce que Nietzsche a pu dire sur le sujet dans La généalogie de la morale.
  • Il faudrait encore retravailler les deux autres « présupposés » du politique selon Freund : la dialectique du commandement et de l’obéissance (on est là dans la question de la division des rôles et des fonctions), ainsi que celle du public et du privé (pas de politique sans une séparation du public et du privé, même si la frontière n’est pas absolue, peut se déplacer : Freund insiste sur le fait qu’un pouvoir qui supprime totalement le privé en s’introduisant partout devient totalitaire, pour lui le totalitarisme est même « un gigantesque effort pour effacer la distinction entre l’individuel [le privé] et le public, par élimination de cette réalité intermédiaire […] qu’est la société civile » — encore une piste extrêmement intéressante, y compris cliniquement).
  • Il y a enfin la question de la force (ou de la violence) et de son usage, l’une des caractéristiques du politique pour les sociologues, au moins depuis la célèbre définition de Weber de l’État comme « communauté humaine qui revendique avec succès pour son propre compte le monopole de la violence physique légitime ». Cette définition a fait l’objet de moult commentaires, sans à mon sens mettre un terme à l’ambiguïté des notions de force et de violence (on trouve les deux termes dans les traductions de Weber qui parle lui de Gewaltsamkeit).
  • Et puis encore une dernière chose à propos de la « moralisation du politique ». Weber remarque que « l’éthique peut parfois jouer un rôle extrêmement fâcheux ». C’est le cas de certaines justifications morales (moralisantes) et casuistiques, mais aussi des marchandages de culpabilité (la sienne comme celle des autres), au détriment de ce qu’il appelle « l’éthique de responsabilité ». Encore une piste de réflexion et d’observations…

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  1. J’en profite pour signaler son nouveau blog que je découvre du même coup et qui vaut le détour. []
  2. Non, ce n’est pas le patron du refuge bien connu de tous ceux qui ont fait le tour des Aiguilles Rouges et l’ascension du Buet ! []

À propos de « L’essence du politique » (2)

Julien Freund fait bien entendu référence à Max Weber et à sa célèbre définition de l’État moderne comme « groupement de domination de caractère institutionnel qui a cherché (avec succès) à monopoliser, dans les limites d’un territoire, la violence physique légitime comme moyen de domination et qui, dans ce but, a réuni dans les mains des dirigeants les moyens matériels de gestion » (Weber, 1959, p. 108). Il propose de distinguer les concepts de puissance, de force, de violence. Mais le lecteur reste insatisfait. Gagne-t-on, par exemple, à englober comme Freund, dans la définition de la force, les différents effets de sens possibles du mot, y compris donc la « force » d’une démonstration mathématique ?

Il vaut le coup, donc, de revenir sur ces différents concepts, moins pour réfuter l’argumentation de Freund, que pour la préciser. Nous proposons de réserver le concept de force à la force physique, démultipliée éventuellement ou secondée par différents artifices techniques. Pour être plus encore précis, il serait d’ailleurs possible de retenir la distinction que faisait Aristote entre la force comme puissance (δύναμις) et la force en action (ἐνέργεια)1 , en parlant de puissance dans le premier cas et de force dans le second. La puissance apparaît ainsi comme une force potentielle, qui n’a pas toujours besoin de s’exercer pour produire un effet (la puissance seule peut- être dissuasive sans avoir besoin de s’appliquer comme force, ainsi dans le cas de la dissuasion nucléaire). Il faut remarquer par ailleurs que la puissance et la force ainsi entendues ne sont pas spécifiques à l’homme. C’est d’ailleurs l’un des avantages de notre définition de permettre une extension de ces notions de puissance et de force au monde animal. Chaque espèce animale se caractérise en effet par une certaine puissance ou force physique, celle de l’ours adulte étant supérieure par exemple à celle de l’homme adulte. Mais la puissance dont dispose tel ou tel individu d’une espèce ne se limite pas à sa force musculaire. Une faible force musculaire peut-être compensée par la vitesse, par l’agilité, par l’usage d’un poison (venin)…

Dans le cas de l’espèce humaine, c’est l’outillage technique qui vient compenser une faiblesse relative et démultiplier la puissance : depuis le javelot, l’arc, les flèches, les sagaies, etc., jusqu’aux missiles porteurs de charges thermonucléaires, en passant par les différentes armes à feu, la fabrication de poisons, les pièges, etc. Nous arrivons ainsi à une définition de la puissance et de la force qui relève d’un domaine physico-technique, soit du domaine ergologique au sens de la théorie de la médiation. D’un point de vue clinique, puissance et force seront affaiblies par toutes les atteintes qui réduisent aussi bien la mobilité (lésions des membres, paralysies, etc.) que la capacité technique (atechnies) ou les organes de défense ou d’attaque dans le cas des autres espèces animales (glandes à venin, etc.). Une telle définition reste en accord avec les distinctions que faisait Julien Freund. C’est lui en effet qui liait déjà le concept de puissance au grec δύναμις en proposant de réfléchir à la distinction aristotélicienne entre puissance et acte :

« Il semble que la puissance appartienne à l’ordre de la virtualité plutôt qu’à celle de l’actualité. Être puissant, c’est avoir le pouvoir de, être capable de faire une chose » (Freund, 2004, p. 135).

Mais Freund ne distinguait pas suffisamment à notre sens les différents sens du pouvoir et de la capacité de faire quelque chose, y incluant aussi bien la capacité physique et technique que la capacité légale ou encore la capacité morale, celle qui résulte de l’audace (comme lorsqu’on dit de quelqu’un qu’il n’est pas capable au sens où il n’osera pas). Cette dimension morale a bien sûr son importance (elle joue un rôle dans la dissuasion par exemple : vont-ils oser ?), mais il importe de la distinguer pour l’analyse.

Voilà pour la force et la puissance. Que faire maintenant de la violence ? Cette notion de violence semble ajouter une caractéristique supplémentaire qui est celle d’une non-maîtrise, d’une démesure ou encore d’une malmesure de la force. Il y a de l’ὕβρις dans la violence, alors qu’il n’y en a pas nécessairement dans la puissance et la force en tant qu’elles relèvent seulement d’une capacité physique (anatomo-physiologique) ou technique. Ce caractère excessif de la violence est bien présent dans la définition qu’en donne Julien Freund, qui la distingue comme nous de la force et de la puissance. La violence, dit-il,

« est puissance corrompue ou déchaînée ou parfois poussée volontairement à l’outrance. Non que la force serait innocente, puisqu’il n’y a pas de puissance sans forces2 , mais elle se laisse réglementer et discipliner par des formes, c’est-à-dire elle s’exerce en général dans le respect des règles et des conventions de la légalité. La violence par contre, instinctive et passionnelle par nature, épouvante, massacre, égorge, supplicie et bouleverse tout dans la confusion. Une armée disciplinée est l’image typique de la force, une masse soulevée et tumultueuse est celle de la violence » (Freund, 2004, p. 514).

Comment expliquer ce déchaînement, cette outrance qui caractérisent la violence ? Les considérations physiques ou techniques ici ne suffisent plus. La violence, après tout, utilise les mêmes moyens que la force : saisies, coups de poings, coups de pieds, armes ou objets divers… La clinique psychiatrique nous permet de poursuivre le travail de distinction conceptuelle initié par Julien Freund en confrontant l’observateur à deux types d’outrance ou de malmesure en matière de violence : la malmesure qui pourra être observée dans la clinique des psychoses et celle qui pourra être observée dans la clinique des psychopathies.

Il est bien connu que le psychotique peut devenir violent et que cette violence peut aller jusqu’au meurtre. Dans le cas de la paranoïa, le meurtre vient clore « une montée inexorable d’une ingérence dont il faut se défendre » (Guyard, 2006, p. 601). Le paranoïaque meurtrier tue pour se débarrasser de son persécuteur. Le meurtre lui apparaît comme la seule issue dans une relation duelle et antagoniste : ou c’est lui, ou c’est moi. A un certain stade du délire de persécution, le passage à l’acte meurtrier apparaît ainsi largement prévisible (sinon fatal) de même que l’identité de la victime. Ainsi, dans le cas d’Aimée, la patiente étudiée dans la thèse de Jacques Lacan, la tentative de meurtre contre Mme Z., une des actrices de théâtre les plus appréciées du public parisien de l’époque, avait été précédée d’une élaboration délirante dans laquelle Mme Z. tenait le rôle de la persécutrice (Lacan, 1932). En opposition à ce meurtre prévisible du paranoïaque, de nombreux auteurs ont parlé de meurtre « immotivé » pour qualifier l’homicide perpétré par le schizophrène. Dans le cas de la schizophrénie, en effet, le passage à l’acte meurtrier semble intervenir sans motivation apparente. Alors que le délire paranoïaque désigne par avance la victime sous la forme du persécuteur ou de la persécutrice, le scénario du meurtre schizophrénique apparaît au premier abord incompréhensible : « les motifs conflictuels semblent assez minces » (Guyard, 2006, p. 601) et la victime n’apparaît pas désignée par avance, aussi clairement en tous cas que dans le cas de la paranoïa. L’homicide schizophrénique n’est reste pas moins intelligible :

« Que le meurtre se mue en suicide, qu’il s’exerce sur un proche, le schizophrène le construit comme un acte inexplicable, étranger, arbitraire ou encore immotivé, difficilement compréhensible parce qu’il s’inscrit dans un délire intérieur dont la violence semble aussi singulière que monstrueuse, mais dont l’issue – c’est là le point essentiel – consiste toujours à rétablir une indépendance mise à mal » (Guyard, 2006, p. 601).

La violence paranoïaque et la violence schizophrénique apparaissent ainsi, à bien des égards, comme opposées l’une à l’autre. Pourtant, toutes les deux surviennent dans des situations de conflit, pour mettre fin précisément à cette conflictualité : par la suppression de l’antagoniste ou du double persécuteur dans la paranoïa, par le rétablissement d’une indépendance compromise dans le cas de la schizophrénie. Toutes les deux nous confrontent à la question – éminemment politique – du pouvoir sur autrui. Ce pouvoir, pour le paranoïaque, n’a pas de limites : soit il est entièrement soumis au pouvoir d’autrui, soit il soumet entièrement autrui à son pouvoir. Le meurtre dans ce cas témoigne en quelque sorte du basculement : persuadé d’être persécuté et victime d’un complot, se croyant soumis, autrement dit, au pouvoir d’autrui, le paranoïaque tue pour rétablir la situation et reprendre le contrôle. Le schizophrène au contraire s’est construit un univers, certes étrange et hermétique, mais bien délimité, dans lequel il exerce un pouvoir tout puissant. Le schizophrène y est isolé et ce pouvoir n’est pas négociable. Il lui faut en exclure autrui. Le meurtre au besoin y pourvoira si une ingérence devient insupportable.

Cette violence psychotique n’est pas sans liens avec la question du commandement et de l’obéissance qui constitue selon Julien Freund l’un des « présupposés » de l’essence du politique (Freund, 2004, p. 94). Le politique suppose en effet un partage des rôles dans lequel certains commandent alors que d’autres obéissent. Il s’agit bien de rôles et de fonctions institués, nettement délimités, particulièrement, insiste Freund, dans les régimes constitutionnels où la constitution fixe, par exemple, les attributions respectives du Président de la République et du Premier Ministre. Le commandement, en matière politique, implique le recours possible à la force. Freund insiste en effet à juste titre sur le fait que le politique ne peut se définir seulement en termes juridiques : le droit ne serait qu’un système de normes en l’absence d’un pouvoir de commandement pouvant faire appel à la force. Il ne suffit pas en effet de dire le droit. Il faut encore s’assurer de l’obéissance. Mais des abus de pouvoir sont toujours possibles de la part du commandement, se traduisant par un abus dans l’usage de la force. Inversement, le commandement peut faire preuve de faiblesse soit par manque de force, soit par hésitation à y faire appel. C’est alors que surgit la violence. La violence politique, autrement dit, soit est le résultat de l’abus de pouvoir, soit constitue « le désordre qui naît de la faiblesse » (ibid., p. 721). Le premier cas est celui du despotisme (δεσποτεία), le second celui de l’anarchie, au sens étymologique du terme (ἀναρχία). Il n’y a pas lieu, bien sûr, de rechercher une correspondance terme à terme entre la malmesure psychotique du pouvoir et sa malmesure politique, même si ce n’est sans doute pas un hasard si les deux grands totalitarismes du XXe siècles furent orchestrés par des personnalités paranoïaques (Hitler et Staline). Ce qui compte c’est de repérer comment la violence peut effectivement surgir d’une malmesure dans la délimitation du pouvoir en tant que commandement.

Mais la violence peut aussi résulter d’une malmesure de l’impulsivité. Il s’agit moins alors de pouvoir et de commandement, que de tempérance vis-à-vis de ses propres désirs et d’endurance face à la frustration. Pour trouver le vocabulaire adéquat, on peut reprendre ici ce que dit Aristote au chapitre VII de L’Éthique à Nicomaque sur l’acrasie (ἀκρασία) opposée à l’ékratéia (ἐκράτεια), c’est-à-dire la tempérance et l’intempérance (opposition liée, chez Aristote, à celle de l’endurance et de la mollesse). On a ici une malmesure de l’impulsivité, un manque de σωφροσύνη (prudence, sagesse, modération dans les désirs, tempérance). Cette malmesure de l’impulsivité est à son comble dans la violence psychopathique (et non plus psychotique), celle, par exemple, d’un Jacques Mesrine, qui la décrivait très bien lui-même dans son récit autobiographique, L’instinct de mort (auquel je ne peux que renvoyer).

La célèbre définition de Weber combine donc trois dimensions : 1° – celle, ergologique de la force (plutôt que de la violence), 2° – celle, sociologique, de la légalité de son usage (à qui reconnaît-t-on socialement, dans telle ou telle société, une compétence dans l’usage de la force ? cet usage est-il réservé à certains corps de métiers ? à certaines personnes ?), 3° – celle, axiologique, du contrôle de l’impulsivité (on attend ainsi du professionnel, policier ou soldat, qu’il contrôle ses émotions, ne se laisse pas aller à la colère, au désir de vengeance… bien que — Homère le décrivait déjà très bien dans l’Iliade — le combat soit par excellence un lieu où les émotions sont poussées à leur plus haut niveau d’intensité).

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Ivan le Terrible : une malmesure du pouvoir (extrait du film de Pavel Louguine, Tsar, 2009)

  1. Aristote, Métaphysique, 8, 6, 1045b 20-24. Voir aussi la Physique. []
  2. A partir des définitions que nous avons données plus haut, nous dirions plutôt qu’il n’y a pas de force sans puissance. []

samedi, 14 avril 2012

La guérilla espagnole contre l'armée napoléonienne

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La guérilla espagnole contre l'armée napoléonienne sous l'éclairage de Carl Schmitt

 

C’est dans le contexte des guerres napoléoniennes, et plus précisément à l’occasion de la guerre de résistance espagnole contre l’occupation française, entre 1808 et 1813, que va émerger pour le juriste politique allemand Carl Schmitt (1888-1985) la figure conceptuelle du "partisan" moderne, à savoir d’un "soldat irrégulier" pensé en tant que tel ; à cette occasion, pour la première fois, un cadre juridico-politique explicite lui est conféré. Ce qui ne sera pas sans conséquences quant au droit de la guerre classique qui avait prévalu jusque-là.

LE CONTEXTE HISTORIQUE DU SOULÈVEMENT ESPAGNOL 

Rappelons brièvement les faits : pour établir un "blocus continental" efficace contre la Grande-Bretagne, puissance maritime et commerciale et principale ennemie de la France, Napoléon entendait contrôler l’ensemble de la péninsule ibérique. Il envoya donc Murat avec des troupes en Espagne en 1808, sans provoquer de véritables réactions de la part d’une famille royale espagnole par trop affaiblie. Dans ce contexte de décomposition du pouvoir royal légitime, une première émeute populaire à Aranjuez poussa d’ailleurs le roi Charles IV à abdiquer au profit de son fils Ferdinand VII dans l’espoir de stabiliser la situation politique.

Mais l’entrée de Murat dans Madrid provoqua une véritable insurrection, celle du 2 mai, que le général français réprima durement. Sous la pression de Napoléon, Ferdinand VII abdiqua à son tour au profit, cette fois, de Joseph Bonaparte, frère aîné de l’Empereur, qui fut reconnu par une assemblée de notables Afrencesados (1). Mais le soulèvement du peuple était déjà quasi général. Il fut formellement encadré par des Juntas (juntes militaires) auto constituées qui refusèrent de reconnaître le coup de force français et qui, au nom du roi pourtant déposé, allaient diriger une résistance à l’occupant. Cette résistance héroïque rassembla, dans un premier temps, troupes régulières et civils en armes, ces derniers devant progressivement en constituer l’âme. Dès juin 1808, en effet, commença ce qu’on appellera bientôt une "guérilla" – le terme en tant que tel n’apparaîtra qu’en 1812 – qui se développa au fur et à mesure des défaites de l’armée régulière espagnole face à Napoléon. Ces défaites successives pousseront d’ailleurs de nombreux déserteurs à accroître le nombre de ces partisans. Ce qui va intéresser au premier chef Carl Schmitt dans la guerre de résistance espagnole à Napoléon, c’est précisément le fait que "le partisan de la guérilla espagnole de 1808 fut le premier à oser se battre en irrégulier contre les premières armées régulières modernes" (Schmitt, La notion de Politique – Théorie du Partisan, préface de Julien Freund ; traduction de Marie-Louise Steinhauser, Paris, Calmann-Lévy, 1972, page 214). Par "armées régulières modernes", il convient ici d’entendre celles issues des expériences de la Révolution française qui sont à l’origine d’une reformulation radicale du concept de "régularité" hérité de l’âge classique, et dont – aussi paradoxal que cela puisse paraître de prime abord – le "partisan", en tant que combattant irrégulier, constitue en quelque sorte le produit.

DE LA NOTION PROBLÉMATIQUE "D’IRRÉGULARITÉ"

Comme le relève Schmitt, il se trouve que "la différence entre combat régulier et combat irrégulier est fonction de la nette définition de ce qui est régulier et une antinomie concrète donnant lieu à une délimitation du concept n’apparaît qu’avec les formes modernes nées des guerres de la Révolution française" (op. cit., p. 213). Jusque-là avait prévalu un droit interétatique classique – le Jus Publicum Europaeum – au sein duquel le phénomène de l’hostilité était maintenu dans le cadre de guerres limitées, apanage exclusif des princes contre un ennemi stricto sensu "conventionnel". La principale caractéristique de ce droit classique résidait dans le fait qu’il comportait des distinctions nettes entre guerre et paix, entre combattants et non-combattants, entre un ennemi et un criminel. Et, comme le souligne Schmitt, "en regard de cette régularité toute classique" (op. cit., p. 218), l’idée même de soldat irrégulier était tout simplement inconcevable : "Le droit classique de la guerre (…) ne laisse pas de place au partisan au sens moderne. Ou bien celui-ci est, comme dans la guerre au XVIIIe siècle, qui est une affaire entre cabinets, une espèce de troupe légère, particulièrement mobile mais régulière, ou bien il est un criminel particulièrement méprisable, et il est alors tout simplement un hors-la-loi" (op. cit., p. 219). 

Cette alternative tranchée est remise en cause à l’issue des bouleversements révolutionnaires, sur la base d’une délimitation nouvelle de la notion de "régularité", lorsque la notion d’État dynastique est reformulée comme État national et que l’armée des princes est conduite à se transformer en armée nationale. Schmitt discerne d’ailleurs la faillite du droit classique dans cette configuration juridico-politique qui voit la "victoire du civil sur le soldat le jour où le citoyen passe l’uniforme tandis que le partisan le quitte pour continuer à se battre sans uniforme" (op. cit., p. 306). À cet égard, loin de constituer une anomalie, l’émergence de la figure du partisan, en tant que combattant irrégulier, face à cette nouvelle "régularité" post révolutionnaire, ne constitue somme toute que l’une des deux faces d’un même Janus, celle du soldat-citoyen. En déferlant sur toute l’Europe continentale, le nouvel art militaire de l’armée napoléonienne, comme héritier de cette mutation fondamentale, va se trouver être, à la fois, vecteur et victime de ce nouveau modèle, dans la mesure où la guerre de l’âge classique, qui ne peut plus que faire figure de jeu conventionnel, va laisser la place à de véritables guerres des peuples, dont la guerre de résistance espagnole n’est que le premier d’une longue suite d’avatars. Ce qui intéresse Schmitt, c’est précisément de montrer que l’apparition du partisan en Espagne entérine une situation inédite qui a transformé l’ennemi "conventionnel", au cœur des guerres limitées que se livraient les princes dans le droit classique, en ennemi pour le coup bien "réel", au cœur de guerres devenues nationales : "L’élément principal de la situation du partisan de 1808 est qu’il risque le combat sur le champ limité de son terroir natal, alors que son roi et la famille de celui-ci ne savaient pas encore très bien quel était l’ennemi réel" (op. cit., p. 215).

En dépit de l’aura involontaire dont Ferdinand VII bénéficiait auprès de son peuple et qui l’a préservé, malgré lui, d’une condamnation sans appel de l’Histoire, ses hésitations devant l’événement majeur qui se joue s’expliquent sans doute par le fait qu’il se situe toujours par rapport à un droit classique de la guerre dérivé du Jus Publicum Europaeum. En revanche, le partisan espagnol, lui, appartient déjà au monde nouveau qui est en train d’advenir en matière stratégico-politique. "Seul le partisan espagnol rétablit le sérieux de la guerre, et ce fut contre Napoléon, c’est-à-dire dans le camp défensif des vieux États continentaux européens dont la vieille régularité devenue convention et jeu n’était plus en mesure de faire face à la nouvelle régularité napoléonienne et à son potentiel révolutionnaire. De ce fait, l’ennemi redevint un ennemi réel, la guerre, une guerre réelle. Le partisan défenseur du sol national contre le conquérant étranger devint le héros qui se battait réellement contre un ennemi réel" (op. cit., p. 304-305).

Mais l’apparition du phénomène du partisan n’allait pas forcément de soi pour des esprits encore largement imprégnés de l’idée de la vieille "régularité" militaire. Paradoxalement, c’est peut-être dans cette perspective qu’on peut saisir la portée des diverses tentatives juridiques de "régularisation" de la guerre de partisans par ce qui restait de l’État espagnol légitime ou de ce qui s’en réclamait alors, en l’occurrence les Juntas militaires.

LE PRÉCÉDENT EN 1808 D’UNE LÉGITIMATION DE LA GUERRE DE PARTISANS PAR LA JUNTA DE SÉVILLE

Ce qui est en effet capital dans l’apparition de cette forme de guerre irrégulière espagnole, c’est qu’elle va recevoir de la part de Juntas militaires régionales et/ou nationales, une sorte de réglementation juridico-politique – fait sans précédent dans l’Histoire – lui conférant une légitimité inédite rendue nécessaire par les circonstances. La passivité, face à l’envahisseur français, d’un gouvernement dépassé par les événements devait mettre au premier plan ces Juntas militaires, d’une part, les guérillas, d’autre part. Un premier cadre juridico-politique est donné dès le 6 juin 1808 par la Junta Suprema de Gobierno de Espana e Indias (la Junte de Séville), auto-constituée le 28 juin 1808, et qui déclare la guerre à l’Empereur Napoléon en ces termes : "… Nous déclarons la guerre sur terre et sur mer à l’Empereur Napoléon Ier et à la France, dont nous supportons la domination et le joug tyrannique ; et nous demandons à tous les Espagnols d’œuvrer hostilement à leur encontre et de leur causer le plus de dommages possibles selon les lois de la guerre" (Blanch, Historia de la guerra de la Independencia en Cataluna, Barcelone, 1968, p. 64).

Cette dernière précision a ceci de paradoxal et d’étrange qu’elle méconnaît le fait que la guerre patriotique espagnole n’est déjà plus une guerre de l’âge "classique". Les dites "lois de la guerre", selon la conception classique dans laquelle, comme le rappelle Schmitt, « l’ennemi a son statut », et dans laquelle "il peut être imposé des limites à la guerre" (Schmitt, op. cit., p. 12), sont d’ores et déjà sapées par la nouvelle forme d’hostilité "réelle" développée par la guerre de partisans qu’on cherche illusoirement à réglementer. Sans que ces auteurs en mesurent peut-être toutes les conséquences à terme, cette déclaration de juin 1808 apparaît comme le précédent le plus direct de légitimation de la guerre irrégulière. Il est complété le jour même par un second texte. Celui-ci, intitulé Prevenciones, s’adresse au peuple espagnol pour qu’il sache que certaines mesures sont indispensables à la bonne conduite de la lutte contre l’ennemi : "Il faut éviter les actions générales et privilégier les initiatives individuelles. Il est nécessaire de ne pas laisser l’ennemi se reposer un instant, de harceler sans répit ses flancs et son arrière-garde, de l’affamer, d’intercepter ses convois de vivres, de détruire ses entrepôts et de lui couper toutes les voies de communication entre l’Espagne et la France d’autre part" (Queipo de Llano, Historia del Levantamiento, Guerra y Revolucion de Espana, Madrid, 1835-1837, p. 232-233). 

Ainsi est en train d’être "régularisée" une guerre de partisans dont la Junta pressent pourtant d’ores et déjà les éventuelles dérives, ce qui apparaît clairement dans l’article final des Prevenciones : "Il s’agira de faire comprendre et de persuader la nation que libérés, comme nous l’espérons, de cette guerre cruelle, et le trône à nouveau entre les mains de notre seigneur et Roi Ferdinand VII, les Cortes, sur sa convocation, réformeront les abus et établiront les lois dictées par l’expérience, pour le bien et la félicité publics ; deux notions que les Espagnols connaissent sans que les Français aient eu à les leur enseigner" (Queipo de Llano 1835, p. 233). 

Pour l’heure, la Junta de Séville fait figure localement de pouvoir suprême, à l’image d’un organe de souveraineté nationale (comme les autres Juntas provinciales), et apparaît donc pour les Espagnols politiquement "compétente", dans la mesure où elle se réclame de l’ancien pouvoir légitime du roi Ferdinand VII. C’est bien à ce titre qu’elle ordonne d’ailleurs l’enrôlement massif de partisans comme auxiliaires des dernières troupes régulières espagnoles combattant encore Napoléon.

LE TOURNANT DE L’AUTOMNE 1808

La méthode paraît pour un temps donner de bons résultats puisque, le 19 août 1808, advient la première défaite française, celle de Baylen, face à 40.000 hommes de troupes régulières espagnoles unies à un noyau de volontaires et de francs-tireurs et au peuple andalou en armes. Ce succès ponctuel entretient en fait l’illusion sur les capacités réelles de l’armée régulière espagnole de résister durablement à l’armée napoléonienne. En effet, à l’automne 1808, devant les mauvais résultats de son armée, Napoléon, pour résoudre rapidement le problème espagnol avant de se mesurer à l’Autriche, décide de prendre en personne, le commandement des troupes le 6 novembre 1808. En virtuose militaire qu’il est, il retourne la situation en très peu de temps, remportant victoire sur victoire, et entre à Madrid le 4 décembre 1808 où il réinstalle aussitôt son frère Joseph. En Catalogne, le 15 décembre, le général Vivès est battu et lève le siège de Barcelone. Saragosse, assiégée pour la seconde fois par les Français le 20 décembre, capitule le 20 février 1809 en dépit d’une résistance héroïque. 

La confiance relative qui perdurait dans ce qui restait de l’armée "régulière" espagnole née de la bataille de Baylen, s’en trouva considérablement altérée. La guérilla espagnole reste alors seule à s’opposer à l’envahisseur français et va, pour cette raison, prendre une ampleur inégalée. Comme le souligne Schmitt : "À l’automne de 1808, Napoléon avait vaincu l’armée régulière espagnole ; la guérilla espagnole proprement dite ne se déclencha qu’après cette défaite de l’armée régulière" (op. cit., p. 214). C’est à partir de là, en effet, que les Espagnols commencèrent véritablement à organiser des bandes de partisans sur une grande échelle pour continuer la résistance à Napoléon.

LE MANIFESTE DU 28 DÉCEMBRE 1808

Dans ce contexte d’échecs militaires retentissants pour ce qui se réclamait encore de l’armée régulière espagnole, la Junta Centrale , abasourdie, se réunit à Séville et publie le 28 décembre 1808 le Reglemento de partidas y cuadrillas, qui reprend en l’accentuant l’esprit du règlement de juin 1808. Ce règlement du 28 décembre 1808, en trente-quatre articles, est le premier texte réglementaire de portée nationale. On n’y parle cependant pas encore de "guérillas" ni de "guérilleros". À cette époque, le terme "guérilla" n’est pas encore intégré dans la terminologie de la guerre patriotique espagnole. Il a toujours sa signification technique, dérivée de la guerre classique, de "ligne de tirailleurs devant attaquer l’ennemi de front et sur ses flancs, ou troupe légère utilisée pour les reconnaissances et les escarmouches". Il renvoie encore au "partisan" du XVIIIe siècle, celui qui appartient à un "parti", ou détachement battant la campagne, à l’un de ces détachements dont le maréchal de Saxe écrivait qu’ils pouvaient traverser un royaume entier sans être repérés.

Dans le règlement de décembre 1808, on parle plus spécifiquement de partida, ("bande"), qui signifie, d’après Almirante dans le Dictionnaire Militaire, "toute troupe peu nombreuse", aussi bien régulière qu’irrégulière, et de cuadrilla , littéralement "troupe", "bande". Les partidas, sans spécification notable quant à leurs effectifs, rassemblent toutes sortes d’individus à l’exclusion des alistados ou solteados (les appelés aux armées). Les cuadrillas sont, quant à elles, des bandes de contrebandiers de "mer et de terre". Lorsque ce règlement est publié, des actions de partisans existent déjà depuis huit mois. Mais elles sont appelées à se développer. Ces dispositions légales tendent, en fait, à les assujettir autant que faire se peut à des règles dans lesquelles l’esprit militaire dominerait. Les principaux points abordés dans le règlement ont trait à la finalité de la guerre de partisans, à la composition des unités, à la collation des grades, à l’armement, aux soldes, aux règles de discipline et au butin.

Les deux types d’unités distinctes que sont les partidas et cuadrillas se trouvent donc mises sur pied avec pour mission d’assurer la sécurité du pays en semant la terreur et la désolation chez l’ennemi. Les partidas, d’abord, forment des groupes d’environ une cinquantaine d’hommes à pied et à cheval. Le commandement, et c’est important, est assuré par un chef du grade de commandant, un second, deux subalternes à cheval et trois à pied, ayant respectivement les grades militaires réguliers de lieutenant de cavalerie, sergent, et ainsi de suite. Les articles 24 et 28 visent à encadrer avec une certaine souplesse ces unités "irrégulières" en adoptant la structure des armées opérationnelles, à la fois pour éviter une trop grande anarchie et pour opérer sur l’ennemi avec le plus de rapidité et d’efficacité possibles. On retrouve là deux des traits essentiels dans la perspective d’une "théorie du partisan" selon Carl Schmitt, traits le plus souvent liés, sinon indissociables, et qui font figure de critères pour définir le partisan moderne en train d’advenir en Espagne ; à savoir : "l’irrégularité" et "le haut degré de mobilité du combat actif" (op. cit., p. 229) – la mobilité n’impliquant pas l’irrégularité, mais celle-ci impliquant nécessairement celle-là. Il est en outre prévu de répartir ces unités "irrégulières" dans les différentes divisions de l’armée en les soumettant aux ordres des généraux respectifs qui leur sont donnés comme chefs, ainsi qu’un adjoint. On voit bien l’intention des autorités de faire des partidas une émanation de l’armée "régulière". Pourtant, en contraste avec les règles militaires précitées, l’article 26 précise : "Les chefs locaux (ceux de l’armée qui encadrent les bandes de partisans) devront laisser agir les partisans avec le plus de liberté possible, tout en les gardant à leur disposition, pour la bonne conduite des opérations" (Horta Rodriguez, "La législation de la guérilla espagnole dans l’Espagne envahie (1808-1814)", in Revue historique des Armées, 1986/3, p. 33).

Il convient ici de s’interroger sur la raison d’être du cadre juridico-politique conféré aux bandes de "partisans". Les rédacteurs du règlement savent pertinemment qu’il existe déjà depuis juin des groupes de partisans plus ou moins nombreux. Le règlement "reconnaît" donc une nouvelle fois leur existence et légitime leur lutte au regard de l’occupation française. Mais à cela s’ajoutent d’autres motivations ou plutôt, devrait-on dire, d’autres soucis. Il est intéressant de savoir que "ceux qui auront accompli leur temps de service obtiendront une place dans la Renta (2) ou d’autres postes selon les circonstances" (Horta Rodriguez, p. 33).

Cela prouve le souhait déclaré de réintégrer à moyen terme le "partisan" dans l’armée "régulière", ou à défaut dans une forme de "régularité" quelconque. Enfin, le butin fait l’objet d’une réglementation minutieuse. La répartition du butin sera proportionnée à la solde et personne ne pourra s’immiscer dans sa distribution pour prévenir de la sorte toute forme éventuelle de contestation.

Les mêmes règles s’appliquent aux cuadrillas. Dans les faits, on tente bel et bien d’organiser, par ce biais, les contrebandiers qui agissent "au grand préjudice du trésor royal" (Horta Rodriguez, p. 34). L’article 19 est directement conçu à leur intention. Avant tout, il apparaît nécessaire de leur reconnaître une légitimité "politique" en louant leur valeur, leur intrépidité, leurs talents militaires pour conclure que, "n’ayant pu trouver une activité qui leur permette de s’épanouir, ils se sont lancés dans la contrebande". On leur promet, en tout cas, désormais "une carrière glorieuse et utile à l’État dans les circonstances actuelles" (Horta Rodriguez 1986 : 34). C’est leur statut qui s’en trouve ainsi radicalement modifié. On attribue en effet à cette activité "irrégulière", voire illégale en d’autres temps, mais si populaire en Espagne, le privilège en quelque sorte juridique de s’exercer en toute quiétude puisque cela sert la fin politique de la résistance à l’envahisseur français. Le péril couru par la Nation espagnole autorise en quelque sorte le recours à tous les palliatifs. En conséquence, on pardonne les crimes passés aux contrebandiers se présentant dans les huit jours devant le chef militaire ou politique, et qui se verront accorder une reconnaissance politique faisant d’eux des "partisans" et non de simples bandits de grand chemin.

Pour Schmitt justement, outre l’irrégularité, "un autre critère distinctif qui s’impose aujourd’hui à notre attention réside dans l’engagement politique qui caractérise le partisan de préférence à d’autres combattants" (op. cit., p. 224). Et c’est ici qu’il faut souligner l’importance cardinale du "tiers intéressé", qui se trouve être un "tiers régulier", dont parle Schmitt : en l’occurrence, les Juntas militaires qui se réclament de la légitimité royale et, au-delà, la puissance anglaise qui reconnaît le "partisan" comme un allié. C’est en effet ce tiers "qui procure cette sorte de reconnaissance politique dont le partisan qui combat en irrégulier a besoin pour ne pas tomber, tel le bandit et le pirate, dans le domaine non politique, ce qui signifie ici : dans le domaine de la criminalité" (op. cit., p. 290). C’est toute la subtilité de cette dimension politique qui confère au "partisan" son statut et qui a rendu le sujet tellement polémique jusqu’à nos jours.

LES NOUVELLES DISPOSITIONS RÉGLEMENTAIRES DE 1809

"L’institutionnalisation" de la guérilla va se renforcer avec l’adoption de plusieurs dispositions. Elles sont au nombre de trois, en date respectivement du 1er janvier, du 28 février, et du 20 mars 1809. Elles contiennent les soubassements d’une guerre de partisans strictement définie, tout autant que les problèmes que celle-ci ne cessera de soulever.

La première disposition entend contrôler étroitement les Juntas provinciales qu’elle transforme en simple Juntas "d’observation et de défense". Celles-ci constituaient un des supports les plus efficaces pour l’esprit de résistance alimenté par des hommes qui défendaient avec ardeur la patrie de leurs ancêtres, le foyer familial, la terre qu’ils travaillaient, leur religion, et un mode de vie fermé aux ingérences étrangères. C’est là qu’on saisit avec une acuité toute particulière "le quatrième critère distinctif du partisan authentique" selon Carl Schmitt, "ce que Jover Zamora (3) a appelé son caractère tellurique. Celui-ci est très important pour la situation fondamentalement ‘défensive’ du partisan…" (op. cit., p. 229). Au reste, ces partisans étaient bien, comme le souligne encore Schmitt, "les défenseurs autochtones de la terre natale qui mouraient pro aris et focis, les héros nationaux et patriotiques (…) tout ce qui était réaction d’une force élémentaire, tellurique vis-à-vis d’une invasion étrangère (…), légitimité de son irrégularité de partisan" (op. cit., p. 288).

La seconde disposition, celle du 28 février, est un ordre royal émanant de la Junta Centrale : "La junte souhaitant donner une impulsion puissante en faisant appel à l’intérêt individuel, aux grandes motivations qui entraînent les habitants du royaume dans la lutte contre l’ennemi afin de lui causer le plus de tort possible, il a été décrété que les armes de toutes espèces, les chevaux, les vivres, les bijoux et l’argent qui seront pris à l’ennemi, par quelque particulier que ce soit, seront la propriété de celui qui les aura pris. Le droit de préférence dans l’achat des canons, armes, chevaux resteront à Sa Majesté ou au Trésor Royal ; le montant de ces choses leur sera payé avec ponctualité" (Horta Rodriguez, op. cit, p. 36).

La dernière des trois dispositions est le Manifeste édicté par la Junta Centrale le 20 mars 1809. Il reproche notamment aux généraux français les mauvais traitements infligés aux prisonniers et leur enjoint de considérer que tout Espagnol en mesure de prendre les armes est, aux yeux de la Junta un soldat de la patrie et doit être traité en conséquence par l’armée française – mais de manière unilatérale, et c’est précisément là tout le problème. Ce manifeste laisse entrevoir les conséquences et les difficultés insurmontables que fait surgir le "partisan" dans le droit classique de la guerre dont la Junta se réclame, alors même qu’elle légitimise ce type de combattant irrégulier. Comme l’explique Schmitt, en effet, "plus la discipline d’une armée régulière est stricte, plus elle est scrupuleuse dans sa distinction entre militaires et civils en ne considérant comme un ennemi que le seul adversaire en uniforme, et plus elle deviendra ombrageuse et irritable si, dans l’autre camp, une population civile qui ne porte pas l’uniforme participe, elle aussi, au combat. Les militaires réagiront par des représailles en fusillant, en prenant des otages, en détruisant des localités et ils tiendront ces mesures pour légitime défense face à des manoeuvres perfides et sournoises". (op. cit., p. 246-247). À cet égard, l’armée française est effectivement confrontée au problème du "traitement" à accorder à tout Espagnol pris les armes à la main, problème qu’elle ne parvient pas à résoudre, sinon le plus souvent par des exécutions sommaires, faisant de cette guerre d’Espagne l’une des plus cruelles et des plus horribles, et déjà perçue comme telle par ses contemporains. Le Manifeste poursuit en faisant allusion à la lutte de tout un peuple contre la tyrannie et l’envahisseur en ces termes : "Tout membre de cette nation doit trouver la protection des lois de la guerre, le général qui ne les respecte pas est un bandit qui s’expose à la colère du ciel et à la vengeance des hommes" (Canga-Arguelles, p.107).

Mais cela relève de l’anathème pur et simple dans la mesure où l’on touche là à une espèce de paradoxe : ce paradoxe réside dans le fait d’en appeler à des "lois de la guerre" d’un droit classique de la guerre, alors même que l’émergence de la figure du "partisan" les rend, de fait, caduques. Ces problèmes insolubles vont prendre une ampleur sans précédent avec le dernier règlement de 1809, intitulé "Instruction sur le corso terrestre".

"L'INSTRUCTION SUR LE CORSO TERRESTRE" D’AVRIL 1809

Le second grand texte réglementaire de portée nationale, "l’Instruction sur le corso terrestre" (4) du 17 avril 1809 suit le même esprit que les trois dispositions du début de l’année 1809. Ce texte, comportant dix-huit articles, a pour but de donner des directives concrètes aux "partisans", et, ipso facto, en détermine la figure "irrégulière". Le terme de "corso terrestre" est une alliance de mots circonstancielle (5), celle-là même qui consisterait à parler d’un "corsaire de terre", par opposition à un "pirate de terre".
D’après la doctrine traditionnelle espagnole, le corso a pour but d’empêcher l’ennemi de pouvoir se servir, lorsqu’il en a besoin, des voies de communication sur mer. Le corso est donc l’oeuvre du combattant qui, en état d’infériorité, ne peut livrer une bataille décisive ni détruire la force armée de l’ennemi. Ces similitudes avec ce que sera la guerre de partisan ne s’arrêtent pas là. Ce sont des forces peu nombreuses qui luttent contre un ennemi omniprésent et qui, en l’absence d’une lettre de patente, comme celle qui était accordée au corsaire des siècles précédents, risquent constamment de sombrer dans le brigandage. La distinction entre corsaire et pirate s’avère essentielle. Schmitt insiste sur l’importance discriminante du critère politique : "le caractère politique a (dans l’ordre inverse) la même structure que chez le pirate du droit de la guerre maritime dont le concept inclut le caractère non politique de son aspect néfaste qui vise le vol et le gain privé" (op. cit. p. 224). Par conséquent, poursuit Schmitt, il faut éviter de désigner le partisan, "de le définir comme un pirate de la terre ferme". Le comportement du "pirate" est sans référence aucune à une quelconque "régularité". Et d’ajouter : "Le corsaire, au contraire, court la prise de guerre sur mer et est muni de lettres par le gouvernement d’un État ; son irrégularité à lui n’est donc pas sans lien avec la régularité et c’est ainsi qu’il resta jusqu’à la déclaration de Paris de 1856 une figure juridiquement reconnue du droit international européen. De ce fait, une certaine comparaison est possible entre le corsaire de la guerre sur mer et le partisan sur terre…" (op. cit., p. 284).

Les projets et motivations de ce "corso terrestre" de 1809 se trouvent, pour l’essentiel, exposés dans le préambule de "l’Instruction" : à l’instar du "corso maritime", le "corso terrestre" a pour but principal d’anéantir les communications terrestres de l’ennemi. Ordre est donné d’entraver "l’approvisionnement en vivres et en moyens de subsistance de l’armée française dans le pays (…), de faire de même avec les courriers, d’observer leurs déplacements (…), de tenir les Français dans un état d’alerte et de fatigue permanentes (…) en leur faisant le plus de mal possible" (Horta Rodriguez , p. 37).

De cet ensemble de projets visant à durcir la conduite de la guerre en Espagne se détache la motivation qui justifie et légitime aux yeux des Espagnols cette guerre d’un nouveau type. Le préambule de "l’Instruction" stipule d’emblée : "Maintenant que nous connaissons la manière la plus vile que Napoléon a utilisée pour détruire et désorganiser la force militaire espagnole (…), n’est-il pas évident qu’il revient aux paysans de se regrouper pour combattre ses armées ?" (Horta Rodriguez, p. 38).

Les autorités n’ont pas eu le temps d’enrégimenter les Espagnols ni de leur donner un uniforme ; mais tous sont néanmoins des soldats pour ces mêmes autorités. Si le règlement de 1808 cherchait à "militariser" les bandes de "partisans", "l’Instruction sur le corso terrestre", de son côté, met plutôt l’accent sur les représailles qui entendent constituer la réponse aux actions ennemies. Dans le même texte, on souligne d’ailleurs le fait que l’ennemi ne reconnaît pas un statut de combattants aux paysans et en fait "d’innocentes victimes" (Horta Rodriguez, p. 37). On retrouve – posé de manière de plus en plus nette – le problème précédemment évoqué par le Manifeste de la Junta Centrale du 20 mars 1809 sur le "statut" des combattants lorsqu’apparaît la figure du "partisan", lequel ne permet plus de faire une distinction nette entre le combattant et le non-combattant. En 1809, les paysans majoritaires dans les rangs des partisans ne pratiquent pas une guerre "réglée", avec des limites bien définies. L’ennemi le lui rend d’ailleurs bien. Cette relation d’inimitié absolue tend à l’anéantissement mutuel. C’est ce danger de la "guerre folle", inhérente à la faillite du droit classique, sur lequel insiste Schmitt : "Le partisan moderne n’attend de son ennemi ni justice, ni grâce. Il s’est détourné de l’hostilité conventionnelle de la guerre domptée et limitée pour se transporter sur le plan d’une hostilité différente qui est l’hostilité réelle dont l’escalade de terrorisme en contre-terrorisme va jusqu’à l’extermination" (op. cit., p. 219).

L’objectif principal consiste de fait à mener une guerre "à outrance", susceptible de devenir une guerre encore plus inhumaine. Fait sans précédent, on arme tous les habitants des provinces occupées afin "d’assaillir et de dépouiller" les soldats français "chaque fois qu’une occasion favorable se présentera". Et ce, avec toutes les armes, quelles qu’elles soient, même les "interdites" (Horta Rodriguez, p. 37), ce que ne mentionnait pas le règlement de 1808. C’est de cette manière qu’on souhaite résoudre le problème de la disproportion des forces en présence pour être en mesure de se battre "à armes égales", imitant ainsi "la conduite barbare du satellite de Buonaparte » – pour reprendre les termes du texte – afin de « guérir le mal par le mal" (Horta Rodriguez, p. 37). La forme inhumaine que va prendre cette guerre est inhérente à la justification que tous les moyens sont bons pour pouvoir lutter "à barbarie égale". Le fait sans précédent, c’est de l’institutionnaliser. Il n’échappe naturellement pas à Alcano Galiano, l’auteur du "corso", que les raisons qui le sous-tendent sont dépourvues de noblesse, mais son règlement qui, pour la première fois, préconise la guerre totale, est présenté comme une réponse imposée par l’adversaire et un mode de combat induit par les circonstances. C’est pourquoi, "l’Instruction sur le corso" est, par nécessité, plus expéditive, plus cruelle et moins "militaire" que le règlement de 1808.

Après les motivations, examinons plus en détail l’organisation. Les paysans peuvent se regrouper en "cuadrillas d’infanterie et de cavalerie". La plupart des combattants "irréguliers" peuvent se grouper en cuadrillas, même loin du territoire occupé, dans les provinces limitrophes, ou proches de celles qui sont occupées. Mais, dans ce dernier cas, les cuadrillas ayant moins de raison d’être que celles de la zone occupée, doivent demander la "permission de justice" pour se constituer. Cette limitation témoigne du fait qu’on tente, dans cette guerre "irrégulière" sans règles fixes, de poser un cadre juridique minimal susceptible d’éviter, malgré tout, de véritables dérives "criminelles". De même, si la "bonne conduite" des membres de ces cuadrillas est reconnue, un passeport leur est alors délivré, lequel est censé les garantir des mauvais traitements par l’ennemi en zone occupée. Signalons enfin que, si la part du butin, dans le règlement de 1808, était accordée proportionnellement à la solde, en 1809, il n’y a dans ces cuadrillas ni solde, ni grade. Le butin est réparti d’un "commun accord", ce qui apparente davantage ce type de guerre au corso maritime auquel il se réfère.

LES DERNIERS TEXTES DE LA GUÉRILLA

Les derniers textes officiels de l’époque relatifs à une réglementation de la guérilla interviennent en 1812 et 1814. Entre 1809 et 1812, beaucoup de choses ont changé pour "l’envahisseur français". Et 1812 constitue d’une certaine manière l’année de la fin pour "l’ordre français" en Europe, et en Espagne plus particulièrement. Certes, le 9 janvier 1812, Valence tombe aux mains des troupes napoléoniennes, mais la guerre entre dans une phase d’offensive de grande envergure du côté des forces hispano-britanniques. Le 19 janvier, les troupes de Wellington conquièrent Ciudad Rodrigo, puis Badajoz, le 7 avril.

En 1812, Napoléon, alors en pleine campagne de Russie, se voit contraint d’ordonner, pour la première fois, le retrait de 30 000 hommes de la péninsule. Ils feront largement défaut sur le front espagnol. De fait, l’offensive de Wellington, le 22 juillet 1812, permit à celui-ci de remporter sur le général français Marmont la victoire des Arapiles. C’est à la suite de ce succès hispano-britannique que fut publié un nouveau règlement. Il prouve combien les Espagnols étaient conscients des dangers pour l’avenir de la nouvelle forme de guerre irrégulière qu’ils venaient pourtant de prôner. Il s’agit d’un reglemento para las partidas de guerillera, en date du 11 juillet 1812. Dans le même esprit, un dernier règlement sera publié en juillet, alors que la guerre était pratiquement terminée : le reglemento para los cuerpos francos o partidas de guerilla .

Le premier règlement du 11 juillet 1812, comportant un préambule et sept chapitres, entend apparaître comme une structure légale (6). Il n’a pas été établi avec précipitation, comme celui de 1808, ou dans le feu de l’action, comme "l’Instruction sur le corso terrestre". Il annonce la "normalisation", qui sera nettement édictée en 1814, lorsque se posera le problème de la réinsertion des guérilleros dans la société.

La stratégie demeure inchangée : "harceler l’ennemi et soutenir l’esprit patriotique des régions envahies (…)". Il faut "couper les routes militaires de l’ennemi, intercepter ses courriers et ses convois, attaquer ses hôpitaux et ses entrepôts" (Horta Rodriguez, p. 39). Le fait de souligner l’attaque des hôpitaux montre à quel point cette guerre est cruelle, faute de règles à respecter. Cela ne signifie pas que tous les guérilleros fussent toujours cruels : la guerre, la conduite de l’ennemi qui ne pouvait être indulgente par ces raisons mêmes, la personnalité des chefs des guérilleros, déterminaient bien souvent leur attitude. Notons, toutefois, qu’aucun des règlements de la guérilla n’a jamais fait allusion aux prisonniers, sujet épineux et vaste s’il en est.

Peut-être en contrepoint des dangers induits par cette forme de guerre sans limites, on cherche désormais à souligner le caractère "militaire" des guerillas de manière bien plus nette que dans le règlement de 1808. Ce caractère "militaire" se concrétise par la dépendance accrue des groupes de "partisans" vis-à-vis du général-en-chef ou du commandant de district, la soumission à la discipline et aux lois militaires, la suspension de fonction en cas de mauvaise conduite. On a le sentiment d’une reprise en main du phénomène par les instances "régulières". Fait capital, la collaboration avec l’armée s’établit dorénavant pour "chaque opération militaire importante". Le commandant a toute liberté d’action avec sa bande de « partisans » dans "l’attente des ordres du général en chef". L’élément nouveau, c’est que, lorsque ces troupes reçoivent des ordres des autorités citées, elles sont tenues de leur obéir en "allant jusqu’à abandonner leurs projets" (Horta Rodriguez, p. 39).

Les problèmes apparaissent lorsqu’on aborde la question du butin des bandes de "partisans", en particulier lorsqu’il s’y trouve des biens appartenant à des Espagnols. Il est établi que tout ce qui est pris devient la propriété exclusive des "partisans", exception faite de ce qui appartient "aux corps constitués de l’armée" ou aux "bons" Espagnols. Les biens pris et abandonnés par l’ennemi doivent, en effet, être rendus à leurs propriétaires, en laissant cependant aux "corps-francs" un quart de la valeur de ces biens. 

Un élément inquiétant apparaît dans ces articles : c’est la notion problématique de "bons" Espagnols, ce qui suppose qu’il y en a de « mauvais » (Horta Rodriguez, p. 40). C’est l’un des aspects inévitables et tragiques de cette guerre patriotique qui tourne parfois à la guerre civile. Sont considérés comme "bons" Espagnols ceux qui soutiennent la lutte contre l’occupant français, et comme "mauvais" Espagnols les Afrancesados, autrement dit appartenant au parti pro-français et considérés comme de vulgaires collaborateurs. Mais, comme toujours dans de tels cas, les abus et les dérapages risquent d’être nombreux. 
Immanquablement se pose la question de savoir si cela n’est pas susceptible de favoriser un banditisme pur et simple. Cela constitue un vrai problème dès lors que le contrôle du "tiers régulier" dont parle Carl Schmitt s’amenuise. De fait, l’article de 1812 enjoint de manière assez problématique, celui qui procède à l’arrestation, d’agir "avec justice", à l’instar du "bandit généreux". On mesure les dangers qui risquent, à terme, de surgir. Par définition, toute "justice" ne peut relever que d’une institution étatique, seule compétente en la matière : en d’autres termes, tout particulier n’est justiciable que devant une institution politique dont la régularité dérive du caractère souverain du pouvoir étatique constitué. Or, le texte autorise un particulier à la rendre en faisant appel à sa "bonne volonté" individuelle. Le règlement de 1812 insiste d’ailleurs sur les relations entre le peuple et les "bandes" (7). Violences et abus sont énumérés, ainsi que les sanctions que leurs auteurs peuvent encourir. Pour chercher à prévenir des dérapages, on interdit d’arrêter ou de poursuivre qui que ce soit, hormis les déserteurs. On révèle ainsi en creux les cas de détention arbitraire commis par quelques bandes qui s’érigent en juges des "mauvais Espagnols".

La comparaison des deux règlements de 1812 et 1814 s’avère particulièrement intéressante pour saisir l’évolution des esprits quant au problème du partisan espagnol. Pour la première fois, en effet, le terme de guerilla apparaît en tant que tel dans une réglementation. L’article II du règlement de 1812 précise que les partidas devront désormais porter le nom de "corps-francs" ; ces derniers préfigurent ceux qui existeront par la suite, notamment en France durant la guerre de 1870. Le règlement de 1814 s’intitule, pour sa part, "Règlement sur les corps francs et les partis de guérilla" – un substantif promis à la postérité.

La reconnaissance des services rendus par les "partisans" est, certes, explicite dans le préambule des deux règlements. Mais des différences entre les deux textes sont manifestes, en partie à cause du changement de conjoncture politique entraînée par la défaite de Napoléon (8) et le désir d’un retour à une normalisation politique. Ainsi, dans le premier règlement, celui du 11 juillet 1812, on exalte encore l’esprit patriotique et on préconise toujours l’augmentation du nombre des guérilleros, en accord toutefois avec les décisions prises aux Cortes, à savoir le parlement espagnol. Mais le préambule de 1812 reconnaissait déjà l’existence de guérillas qui, "profitant du désordre et de la confusion engendrée par les malheurs de la nation, ont abusé de la confiance qu’on avait mise en elles" (Horta Rodriguez, p. 41).

Le règlement du 28 juillet 1814, quant à lui, va jusqu’à porter un jugement très critique sur les précédents règlements et sur la guérilla dont "les circonstances et les troubles passés n’ont pas permis de fixer les règles avec discernement…" (Horta Rodriguez, p. 41). Ce dernier règlement est clairement dicté par le désir de dissoudre les guérillas. De fait, on se prépare à "réformer et dissoudre les bandes de partisans dont la conduite n’a pas été des plus brillantes" (Horta Rodriguez, p. 41). On abandonne non seulement la création de ces "corps", mais aussi l’idée de leur intégration éventuelle dans l’armée, comme cela avait pu être envisagé antérieurement. 

Ainsi, les autorités renforcent des positions héritières de l’Ancien Régime qui trouveront leur consécration lors de la tenue du Congrès de Vienne, entre novembre 1814 et juin 1815. Schmitt considère d’ailleurs que ce Congrès peut se présenter comme une gigantesque œuvre de "Restauration", au sens propre comme au sens figuré : par-delà la "restauration" du principe de légitimité dynastique en Europe se trouve induit celui du droit classique de la guerre, mis à mal par la tornade révolutionnaire. C’est bien ce qu’annonce le règlement espagnol de 1814, qui sonne en fait comme une reprise en main, avec un retour à travers la « régularité » de l’armée, à la légitimité royale, une fois le danger passé.

Le problème délicat entre tous est celui de la réintégration de ces hommes dans la vie civile. Le règlement de 1812 avait prévu d’une manière imprécise mais néanmoins généreuse, la possibilité pour les officiers de la guérilla d’entrer dans l’armée. Le règlement de 1814 réaffirme encore cette possibilité, mais avec beaucoup plus de réserves. Il est stipulé que, "afin de ne pas porter préjudice en aucune manière aux classes méritantes de l’armée, ils occuperont, lorsqu’ils l’auront obtenu, à grade égal, un poste inférieur" (Horta Rodriguez, p.41). On ne saurait être plus explicite.

Les conséquences sur le plan européen induites par l’exemple espagnol de la guérilla et la légitimation juridico-politique qui lui est donnée sont considérables. Les différents règlements pour la guérilla espagnole constituent un précédent et un exemple décisif qui sera repris par d’autres pays en lutte contre Napoléon, notamment à travers l’Édit royal prussien d’avril 1813 – le Landsturm Ordnung –, puis lors de la campagne de Russie, voire bien au-delà. 

Le Congrès de Vienne qui suit la défaite de Napoléon apparaît certes comme une tentative inédite de Restauration de l’ancien nomos européen de la terre et du droit classique qui lui était afférent. Il semble même renvoyer le "partisan" aux oubliettes de l’Histoire. Mais, pour Carl Schmitt, c’était mal mesurer l’importance de ce qui venait de se passer. L’émergence de la figure conceptuelle du partisan au sein d’un cadre juridico-politique sans précédent avait irréversiblement sonné le glas du droit  "classique", et le fait est qu’il sera appelé au destin extraordinaire que l’on sait au XXe siècle.

David RIGOULET-ROZE
http://www.theatrum-belli.com

article paru dans les Cahiers du Centre d'Etudes d'Histoire de la Défense n°18 (2002)

NOTES :

1/ Littéralement "afrancisés", c'est-à-dire membres du parti pro-français.
2/ L'armée royale.
3/ Cf. Jover Zamora (José Maria), "La guerra de la Independencia Espanola en el marco de las guerras europas de liberacion (1808-1814)", in Historia de la guerra 1. La guerra de la Independencia Espanola y los sitios de Zaragoza, Universidad Ayuntamiento de Zaragoza, Saragosse, 1958, 636 pages, p. 41-165.
4/ Instruccion que Sa Majestad se ha dignado aprobar par el Corso terrestre contra los exécritos francesos, soumis par V. Alcala Galiano à la Junte Centrale.
5/ Selon le dictionnaire de la langue espagnole, le corso est "la campagne que les marchands, patentés par leur gouvernement, mènent contre les pirates ou les embarcations ennemies" ; la patente du corso, quant à elle, est une "cédule ou un brevet par lequel le gouvernement d'un État qui autorise un sujet à participer à l'expédition maritime contre les ennemis de la nation". Cf. Dictionario de la lengua espanola, Real Academia Espanola, Madrid, 1956, p. 374.
6/ Le règlement de 1812 fut publié à Cadix par Don Nicolas Gomez Requena.
7/ La régence avait déjà tenté de corriger par des décisions de portée limitée les abus que les règlements antérieurs n'ont pu que favoriser. Ainsi, le 15 septembre 1811, elle avait donné des instructions pour dissoudre les cuadrillas qui causent des torts à la population.
8/ La campagne de Russie s'achève en novembre 1812 par la Bérézina, et 1813 est l'année de la coalition générale contre Napoléon (Autriche, Russie, Prusse), lequel sera vaincu à la bataille de Leipzig en octobre 1813.

dimanche, 01 avril 2012

Martin van Crevelds neues Werk

Martin van Crevelds neues Werk „Kriegs-Kultur“ und die Frage, warum wir kämpfen      


Geschrieben von: Wolfram Wehl   

Ex: http://www.blauenarzisse.de/

 

Es spielt Marschmusik. Schwere Stiefel dröhnen auf dem Asphalt. Ein Offizier ruft Befehle. Langsam marschiert der Trauerzug im Gleichschritt die Straße entlang. Ähnlich wie viele Passanten, die innehalten, bin auch ich von der Zeremonie gebannt und vergesse das eigentliche Ziel meines Spaziergangs. Es ist die „Macht des Militärischen“, die den Menschen fasziniert und nach Meinung des Militärhistorikers van Creveld eine ganze Kultur ins Leben gerufen hat.

Martin van Creveld zählt zu den renommiertesten Militärhistorikern weltweit. Nach seinem umstrittenen Werk Kampfkraft, erschien vor kurzer Zeit eine neue Publikation. In: Kriegs-Kultur. Warum wir kämpfen: Die tiefen Wurzeln bewaffneter Konflikte beschreibt van Creveld den Krieg als kulturelles Phänomen.

Der Autor zeichnet in fünf Abschnitten ein detailliertes Bild verschiedener Kriegs-Kulturen. Diese reichen vom antiken Griechenland bis in die heutige Zeit. Nach van Creveld spiegelt sich eine Kriegs-Kultur vor allem in Bräuchen, besonderen Kriegs-Regeln (deren Überschreitung als schlimmstes Verbrechen galt), Kriegsspielen und dem Gedenken an den Krieg wieder.

Waffen als Phallus-Symbole

Zu Beginn stellt van Crefeld die These auf, dass Waffen nicht nur einfache Werkzeuge sind. Dies wird seiner Meinung nach bereits anhand der ausgewählten Namensgebung von Kriegsgeräten deutlich, wie beispielsweise die „Dicke Bertha“, ein Geschütz aus dem ersten Weltkrieg, oder die großen amerikanischen Flugzeugträger „Eisenhower“ und „McArthur“ bezeugen. Flugzeuge wurden häufig individuell angemalt, zeitweise auch mit leicht bekleideten Frauen. Lange Zeit war der Krieg schließlich eine reine Männerdomäne. Dies führt den Militärhistoriker zu einem spannenden Vergleich: Inwiefern können Kriegsgeräte als sexuelle Symbole wirken? So wird zum Beispiel bei Geschossen und Projektilen die Ähnlichkeit mit dem männlichen Geschlechtsteil dadurch verstärkt, dass ihre Spitzen oftmals einen hellen Farbanstrich erhalten. Gerade deswegen werden scharfe Waffen oft von Männern geschätzt, da sie nicht nur den Körper einer anderen Person zerreißen, sondern auch in ihn eindringen können.

Krieg ist allgegenwärtig und ein Bestandteil menschlichen Lebens

Dass der Krieg grausam und schrecklich ist, bestreitet van Creveld nicht. Dennoch übt er bis heute auf jeden Einzelnen eine persönliche Wirkung aus, wie sie in zahllosen Feldtagebüchern und Memoiren dokumentiert sind. Nicht nur in der Literatur (man denke an die Ilias), sondern vor allem in der Filmindustrie (Hollywood) hat das Thema Krieg einen festen Bestanteil. Die Regisseure wissen, dass man mit Filmstreifen wie Terminator oder Apocalypse Now ein breites Publikum begeistern kann.

An vielen Stellen weist der Autor darauf hin, dass Krieg und Kriegsspiele (als Vorläufer vom Krieg) Männersache sind. Das fängt bei Schach, dem klassischen Kriegsspiel, an und geht über Gladiatorenkämpfe bis hin zu den großen Feldzügen des 20. Jahrhunderts weiter. In diesem Zusammenhang benennt er den Krieg als „großes Spiel“, wo es um Leben und Tod geht. Dazu schreibt van Creveld: „Füllt der Geruch der Gefahr die Luft, werden Soldaten von teuren Nichtstuern zu sehr wertvollen Erzeugnissen verwandelt.“

Am Ende steht die Frage, ob eine Nation auch ohne eine Kriegskultur auskommen kann. Dieser Gedanke wird vom Autor schnell verneint, denn diesen Ländern drohe der gesellschaftliche Zerfall und ihre Streitkräfte seien allerhöchstens noch „wilde Haufen ohne Manneszucht, ohne soldatische Regeln, die kaum noch kämpfen, sondern höchstens Gräuel verursachen.“ Schlimmer allerdings sei es, wenn die Streitkräfte „Opfer des Feminismus“ würden. Dadurch leide die gesamte Kriegs-Kultur und somit auch „die Fähigkeit, einen Krieg zu führen.“

Clausewitz widerlegen

Das umfangreiche Werk Kriegs-Kultur ist aufgrund seiner Detailliertheit keine leichte Kost. Und doch liegt darin auch seine Stärke, da sich dem Leser aufgrund der Fülle des Materials völlig neue Zusammenhänge ergeben. So widerlegt van Creveld provokanterweise die These von Clausewitz, wonach Krieg lediglich ein Mittel zum Zweck sei, einen Gegner zu vernichten oder in die Handlungsunfähigkeit zu treiben. Der Autor zeigt nämlich vielmehr, dass der Krieg selber über die Jahrhunderte eine Faszination auf den Menschen ausgeübt hat, so sehr er sich auch dagegen wehren mag. Diese Begeisterung ist sowohl wichtiger Bestandteil wie auch Triebkraft der Kultur eines Krieges. In diesem Zusammenhang fügt er auch hinzu, dass jede Art „menschlicher Aktivität“ besser ausgeführt werde, wenn die Beteiligten bei ihrem Tun Vergnügen empfinden. Warum also sollte der Krieg davon eine Ausnahme bilden?

Martin van Creveld: Kriegs-Kultur. Warum wir kämpfen: Die tiefen Wurzeln bewaffneter Konflikte. 560 Seiten, mit zahlreichen Abbildungen. Ares-Verlag, Graz. 34,90 Euro.

samedi, 24 mars 2012

Géopolitique de la France

 
Géopolitique de la France
Géopolitique de la France
Pascal Gauchon
Puf

2012
 
Auteur, il y a quelques années, d'un remarquable Modèle français devenu aujourd'hui un classique, Pascal Gauchon - qui enseigne l'économie en classe préparatoire et a déjà publié un Dictionnaire de géopolitique et de géoéconomie lance une nouvelle collection consacrée à la géopolitique dont le premier volume a pour sujet la France et il a tenu à traiter lui-même d'un domaine qui n'a rien d'évident, nombre d'observateurs et de commentateurs ayant admis une fois pour toutes que la France, intégrée à l'Europe et plongée dans la mondialisation, n'avait plus vocation à demeurer une puissance autonome, ce qui constitue une condition nécessaire pour constituer un sujet géopolitique. Le sous-titre de l'ouvrage - Plaidoyer pour la puissance - peut donc faire figure de provocation mais la solidité de la documentation utilisée et la qualité d'un argumentaire fondé sur une réflexion originale et sur un regard qui va bien au delà des limites généralement fixées à la seule analyse économique permettent à l'auteur d'affirmer son propos et de délivrer un message qui, sans tomber dans les excès et les simplifications d'un manifeste n'en ouvre pas moins des perspectives plus optimistes que celles attribuées à la « France qui tombe » décrite par certains. L'historien revient tout d'abord sur la construction de l'espace national, sur la genèse d'un hexagone dont Fernand Braudel a montré dans son Identité de la France qu'il s'inscrit dans les paysages et dans les conditions qui furent celles de l'installation humaine dans la très longue durée. Celle qui explique les quinze milliards de tombes chères à Pierre Chaunu et, sur un mode plus littéraire à Maurice Barrès attaché « à la terre et aux morts ». Mais la « doulce France » s'est également construite à partir du travail de ses habitants et des transformations qu'ils ont imposées à une nature certes généreuse mais qu'il a cependant fallu maîtriser. Le survol de l'Histoire pointe justement les moments où la France des rois, de la Grande Nation révolutionnaire ou de Napoléon est apparue en mesure de dominer l'Europe, et les séquences marquées par la défaite ou le déclin, enrayés à plusieurs reprises par des sursauts venus de loin et combinant la vitalité réveillée d'u peuple rebelle et l'imaginaire d'un destin collectif porté un temps par la foi chrétienne, avant que le messianisme révolutionnaire et les valeurs de la liberté n'ouvrent sur des temps nouveaux sur le point aujourd'hui d'être révolus. Le poids de l'Etat, l'attachement au modèle politique et social laborieusement défini au cours des deux derniers siècles, la crise identitaire née de l'ouverture sur l'Europe et le monde et de la renaissance des régions font l'objet d'analyses claires et pertinentes qui fournissent une riche matière à réflexion, particulièrement bien venue dans les temps d'incertitude que nous connaissons aujourd'hui. La tradition centralisatrice, la crise de l'Etat-nation et celle de l'aménagement du territoire, la faillite des « élites » attachées avant tout à leur reproduction contrastent avec la richesse des atouts disponibles. Pascal Gauchon recense ainsi tous les aspects de la puissance française, des performances agricoles à l'autonomie nucléaire, des incontestables succès industriels aux réussites des entreprises de services, sans dissimuler les difficultés nées d'une mondialisation qui s'opère souvent au détriment de pans entiers de l'activité nationale. Il confronte les faiblesses françaises sur le terrain de la compétitivité aux atouts qui font l'attractivité incontestable d'un territoire doté depuis longtemps d'excellentes infrastructures. Il conclut son « plaidoyer pour la puissance » en dénonçant les « géopolitiques du nirvana » oublieuses du réel et des rapports de forces, fondées sur la seule idéologie et la seule bien-pensance, des références dont ne peuvent que se gausser les autres puissances. Mais, sur ce terrain, la France n'est pas plus mal lotie que l'Europe et certains acteurs ont encore la volonté de lui conserver un rang de « moyenne grande puissance », résultante de la combinaison de ce qui lui reste de hard power avec les capacités d'influence que lui procure le tout nouveau soft power. Familier du temps long des historiens, Pascal Gauchon parie sur le retour du réel, qui peut être aussi le retour du tragique dans un monde aveuglé par les illusions de la mondialisation, heureuse : « Laissons faire le temps, qui ramènera au monde réel du rapport des forces et du conflit. Si la France ne va pas à ses ennemis, ses ennemis viendront à elle. Alors les conditions d'une autre géopolitique que celle du nirvana seront posées... ».

lundi, 13 février 2012

Leo Strauss—Immigration Enthusiast?

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Leo Strauss—Immigration Enthusiast?

For many, Leo Strauss is a man of mystery. Was he, as Myles Burnyeat of Cambridge University suggested many years ago in The New York Review of Books, a “sphinx without a secret”, not a genuine philosopher but rather a proponent of “ruthless anti-idealism” who provided intellectual backing for an aggressive American foreign policy?

Kevin MacDonald takes a different view, holding that “Strauss crafted his vision of an aristocratic elite manipulating the masses as a Jewish survival strategy.”(MacDonald, Cultural Insurrections, Occidental Press 2007, p.163).

In his illuminating book Leo Strauss and the Conservative Movement in America: A Critical Appraisal, the distinguished intellectual historian Paul Gottfried rejects what these approaches have in common: their picture of Strauss as an enemy of liberal democracy. Though Strauss earned the respect of the rightwing legal theorist Carl Schmitt, he was by no means, Gottfried maintains, a man of the Right. To the contrary, and despite some ambiguous remarks made early in his career, he remained throughout his long sojourn in America a convinced liberal democrat.

Gottfried traces the misapprehension to Strauss’s popular lectures in 1949 for the Walgreen Foundation, published in 1953 as Natural Right and History. Strauss appeared to many as the vindicator of natural law against the relativism and nihilism that threatened to weaken America in its Cold War against communism. Gottfried writes:

“A one-time teacher of mine, Anton Hermann Chroust...used to joke about Strauss’s visit to South Bend: ‘The natural law Catholics came out in force, and as soon as St. Leo started talking, they were like Moses receiving the Law.’”

Gottfried calls attention to the role of Willmoore Kendall of National Review in propagating the myth of Strauss as a high-powered philosopher of conservatism. Kendall, himself an eminent conservative political theorist, was a hero-worshipper, and Eric Voegelin vied with Strauss as the object of his intellectual star-gazing.

But despite the adulation of Kendall and other conservatives, Gottfried notes that Strauss was in politics an “FDR-Truman Democrat---that is, someone who found even the uncertain Republican Dwight Eisenhower to be a bit far to the right for his taste.” Strauss abhorred Joe McCarthy and feared a rightwing populist outbreak.

Still, whatever his personal political opinions, does not Strauss remain useful as a defender of classical philosophy against modern-day relativists and other enemies of the Right?

Gottfried does not think so. Though he recognizes Strauss’s remarkable linguistic and scholarly abilities, he argues that Strauss was in not in fact an advocate of either ancient philosophy or natural law.

Despite Strauss’ close and careful study of Plato and Aristotle and his ostensible praise for the ancient polis, he did not derive from the classical sources doctrines designed to correct the unwisdom of the modern world. Strauss found in Plato, for example, not the doctrine of eternal forms that most scholars discern in his work but rather a search for truth that eventuates in no fixed conclusions: “Unfortunately, Strauss and his disciples never show that what Plato seems to accept is not what he in fact believes.”

Some of Strauss’s followers go further: Mary Nichols gives Aristotle “a recognizably progressive gloss.” Aristotle’s support for slavery, she thinks, is not what it seems. Modern democrats can embrace Aristotle without worry.

But what of natural law? Here too Gottfried maintains that Strauss’s conservative defenders have misunderstood the Master. Strauss, contrary to his Catholic friends, opposed Thomist natural law:

“Advances in the natural sciences had shaken the cosmology that was attached to an earlier understanding of man’s relation to the universe, ands so there was no plausible way—or so one might read into Strauss without too much reaching—of returning to medieval metaphysical notions.”

If Strauss thought that Thomist natural law rested on outdated views, he can hardly be taken as its advocate.

Cannot those who would see in Strauss a conservative at least take solace in one point? Did he not offer sharp attacks on relativism and historicism?

Indeed he did, says Gottfried, but precisely in his attack on historicism he distanced himself from the Right.

 

In contrast with the Left, which stress principles supposedly true regardless of time, place, or manner, the Right has exalted race, nation, and community. The immigration controversy, key to readers of VDARE.com, illustrates this division of opinion. Leftists scorn the attachment of a people to its national territory, defending instead an alleged right of everyone to live where he wishes, regardless of historical circumstance. Those on the Right reject such nonsense, emphasizing, with Taine, la race, le milieu, le moment.

But in this dispute between universal and particular, Strauss took the side of the Left. He had little use for Edmund Burke and the German Romantic conservatives of the nineteenth century. We must, Strauss argued, guard ourselves against the “waves of modernity” that followed the American Revolution. In Gottfried’s summary:

“These waves were due to the value-relativist British counterrevolutionary Edmund Burke and to various nineteenth-century German romantic worshippers of History, some of whom are mistaken for ‘conservatives’.”

Gottfried must confront an objection to his interpretation of Strauss. If in fact Strauss cloaked his liberal democratic beliefs in rhetoric redolent of the ancients, would not conservatives have eventually discovered the ruse and abandoned him?

Kendall and his fellow Catholic conservatives have long since departed the scene. There are today a few Catholics, like Daniel Mahoney and Pierre Manent, influenced by Strauss, but they are not Straussians of the strict observance. Why would the conservatives of today embrace a false friend?

Gottfried has an ingenious response to this problem. The neoconservatives, he says, exercise immense influence over the American Right because of their control of so many foundations, journals and newspapers. They are in fact pseudo-conservatives, who, just like Strauss, preach liberal democracy disguised as the wisdom of the ancients and the American Founders. It is in their interest to elevate Strauss as a conservative sage, and they have achieved great success in doing so.

The neoconservatives in particular appeal to Strauss to support one of their key doctrines: a foreign policy for America based on the spread of “democracy” worldwide. Gottfried writes:

“Straussians contributed to the process by which the conservative movement came to redefine itself during the Cold War as the defender of ‘democratic values’. . .a bellicose missionary  spirit is very much in evidence, but it is doubtful that one could link it to anything identifiably right-wing. “

 Gottfried calls attention to another theme that neoconservatives draw from Strauss: the alleged dangers that stem from German nationalism and German philosophy. In one revealing comment, Strauss wrote: “All profound German longings… all those longings for the origins or, negatively expressed, all German dissatisfaction with modernity pointed   toward a third Reich, for Germany was to be the core even  of Nietzsche’s Europe ruling the planet.”

Gottfried finds “a major concern among Strauss’s students, namely that the specifically German path toward a viciously anti-Semitic form of fascism must never again be taken in Germany or anywhere else.” (p.58)

Gottfried argues strongly that Strauss does not belong on the Right. But he must confront yet another objection. If Strauss was not a conservative but rather a liberal democrat, why do so many of his critics take him to be a rightwing elitist, if not an outright fascist?

Here once again Gottfried blames the neoconservatives and their concerted influence. He bring to the fore Shadia Drury, who views Strauss as an immensely learned scholar but dangerous anti-democrat, and other leftist critics like her. He writes:

“Such critics have reinforced the image that the Straussians have cultivated for themselves, as patriotic Americans with vast humanistic learning.  And the Straussians have returned the favor by showering attention on their preferred critics.”

In doing so, the Straussians ignore, because they cannot answer, the most cogent criticisms of their Master: those that stem from the genuine Right. As Gottfried puts it:

“Significantly, Spinoza expert Brayton Polka, American religious historian Barry Allen Shain, and linguistic philosopher David Gordon have all devoted many pages of criticism to the defects of the Straussian interpretive grid, without eliciting appropriate responses. Basic to these criticisms is the contention that the Straussians misinterpret the historical past either by ignoring it or by refusing to notice the religious aspects of what they style ‘modernity’”

Gottfried has omitted one of the most penetrating of Strauss’s assailants—himself. In a brilliant passage, he challenges Strauss’s key claim that political philosophy is the most fundamental branch of philosophy:

“It seems that Strauss is providing a somewhat personal view of ‘philosophy.’ He does not deem as more than incidental to his inquiry those metaphysical aspects of classical philosophy that mattered to Plato and Aristotle; nor does Strauss attach to his ‘political philosophy’ the epistemic assumptions that mark Plato’s discussion of the Good, the Just, and the Prudent.”

Leo Strauss and the Conservative Movement in America: A Critical Appraisal is far and away the best critical examination of Strauss we have. It is no diatribe: Gottfried is fully appreciative of Strauss’s merits as a scholar and thinker. But he makes unmistakably clear, however, that Strauss was not a man of the Right. 

 

John Venn (Email him) says he is “a student of the passing scene”

jeudi, 09 février 2012

De oligarchie

De oligarchie

door Georges FELTIN-TRACOL

9782717860429FS.gif« De westerse politieke systemen hebben zich dermate perfect georganiseerd, dat ze niet in vraag gesteld kunnen worden door het volk. Uiteraard kan de politieke klasse een stembusgang verliezen. Maar in dat geval worden ze vervangen door gelijkaardige creaturen wier beleid nooit veel verschilt van dat van hun voorgangers (p. 16). » Deze harde vaststelling werd geformuleerd door Yvan Blot in zijn nieuw werk dat luistert naar de veelzeggende titel L’oligarchie au pouvoir. Deze hoge ambtenaar – hij is inspecteur-generaal van de administratie van het Ministerie van Binnenlandse zaken – en voormalige volksvertegenwoordiger (eerst was hij tussen 1986 en 1988 voor het RPR volksvertegenwoordiger van Pas-de-Calais, daarna tussen 1989 en 1999 Europees volksvertegenwoordiger voor het FN), is zich bewust van het fundamentele belang van de strijd der ideeën. Hij stond trouwens mee aan de wieg en aan het hoofd van de Club de l’Horloge en leidt momenteel de vereniging Agir, die zich inzet voor de directe democratie.


L’oligarchie au pouvoir is het resultaat van een groot aantal onderzoeksresultaten, die sinds vele jaren werden bijeengebracht. Als fervent voorstander van het referendumsysteem van volksinitiatieven plaatste Yvan Blot nogal wat vraagtekens bij de terughoudendheid van politici ten aanzien van dit middel om de burgers te laten deelnemen aan openbare aangelegenheden. Doorheen zijn zoektocht naar de redenen van hun terughoudendheid heeft hij het bestaan van een oligarchisch systeem blootgelegd, dat ook wel eens “hyperklasse” of “Franse nomenklatoera” wordt genoemd. « Wij leven in een oligarchie onder het mom van een democratie die “representatief” genoemd wordt. Deze oligarchieën zijn de burgerlijke overheid (de beruchte « technocraten »), de media, de vakbondsleiders, de leiders van culturele en religieuze lobbygroepen, die machtige, interagerende netwerken vormen tegenover wie de gewone burger machteloos staat (met uitzondering van de directe democratie) (pp. 13 – 14). » Hij had er kunnen aan toevoegen dat deze Franse oligarchie haar eigen smaak en biotoop heeft: men kan haar bijvoorbeeld elke laatste woensdag van de maand ontmoeten in de buurt van de place de la Concorde, waar de beruchte clubavondjes van Le Siècle plaatsvinden, die zo treffend beschreven werden door de onvermoeibare dissidente journalist Emmanuel Ratier (1).


Zeker, « de term oligarch wordt tegenwoordig bij voorkeur gebruikt voor de rijke zakenmensen die in Rusland sinds de ontbinding van de Sovjetbureaucratie tegen de politieke macht aanschurken. Maar Rusland heeft zeker geen monopolie op oligarchen. Je vindt hen ook in het westen (p. 1) », meer bepaald in de Verenigde Staten (het federale establishment loopt er vol van) en in Frankrijk. Groot-Brittannië zou er vreemd genoeg van gespaard blijven…in werkelijkheid bestaat de Britse oligarchie wel degelijk, maar haar structuur en samenstelling verschillen van haar evenknieën. In Frankrijk «bestaat de oligarchie niet enkel uit politici. Hoge ambtenaren spelen een hoofdrol in het ontwerpen van wetten, en dit in samenspel met allerlei georganiseerde lobbygroepen, werkgeversorganisaties of vakbonden, en groepen die particuliere belangen verdedigen. De media behouden een zekere mate van controle, aangezien ze het gedrag van de andere oligarchieën denken aan de kaak te stellen, maar ze zijn zelf oligarchisch in hun eigen organisaties (p. 2) ».


Aangedreven als ze worden door convergerende belangen, delen de oligarchieën « een gemeenschappelijke ideologie […] (de « politieke correctheid ») [die] de burgers wil herleiden tot een rol van uitwisselbare toeschouwers, goed om te produceren en te consumeren en voorts onder controle te blijven (p. 2) ». Inderdaad, in tegenstelling tot wat men zou kunnen vermoeden, is de oligarchie wel degelijk in staat tot enig denkwerk. In navolging van Aristoteles, Heidegger en Arnold Gehlen, heeft Yvan Blot een denkschema ontwikkeld dat voortvloeit uit de aristotelische logica der vier oorzaken (motorisch, materieel, formeel en finaal) en die hem aan de heideggeriaanse Quadriparti herinnert (de mensen, de aarde, de lucht en de Goddelijkheid/de Goden). Daaruit volgt dat hij van mening is dat « de oligarchie in de moderne wereld regeert volgens een nieuwe logica, deze van het Gestell, van de utilitaire inspectie, naar de woorden van Heidegger (p. 21) ». Deze inspectie leidt tot de materiële en morele verminking van de wereld, draagt bij tot de algemene onverschilligheid en begunstigt « een culturele chaos zonder geheugen » (p. 42). Ze drukt tevens een duidelijke voorliefde voor de korte termijn en voor de onmiddellijkheid uit. De gevolgen voor de Europese samenlevingen zijn ronduit dramatisch, met een dalend geboortecijfer en zijn verwerpelijk uitvloeisel, de bevolkingsinvasie van buiten Europa.


« De economie, die de neiging heeft om de noden van de consumenten te vermenigvuldigen en er geld uit te slaan is het domein van de verstrooiing en de futiliteit (p. 63). » Waarom? Omdat het Systeem, enerzijds, het egalitarisme aanmoedigt, dat « verdedigd wordt door oligarchieën die zich onmiddellijk boven het volk plaatsen met de bijgaande privileges, inclusief de voorrechten (p. 34) » en dat, anderzijds, “de mens […] enkel gewaardeerd wordt omwille van zijn economisch nut. […] alles wat de menselijke wezens van elkaar doet verschillen moet uit de weg geruimd worden, aangezien dit de verwisselbare aard kan hinderen, die de mensen moet kenmerken om perfecte primaire materie te kunnen zijn (p. 24) ». De oligarchie en haar media, die in de geesten geleidelijk en op subtiele wijze een schadelijke censuur en een arglistige propaganda verspreiden, rechtvaardigen dit ontmenselijkende en utilitaire discours door het obligate bewieroken van de Vooruitgang, van het « governance », van het egalitarisme en van het dogma van de mensenrechten. Als ijverige lezer van de liberale en libertaire theoretici verkiest Yvan Blot, net zoals Hayek, de “fundamentele vrijheden” boven het vage concept van de mensenrechten, die in de werkelijkheid « een voorwendsel voor een steeds grotere inmenging vanwege de Staat en voor een inperking van de vrijheden vormen (p. 71) ». Hij voegt er zelfs terecht aan toe dat “de notie van het “mensenrecht” zowel unilateraal als vaag van karakter blijft. Unilateraal, aangezien er geen rechten zonder plichten zijn; vaag, omdat men nooit weet of dit begrip slaat op vrijheden of op invorderingsrechten jegens de samenleving. In de praktijk wordt de notie van de mensenrechten als wapen tegen de Staat en tegen de samenleving gebruikt om te voldoen aan de capriolen van het ego dat tot een ware afgod is verworden (p. 73) ».


De vier belangrijkste ijkpunten van de oligarchie blijven de techniek (of haar essentie, zijnde de berekenende rede), de massa’s (de ochlos), het geld en het ego. Op die manier “werkt zij mee aan het verval van transcendente waarden, en wordt het geld stilaan de allerhoogste waarde (p. 27) ». Een opgeblazen ego vermorzelt de burger! « Hoe meer de burgers geïsoleerd worden door hun egoïsme, des te ongevaarlijker ze worden voor de oligarchie. Het regime veroordeelt de minste afwijking van het discours als zijnde discriminerend, maar toont zich extreem tolerant tegenover pornografie. Hoe meer het individu zich opsluit in het onmiddellijke genot […], des te minder mengt hij zich in de staatszaken (pp. 37 – 38) », schrijft hij als antwoord op die graag vooruitlopende auteurs die  samenlevingen uitvinden waarin elke vorm van seksualiteit verboden is… .


Wat valt er te doen? Moeten we ons engageren in politieke partijen en geleidelijk aan de bestaande oligarchie afmaken? Yvan Blot heeft daar zo z’n twijfels over. Hij stelt « een afglijden van democratieën in de richting van oligarchische machtsvormen (p. 1) » vast. « Wij leven […] in een « fictieve democratie », waarin de rechten van het volk onderworpen zijn aan de goodwill van de politieke klasse die er de grenzen en de toepassing van bepaalt, en dit op soevereine wijze. De façadedemocratie verbergt de echte machten van een oligarchie, de « politieke klasse », die zichzelf rekruteert door coöptatie in de schoot van de politieke partijen (p. 19). » Uit eigen ervaring stelt hij vast dat “de politici de beslissingen nemen die hen goed uitkomen en ze worden beïnvloed, om niet te zeggen gecorrumpeerd, door minoritaire, maar goed georganiseerde lobbygroepen (p. 6) ». Bovendien « worden de kandidaten vooraf geselecteerd door de politieke partijen. Het volk stemt in feite voor partijen en het zijn de partijen die besturen, en bovendien zijn hun interne structuren vaak verre van democratisch (de partijen zijn oligarchisch van aard) (p. 6) ». Bovenop de oligarchie krijgen we dus de particratie! Deze situatie ontkracht ten volle de – dwaze – theorie van de scheiding der machten, die Montesquieu zo dierbaar was. « In werkelijkheid ligt de wetgevende macht grotendeels in de handen van de uitvoerende macht, die aan de basis ligt van de wetten en die deze laat opstellen door de overheidsdiensten (p. 11). » Erger nog, « de tweede macht van het parlement, het toezicht op de regering, functioneert niet echt, omdat de parlementaire meerderheid horig is aan de uitvoerende macht en de oppositie machteloos, want in de minderheid (p. 74) ». In de partijen heerst absolute kadaverdiscipline, aangezien deze er regelmatig mee dreigen de weerbarstige parlementsleden in de toekomst geen verkiesbare plaats meer te geven! Kortom, het zijn de meest slaafse, onderdanige en schaapachtige sujetten die de parlementen bevolken… .

De institutionele ontsporing beperkt zich niet tot de wetgevende macht. « De rechterlijke macht, die daarin een in wezen Amerikaanse tendens volgt, knabbelt meer en meer aan de wetgevende macht (2), waardoor er uiteindelijk geen scheiding der machten meer bestaat (p. 2). » Voortaan, « is de regering de belangrijkste initatiefnemer van wetten. Zij wordt op haar beurt beïnvloed door de overheidsdiensten, de media en door alle georganiseerde economische, sociale, culturele en religieuze belangengroeperingen, die rondom haar cirkelen (pp. 11 – 12) ». Tegenover deze non-democratie plaatst de auteur het Zwitserse voorbeeld en stelt hij voor om verschillende referendumprocedures in te voeren om wetten aan te nemen of te verwerpen.


Voor Yvan Blot staat het vast dat enkel de directe democratie in staat is om het Gestell af te schaffen en de zin voor democratie, burgerzin en patriottisme te reactiveren. « De democratie berust op nationale wortels, transcendente morele waarden en een zin voor het Heilige […en] berust op het concept van de verantwoordelijke burger die zich wil inschakelen in de lotsgemeenschap van zijn vaderland (p. 29) ». Indien « de natie de sokkel is waarop de mens […] gaat wonen (p. 121) », dan herbergt de natie twee heilige instellingen in haar schoot: het gezin, dat de geboortecyclus garandeert, en het leger, dat « de dood beheert (p. 123) ». Het invoeren van een participatieve democratie impliceert evenwel voor het voorgaande dat men zijn identiteit terugvindt, « die gebaseerd is op het geheugen (p. 69) ». Bijgevolg « vernietigt men de identiteit van een volk, wanneer men zijn geheugen vernietigt. In zekere zin kan men in dat geval spreken van een culturele genocide (p. 69) ». Brengt de directe democratie soelaas voor de volksidentiteiten? Laat ons het antwoord op deze primordiale vraagstelling ontdekken in een volgend essay dat specifiek aan de referendumdemocratie gewijd zal zijn.


Georges Feltin-Tracol

Voetnoten
1 : Emmanuel Ratier, Au cœur du pouvoir. Enquête sur le club le plus puissant de France, Paris, Facta, 2011.
2 : Wanneer hij heeft over de rechterlijke macht, begaat Yvan Blot een kleine fout, aangezien de Grondwet van 1958 spreekt in termen van « rechterlijk gezag ». In de logica van zijn opstellers geniet de – niet verkozen – magistratuur niet dezelfde legitimiteit als de uitvoerende en de wetgevende macht, die uitgaan van de soevereine volkswil.


• Yvan Blot, L’oligarchie au pouvoir, Paris, Économica, 2011, 144 p., 19 €.

mercredi, 08 février 2012

The communitarian critique of liberalism left and right

The communitarian critique of liberalism left and right

by Graham Lister

Ex: http://majorityrights.com/

For the philosophical communitarian, the Sartrean cogito, spontaneously reinventing itself ex nihilo, permanently free to choose and revise its definition of the good, is a fiction that pervades all modern liberalism. From Hobbes, Locke and Kant, through to Mill and Rawls, the rootless, solitary and “unencumbered self”, as Michael Sandel describes it, prior to and independent of its ends and rationally deliberating on the value of its voluntary attachments, is adopted as the starting point of social analysis.

This conception of the subject, it is argued, precludes from the start the possibility of genuinely communal forms of association, of “constitutive” communities “bound by moral ties antecedent to choice”. This is why communitarians stress the cultural constitution of the subject, the way the individual forms his or her identity, sense of self, and intuitive system of values by inheriting and passing on an unchosen legacy of collective orientations, shared meanings and standards, networks of kinship and pre-contractual forms of solidarity which are a prerequisite for, rather than the outcome of, the subject’s capacity for moral commitment.

Rising discontinuity is accompanied by the diversity of visible cultures and lifestyles. This is promoted by the density of urban populations, high social mobility and change, unprecedented choice for the individual consumer - albeit at the potential cost of a rapid decline in the overall diversity of our natural stocks - and the impact of transport and communications technology, especially on the tourist industry. Exposure to different forms of life, particularly those that are too exclusive or stylized to permit participatory understanding by outsiders, inevitably creates a sense of cultural relativism. Where ethnic, class, national and religious traditions do intermingle and combine, discrete cultural narratives are severed or reinvented, and hybrid cultural forms emerge which lack historical precedent, thus weakening the constitutive bonds between generations.

There is also the well-documented impact of the mass media, another factor which has served to heighten many of the trends already noted. The entertainment media have encouraged the privatization of society and the decline of face-to-face interaction through which communal narratives are reaffirmed and passed on. The proliferation of sophisticated images has blurred the boundaries between the real and the imaginary and saturated social life with ubiquitous representations of novelty and difference, representations which typically incorporate easily identifiable elements of ordinary life and recycle them in impossibly exotic, erotic, and alluringly faultless images. Moral and cultural relativism reflects the success with which the media has, by providing simulated substitutes for human interaction, made us wide-eyed strangers to those lives and cultures whose basic elements - from the mundane aspects of work and play, to the feelings and puzzles which human existence gives rise to - we all share in common.

At the same time, our insatiable appetite for remote and alien experience has attenuated our capacity to recover something of the child’s original wonder at the everyday world, to yield to a curiosity for the most familiar aspects of our surroundings, to find joy in the simple passage of the seasons, to marvel at the growth of children, to renew our affections and attachments without the aid of imported novelty and change.

Today’s “imaginative hedonism”, this limitless and self-gratifying appetite for rootless novelty and conquest which seems so hostile to our need to re-establish an ethic of self-limitation, is not a “postmodern” phenomenon, as is largely assumed, but is better described as a characteristic of “hyper-modernity”, in which society has failed to steer the emancipatory dynamic of modernity towards a political end. Daniel Bell saw it as a radical extension of the trends in modernist culture itself, reinforced by the hedonistic compensatory mechanisms of organized capitalism. Christopher Lasch believed its origins lie in our failure to achieve psychological individuation, a process demanding that we repudiate our memories of pre-natal bliss and find connections with a world that is independent of our wishes yet responsive to our needs. Robert Bellah and his colleagues identified the clear emergence of this “expressive individualism” in nineteenth-century America, contrasting it with a scientific culture of utilitarian calculation to which it was both a reaction and a complement. And with greater precision, Colin Campbell has located the religious source of the consumerist outlook in the Pietist strand of the same Protestant ethic that helped generate the entrepreneurial spirit of capitalism.

For the philosophical communitarians, then, it is the cultural and historical heritage of individuals, their identities as “bearers of a tradition”, which provides the moral particularity essential for an authentic life. In MacIntyre’s account, it is the roles and attachments of one’s family, one’s profession, one’s city or nation, which incur “a variety of debts, inheritances, rightful expectations and obligations” that “constitute the given of my life, my moral starting point”.

This theme is taken up by Sandel, who rejects what he refers to as liberalism’s depiction of a “deontological” self whose identity is never tied to its aims or attachments. He writes:

“We cannot regard ourselves as independent in this way without great cost to those loyalties and convictions whose moral force consists partly in the fact that living by them is inseparable from understanding ourselves as the particular persons we are.

... Allegiances such as these … go beyond the obligations I voluntarily incur and the ‘natural duties’ I owe to human beings as such. They allow that to some I owe more than justice requires or even permits, not by reason of agreements I have made but instead in virtue of those more or less enduring attachments and commitments which taken together partly define the person I am”.

A person without such constitutive attachments, Sandel continues, would be lacking in moral character and depth:

“For to have character is to know that I move in a history I neither summon nor command, which carries consequences none the less for my choices and conduct. It draws me closer to some and more distant from others; it makes some aims more appropriate, others less so”.

The “deontological self” which is the starting point to liberal contract theory is, by contrast, a self so bereft of character that it is incapable of self-knowledge, and therefore self-direction. Being “unencumbered” by its conception of the good, having no attributes and aims other than those it has voluntarily chosen, its enquiry into its own motives and ends “can only be an exercise in arbitrariness”. Sandel’s belief that “some relative fixity of character appears essential to prevent the lapse into arbitrariness which the deontological self is unable to avoid”, is shared by MacIntyre, who sees the work of Sartre as the epitome of this liberal individualism. Should we follow MacIntyre and dispense with Sartre’s existentialism for depicting “a self that can have no history”, that is “entirely distinct from any particular social role which it may happen to assume”, and that creates a human life “composed of discrete actions which lead nowhere, which have no order”?

Comments, thoughts, reactions?

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dimanche, 05 février 2012

Presencia de Gaston Bouthoul en la Argentina

Ex: http://disenso.org/
Presencia de Gaston Bouthoul en la Argentina

 

Por Horacio Cagni*

9782228883627.jpgEn su prólogo a la edición española del Tratado de Polemología de Gaston BouthoulEnrique Jarnés Bergua, señala que esta obra no tenía una primera edición en 1951. “Entonces tenía otro título: Las Guerras y un subtítulo Elementos dePolemología. Este libro fue traducido al español. El que ahora consideramos es una nueva edición de aquél, puesta al día, publicada por Payot en 1970, cuando Bouthoul había podido apreciar ya un crecimiento y una proliferación de su semilla.” 2

Efectivamente, temprano, en la década del cincuenta, la obra más significativa del polemólogo francés había sido publicada, en dos volúmenes, por la editorial del ejército argentino.La obra es la misma, pero faltan, en la edición sudamericana, la décima parte -“Problemática, desarrollo e investigaciones en la polemología”- y las Conclusiones -“Obstáculos, opciones metodológicas. Investigaciones. Métodos y programas. Investigaciones y logros”- más el Indice de Nombres (capítulo único). Sin duda, por ser antecesora en el tiempo a la edición definitiva de Payot de 1970.

No es casual que la obra de Bouthoul haya sido editada oportunamente por el Círculo Militar argentino. Esta publicación fue fundada en 1918 por iniciativa del General de División D. Rodolfo Martínez Pita, y hasta el presente difundió la obra de los mayores expertos nacionales y extranjeros sobre la ciencia militar, memorias, manuales de instrucción, de táctica y estrategia, incluso temas de historia militar y de relaciones internacionales. Autores muy conocidos, no sólo de las grandes potencias beligerantes en ambas guerras mundiales, sino protagonistas menores, tuvieron acogida en esta editorial. Los viejos ejemplares de los clásicos del arte militar aún son buscados por los especialistas.

En su prólogo a la edición argentina, el traductor Manrique Mom reconoce que hacía tiempo que los militares argentinos insistían, con profusión de argumentos, sobre la necesidad del profesional de superar en sus estudios los límites de la ciencia militar propiamente dicha, y así aumentar el panorama intelectual, captando y comprendiendo

en amplitud los problemas que hacen a su función específica. La obra de Bouthoul vendría a conjurar esa inquietud, al abordar la guerra como fenómeno social por excelencia, obligando a la comprensión de diversas disciplinas y modos de abordaje de una problemática tan compleja.4

En realidad, la fama y peso del Tratado de Polemología -o Las Guerras- ha obrado en detrimento de otros aportes excelentes de Bouthoul, de modo que éste pareciera ser autor de un solo libro. No obstante, en la Argentina sólo ha tenido peso esta obra, y a ella debemos referirnos específicamente.

Si el esfuerzo editorial de publicar el voluminoso tratado de Bouthoul en Argentina fue grande, más difícil es considerar su impacto. La polemología, en primer lugar, pretende ser una ciencia: “el estudio científico de la guerra, la paz y los conflictos, esclarecer el entorno sociológico de las actividades de paz y su salvaguardia. De los fenómenos conflictivos del pasado y del presente estudia la naturaleza y morfología, la localización en el tiempo y el espacio, la periodicidad, la intensidad, las causas, el encadenamiento y las funciones, la tipología….busca analizar las causas estructurales (demográficas, económicas, geográficas, mentales) que engendran la agresividad colectiva…cuidándose de tomar partido, de llevar los juicios de orden sicológico y moral sobre las responsabilidades de alguno de los dos campos, de dar toda la razón a uno y ninguna al otro, sabiendo que los argumentos son siempre subjetivos, falaces e interesados…”.5

La obra de Bouthoul aparece en la Argentina en un momento clave en la formación intelectual de los oficiales de su ejército. Se trata de la influencia de la llamada “escuela francesa”, en detrimento de la estadounidense, protagonista principal en Occidente de la “Guerra Fría”. La formación del ejército argentino, tanto en los aspectos tácticos y de estrategia, como en la historia militar, había sido mayormente alemana -más específicamente prusiana- desde principios del S. XX hasta la Segunda Guerra Mundial, pero cada vez más matizada de ingredientes franceses, italianos y anglosajones. El desenlace llevó a la entronización creciente de la influencia de los Estados Unidos. Pero el proceso de descolonización, con las operaciones de guerrilla y contraguerrilla que le acompañaron, ubicó a las enseñanzas de la “escuela francesa” como principal protagonista.

Precisamente en 1957 se inician en el Ejército argentino los estudios sobre la guerra revolucionaria comunista, con asesoramiento de oficiales franceses, en base a las experiencias recogidas en Indochina y Argelia. Esta doctrina de guerra se denominará “guerra antisubversiva” o “guerra revolucionaria”, a diferencia de los demás ejércitos latinoamericanos, que la denominan “guerra de contrainsurgencia”, acorde a los postulados de la Escuela de las Américas.6

La nueva técnica de guerra -que la hace diferir de la guerra de guerrillas tradicional- es la unión entre acciones militares y programa político-social; aquí la población es determinante, como lo es la propaganda y las formas de movilización de la gente. “Como es obvio, los franceses no encuadraban esta guerra como el proceso de descolonización que liberaba a estos pueblos del dominio europeo, sino que consideraban que era parte de la Guerra Fría y una forma de operar de los soviéticos, que dejaban de lado la intervención directa para operar en forma indirecta. Se establece sólidamente el maniqueísmo, que el sistema bipolar propicia como visión de la realidad política internacional….aparece la nueva lógica militar que implementan los franceses: la guerrilla es comunista, y como es irregular se refugia en la población, el enemigo será entonces un “enemigo interno.7

Dado que la demonización del adversario justifica la plena violencia, la tortura para conseguir información, los campos de clandestinos, la desaparición de personas, las iniciativas descentralizadas con dilución de responsabilidad de mando, son todos aspectos de este nuevo tipo de conflicto, con las secuelas bien conocidas por las sociedades de países “periféricos” que hayan pasado por esta situación histórica. Como el “enemigo interior” no es fácilmente identificable, el nuevo tipo de guerra necesita del control de las herramientas del gobierno por el ejército, pues la naturaleza del político es la negociación y la permisividad. La línea amigo-enemigo, en flagrante oposición al apotegma schmittiano, se traslada al interior de la unidad nacional, pues es una línea ideológica, donde todo lo que está con el subversivo es también enemigo.8

Claro está que Bouthoul reconoce el valor de la propaganda, la difamación del enemigo recordando sus crímenes -reales o inventados- recelos, “aspecto repugnante”, etc. Y que, frente a “un adversario cuya cohesión es total, sea por la unanimidad que existe en sus creencias ideológicas, por la certeza que tienen de estar del lado de la buena causa, o por la antipatía que les inspira el enemigo, no hay otro medio que el de sembrar el abatimiento y el temor”.Pero entonces Bouthoul hablaba de belluminter pares; se refiere a unidades políticas concretas en estado de beligerancia.

Al apuntar la relación con el equilibrio demográfico y las guerras, afirma que la mayor belicosidad de Europa a partir de fines del S. XVIII -excedente de población y dignificación del conflicto- puede ser heredada por los Estados Unidos y la Unión Soviética, malgrado sus diferencias. El horizonte del polemólogo se limita al albor de la Guerra Fría y cuando aborda la tipología de las guerras concluye que la última forma es la guerra imperialista.10 Sencillamente, la guerra de contrainsurgencia o antisubversiva no había aparecido en escena en toda su fuerza antes de la década del 50, y el recuerdo de los grandes conflictos mundiales abarcaba el horizonte. Fue Dien-Bien-Phu el shock que provoca la ruptura del paradigma bélico.

Pero entonces, ¿existió una lectura sesgada de Bouthoul en la Argentina con la edición pionera de su principal tratado? El gran polemólogo no abre juicio, establece diagnósticos. La guerra es una institución de la humanidad, un fenómeno social de causas naturales y automáticas, diríamos “fatales”. Tiene una función destructora que puede considerarse connatural al ser humano y hasta necesaria, sin importar señalar si es buena o malo que ocurra, simplemente es. Pero también apunta que la guerra en sí es necesaria porque no se encuentra otra institución pacífica que la sustituya en su “función relajante”, y este es su deseo sincero y formal.

Puede existir un reacomodamiento de la obra de Bouthoul a las exigencias de la nueva guerra antisubversiva, toda vez que esta obra inaugura la creciente influencia de la “escuela francesa” en el ejército argentino? Alguna pista se puede rastrear en quienes más conocieron a Bouthoul, los oficiales traductores del francés para el Círculo Militar de entonces. El Coronel -luego General- Carlos Jorge “Chivo” Rosas tradujo al Mayor Gral. Eahay -Arte de la Guerra Moderna- publicado en francés por la Escuela Superior de Guerra del Ejercito Belga, Bruselas, febrero de 1958. No sólo lo tradujo sino que lo adaptó, ocupando un número entero del órgano de la Escuela Superior de Guerra del

ejército argentino.11 El general Rosas fue uno de los mayores impulsores de la recepción intelectual de los oficiales franceses, pionero en los viajes a la École deGuerre. Subdirector de la Escuela Superior de Guerra argentina en tiempos de Juan D. Perón, en 1966 colaboró activamente con el golpe de Estado del Gral. Juan C. Onganía.

Pero es el traductor de Bouthoul, el coronel Manrique Miguel Mom quien aún más se convirtió en un difusor por aquella época. Sus reflexiones sobre el empleo estratégico de la guerrilla, las características y condiciones que la posibilitan y su modo de accionar, así como la guerrilla en el marco de la estrategia militar -guerrilla enemiga y “propia”- ocuparon varias veces las páginas de la Revista de la Escuela Superior de Guerra. Por ejemplo, la traducción y adaptación de Esta guerra denuestro tiempo, del comandante J. Haggard.12 El coronel Mom señala: “El conflicto mundial en curso no es, pues, ni “ideológico” ni “psicológico”, ni “frío”, ni “tibio”, ni “caliente”. Es la guerra, en la que cada adversario emplea todas sus fuerzas disponibles, violentas y noviolentas, para hacer ceder al otro beligerante, conquistarle u obligarle a renunciar a sus objetivos políticos… ¿Por qué el calificativo de revolucionaria? La guerra es hoy día lo que ha sido siempre. Simplemente, reviste las características y amplitud que le exigen las condiciones del momento”.13 Son palabras de clara influencia bouthoultiana, pero conlleva el viraje hacia, precisamente, las condiciones momentáneas.

La alineación de este pensamiento emergente con las determinantes de la Guerra Fría es evidente. En otro artículo, Mom vuelve a traducir, adaptar y reformular conceptos, párrafos y hasta textos completos de autores del momento.14 “En la guerra revolucionaria comunista -apunta Mom- la población representa a su vez elmedio (el terreno podríamos decir) en donde se libra la lucha, la materialización del objetivo de los dos adversarios, y uno de los principales instrumentos de acción. Tanto para destruir

como para construir, la revolución recurre, cada vez que es necesario, a la militarización de la sociedad revolucionaria.”15

Por supuesto que el apotegma de Bouthoul -la guerra es un homicidio organizado, “la lucha armada y sangrienta entre grupos organizados”- funciona en todo tipo de conflicto. Incluso en la guerra civil global, si entendemos como tal la aplicación del concepto medular de la guerra a una misma unidad de civilización, en este caso planetaria. No obstante, el alcance y los límites de esa lucha entre grupos organizados se presentan en cierto modo difusos en el caso del terrorismo -subversivo y de Estado- y en las “nuevas guerras”, al decir de Mary Kaldor, conflictos étnicos e identitarios, crimen organizado, narcotráfico y narcoterrorismo, tráfico de personas y de especies protegidas, etc. El fenómeno de la globalización ha obligado a la redefinición del concepto de soberanía, toda vez que toda frontera se presenta ambigua y difusa. Precisamente, la reconfiguración territorial, la integración y desintegración de distintas formas políticas, y la secesión y conformación de Estados -como ocurrió en los Balcanes luego de la caída del Muro-, pone sobre el tapete la vigencia de la expresión “guerra civil”. Además, la quiebra del paradigma clausewitziano ha entronizado a la “guerra posmoderna”. “Se trata de una forma de guerra en la que el Estado deja de ser el único decisor respecto de la enemistad y el objetivo político, y aparecen otras unidades políticas competidoras…se pierde la separación moderna de las funciones en la guerra atribuidas al gobierno, el ejército y el pueblo, con la creación de una nueva unidad política, militar y pasional en la figura del partisano y, consiguientemente, las distinciones entre regular e irregular, militar y civil, público y privado, adentro y afuera, se hacen borrosas”.16

 

Si bien la difusión del concepto “guerra civil mundial” se debe a Ernst Nolte, fueron autores como Ernst Jünger y Carl Schmitt quienes lo esbozaron antes. Este conflicto global entre revolución y reacción se da a partir de las revoluciones de 1789 y 1917, la “contraguerra civil” del nazifascismo y la “Guerra Fría”, clausurada con la caída del Muro de Berlín. Hemos apuntado antes que Iberoamérica se convirtió en este proceso, particularmente en el bipolarismo, en campo de batalla de ambas superpotencias y sus agentes regionales. A la sombra de las doctrinas de seguridad nacional y hemisférica, de un lado, y de guerra de liberación, del otro, se mataban entre

hermanos dentro de un mismo país. Si bien dentro de un cuadro más complejo, los militares que iban a la Ecole de Guerre o la Escuela de Panamá y los guerrilleros que se entrenaban en Cuba eran las dos caras de una misma tragedia dialéctica.

En el caso argentino, debemos agregar la debilidad del Estado, es decir la institución que determina el casus belli. La guerra partisana se ejerce dentro de las unidades políticas, es una guerra de enemistad absoluta e ilimitada. Este tipo de conflicto genera la represión total y la represalia, pero en las acciones punitivas de ejércitos en operaciones hay detrás una decisión responsable del mando militar y político. La dictadura argentina se caracterizó por la ausencia de estatalidad, pues admitió la existencia de bandas armadas propias y permitió que las fuerzas armadas y de seguridad actuaran como grupos armados al igual que los partisanos, con absoluta dilución de la responsabilidad política.17

Es decir, los militares argentinos dieron un paso más adelante que sus mentores franceses, pues las atrocidades cometidas por Francia en sus territorios coloniales tenían, en última instancia, un Estado responsable detrás, mientras que las aberraciones de la dictadura argentina eran cometidas dentro del propio país y contra el propio pueblo, donde la estatalidad decisoria era difusa o simplemente no asumida. Bouthoul jamás sostuvo que la guerra pudiera desaparecer como fenómeno humano, y se preguntaba qué otras instituciones sociales podrían reemplazar su función esencial “relajadora”, la eliminación del excedente demográfico. El advenimiento de la era atómica y sus implicancias en las técnicas de destrucción masiva le convencieron de la necesidad urgente de “salvar” la guerra convencional, hasta el reemplazo de este estado patológico social por algún sustituto válido, tal como lo planteó en Sauver la guerre (1962) y que le valió el Premio Internacional de la Paz.18

A la larga, la influencia residual de Bouthoul en la Argentina se ha mantenido, con altibajos, merced al conocimiento temprano de su obra capital. Y ello a pesar de las

 políticas de desmilitarización que acompañó al retorno de la democracia en algunos países iberoamericanos, luego de la desgraciada experiencia de las dictaduras militares. La cátedra de Defensa Nacional de la Escuela Nacional de Defensa de la Argentina tiene a Las Guerras como bibliografía básica, al lado de las obras de Clausewitz, Raymond Aron y Jean Guitton.19 La cátedra de Relaciones Internacionales de la Facultad de Ciencia Política de la Universidad del Salvador también tiene esta obra en su bibliografía obligatoria. Dentro del material de estudio actualmente disponible para los oficiales de Estado Mayor del ejército argentino, figura una enjundiosa obra de un autor paraguayo - graduado en la Escuela Militar de Asunción- que constituye un inestimable manual dedicado a la exégesis de notables teóricos y expertos en la temática de la guerra. Al lado de nombres como Clausewitz, John Fuller y Basil Liddel Hart, entre otros, un capítulo se ocupa de Gastón Bouthoul.20

El coronel Cáceres hace una prolija exégesis de la obra máxima del polemólogo francés, parte por parte, de un modo tan claro que prácticamente la resume. No obstante, añade de continuo algunas observaciones breves, propias y de otros clásicos. Reconoce que emprender el estudio del fenómeno guerra sólo desde el punto de vista militar es una falacia. “Es una obra -el Tratado de Polemología- destinada a realizar el estudio objetivo de los conflictos bélicos, diferenciándose de aquellas que analizan la guerra desde un punto de vista estrictamente militar, tal como generalmente se hace en las academias de las fuerzas armadas y en los estados mayores”. Y a veces añade datos ilustrativos interesantes, como cuando retoma a John Fuller, quien después del segundo conflicto mundial sostuvo: “son las armas, una vez descubierto cuáles son las mas convenientes, las que en un 99% obtienen la victoria…la estrategia, el comando, los jefes, el valor, la disciplina, el abastecimiento, la organización y todo el bagaje moral y psíquico no significan nada ante una gran superioridad del armamento…a lo más forman el 1% restante.”21

A pesar de la relativa indiferencia de las nuevas promociones de oficiales y catedráticos de demografía, ciencia política y relaciones internacionales -un aspecto en relación a la obra de Bouthoul bastante generalizado y no circunscripto a algún país en particular-, está siendo reivindicado por algunos especialistas, particularmente después del 11 de septiembre de 2001 y en relación con la “guerra global antiterrorista”.

El general (R) Heriberto J. Auel, del ejército argentino, es actualmente un gran defensor y propagador del pensamiento de Bouthoul, adaptado -quizá un poco forzadamente- a los nuevos tiempos. Reivindica del polemólogo francés el concepto de guerra como “transición acelerada”, “portal de casi todas las nuevas civilizaciones” y “sanción de supremacía, por un tiempo, de un tipo de sociedad a la cabeza de la humanidad”. Considera descripta en esos ítems la causa profunda de la “Guerra Mundial Antiterrorista” en acto, que el “crimen organizado internacional” y sus asociados regionales iniciaron el 11 de setiembre de 2001.

Emparenta a Bouthoul con el documento del gobierno de EE.UU. titulado “Laestrategia nacional para combatir el terrorismo”, del 14/2/2003, que señala: “El enemigo no es una sola persona. No es un régimen político único. Por cierto, no es una religión. El enemigo es el terrorismo: la violencia premeditada, políticamente motivada, perpetrada contra objetivos no combatientes por grupos subnacionales o agentes clandestinos… La Estrategia de Seguridad Nacional previene los ataques terroristas dentro de EE.UU.….y se concentra en identificar y desactivar las amenazas antes que lleguen a nuestras fronteras.”22 Es una clara alusión a la “guerra preventiva”.

En un seminario en Madrid23, Auel reivindica a Bouthoul, quien en 1971 sostenía: “porqué la guerra, que hace más victimas ella sola que todas las calamidades juntas, no ha sugerido la creación, hasta el presente, del más mínimo Instituto de Investigaciones?” El general argentino es presidente del Instituto de Estudios Estratégicos de Buenos Aires, que ha desarrollado una activa labor polemológica, si bien los intentos de establecer una carrera de grado -y un postgrado a distancia- en una universidad privada hasta ahora no han sido satisfactorios. En una conferencia en el COFA -Círculo de Oficiales de las Fuerzas Armadas- en Buenos Aires, Auel insiste en que el S. XXI se presenta como altamente conflictivo,

donde el terrorismo postindustrial actúa en una “guerra asimétrica” (células dispersas en red), siempre haciendo mención de la vigencia de Bouthoul.24 La Argentina -sostiene- no está a la altura de una defensa nacional y regional, pues con la “modernización” de sus Fuerzas Armadas, a partir de 1988 se anuló todo planteamiento estratégico. Las F.F.A.A. argentinas fueron reducidas a un mero rol de policía militar en el exterior, al servicio de organismos internacionales. No sólo integran los Cascos Azules de las Naciones Unidas en diversas “operaciones de paz”, también conforman -desde la presidencia de Carlos S. Menem en los noventa del recientemente pasado siglo- los Cascos Blancos, de ayuda humanitaria. Si bien es una tendencia global y epocal, la previsión ante probables amenazas y agresiones estratégicas -insiste Auel- “han quedado en manos de nadie”.

Para Auel, estamos en la etapa de la transición de la civilización industrial a la postindustrial y -acorde a Bouthoul- entraríamos al portal donde el orbe globalizado vive el proceso de su condigna “guerra mundial”. Lo emparenta con Jean Baudrillard - El espíritu del terrorismo- quien señala que esta guerra mundial no es la tercera sino la cuarta y única verdadera, donde está en juego la globalización misma. La primera puso fin al colonialismo y al eurocentrismo, la segunda a los fascismos desafiantes, la tercera a la Guerra Fría y al comunismo. La cuarta enfrenta al orden mundial como hegemon. Para el compatriota de Bouthoul, si el Islam dominara el mundo, el terrorismo se levantaría en su contra.

Pero Bouthoul -sostiene Auel- ha contabilizado doce guerras mundiales en los últimos cinco siglos, y son tales porque está en juego la disputa por el poder imperial, no por su extensión.25 Claro está que asistimos, actualmente, a un conflicto planetario; es absurdo suponer que la globalización no traería consigo globalizar también la disidencia violenta. El terrorismo se ha desterritorializado y puede contar con armas sofisticadas, incluso de destrucción masiva, dado que la tecnología no tiene ideología y el fin del bipolarismo favoreció la dispersión de armas sofisticadas sin control real. Sea como fuere, continúa un interesante debate en el cual el polemólogo galo no está ausente. 

*Politólogo especializado en Relaciones Internacionales. Ensayista.

NOTAS

1 Gaston Bouthoul: Tratado de Polemología (Sociología de las Guerras) Ediciones Ejército. Servicio de

Publicaciones del E.M.E. -Payot, Paris- Impreso en España (Fuentebrada) 1984.

2 Id. pg.20.

3 Gaston Bouthoul: Las Guerras. Circulo Militar. Biblioteca del Oficial, Buenos Aires. Tomo I, Vol. 456, diciembre 1956 (Abarca las partes I a V, 453 pgs.) Tomo II, Vol. 457, enero 1957. (Abarca las partes VI a IX, 504 pgs.) Traducción del Teniente Coronel Manrique Miguel Mom del original francés Les Guerres. Eléments de Polemologie. Payot, Paris 1951.

4 PrólogodelTcnel. ManriqueMom,pgs. 17-29 deLasGuerras. Ed. Cit.

5 Gaston Bouthoul - René Carrére: Le defi de la guerre 1740-1974. Presses Universitaries de France, Vendóme 1976. pg. 34

6 Marie-Monique Robin: Escuadrones de la muerte: La escuela francesa. Sudamericana, Buenos Aires

2005, pg. 318

7 Alfredo Mason: Sindicalismo y Dictadura. Una historia poco conocida. Ed. Biblos. Buenos Aires 2007, pg. 43. Este excelente trabajo rastrea todas las influencias lejanas en la doctrina militar argentina que

culminará en el Proceso de Reorganización Nacional, la dictadura de las Fuerzas Armadas Argentinas

entre1976y1983.

8 M.M.Robin: op. cit. pg.80. A. Mason: op. cit. pgs. 46-47

9 GastonBouthoul:LasGuerras. Ed. cit. TomoI,pg.314

10Gaston Bouthoul: Las Guerras. Ed. cit. Tomo II, pgs. 155 y 384-385

11Revista de la Escuela Superior de Guerra. Ejército argentino. Nº 332, Buenos Aires enero-marzo 1959 (205 pgs.)

12 El artículo original en la Revista de Defensa Nacional de Francia. Agosto-setiembre 1958, pgs. 1306-

1319. Mom la completa con otros elementos de juicio, la mayoría franceses, en la Revista de la Escuela

Superior de Guerra. Ejército Argentino Nº 331, octubre-diciembre 1958, pgs 641-664, con el nombre

Guerrarevolucionaria. El conflictomundialendesarrollo.

13RevistadelaEscuelaSuperiordeGuerra.Id.ant. pgs.645y664.

14 Coronel M. M. Mom: “Guerra revolucionaria. Causas, procesos, desarrollo”. Revista de la Escuela Superior de Guerra. Ejército Argentino. Nº 334, julio-setiembre 1959, pgs. 489-515. Hay síntesis comentadas de los siguientes textos, muy significativos, además de las reuniones a las que asistió Mom:

A. Pietlre: “Estudio crítico del marxismo”. Conferencia en 1958 en la Ecole Superieur de Guerre, Francia. Cte. J. Haggard: “La guerra revolucionaria”. Conferencia del 25/3/58, id. anterior.

Cte. J. Haggard: “Apuntes de clases”. Ecole Superieur de Guerre 1958

Revista militar de información (Francia) Nº 280/281/286/289/290/291.

Mao Tsé Tung: Obras escogidas. Tomo I y II. Ediciones Sociales, Paris 1955.

15Id. pgs.505-506.Los subrayadosson delautor.

16 Jorge Giraldo Ramírez: Guerra Civil Posmoderna. Siglo del Hombre Editores-Universidad de

Antioquia. Bogotá 2009, pg. 63

17Horacio Cagni: “La guerra civil mundial y nosotros”. La Nueva Provincia, Bahía Blanca, 11/5/1995, pg. 7. Podemos aventurar, siguiendo el profundo análisis de Bouthoul de los “elementos sicológicos de las guerras”, que muchos represores encuadrados en las FF.AA y de seguridad argentinas -y de otros países iberoamericanos donde hubo dictadura- constituyen el tipo del fanático. Este se deleita con la masacre y entra en un conflicto con la intención de recibir y dispensar martirio. Es una desviación de la conciencia del soldado de ejercer un noble oficio, unida a la exigencia de la mágica reverencia por llevar armas y administrar la muerte, como “privilegio” de una clase dirigente salvífica de la cual se considera una emanación. La sensación de poder omnímodo e ilimitado que esta convicción provee es innegable.

18 Al respecto, Jerónimo Molina: “El polemólogo Gastón Bouthoul”, en Horacio Cagni (comp.):

Conflicto, Tecnología y Sociedad. Universidad Nacional de Lomas de Zamora, Buenos Aires 2009, pg.62.

19 PDGS. Partnership for Democratic Governence and Security. Tittle: Catedra de Defensa Nacional. Escuela Nacional de Defensa de Argentina. www.pdgs.gov.ar

20 Cirilo Cáceres-Carisimo: La Guerra. Macrosíntesis. Para una aproximación multipolar a la fenomenología de los conflictos. 2 volúmenes. Ed. Litocolor, Asunción 1982. En el Volumen I, el capítulo 18 -“Tratado de Sociología. Las Guerras. Elementos de Polemología”- pgs. 243-286, está dedicado a Bouthoul.

21Id. Pgs. 243 y 255. El Gral. Fuller conlleva mucha razón, pero exagera. Quizá estaba muy impresionado por la efectividad de la guerra de material y la doctrina de victoria aplastante de estadounidenses y soviéticos, que habían derrotado en el segundo conflicto mundial a Alemania a pesar de la excelente preparación de sus efectivos y su magnífico armamento.

22 www.harrymagazine.com/lacuestiónmilitar.

23 Universidad Nacional de Educación a Distancia, Madrid. Instituto Universitario “Gral. Gutierrez Mellado”. El Escenario Estratégico Internacional/Seguridad y Defensa en Iberoamérica/Panel 2: “La institucionalidad de seguridad y defensa en Iberoamérica” (ponencia del Gral. Auel) Disponible en Internet.

24 “El nuevo ordenamiento internacional posterior a la intervención de EE.UU. y sus aliados en Irak”. Conferencia en el COFA el 21/5/2003, disponible en Internet.

25 “Las guerras del S. XXI en nuestra Argentina encapsulada”. El Malvinense. 7/2/2010. Disponible en Internet.

samedi, 04 février 2012

Sobre el Popularismo o Populismo

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Sobre el Popularismo o Populismo

 

Por Alberto Buela*

Ex: http://disenso.org/

La politología, una escisión relativamente reciente de la filosofía, ha considerado históricamente al populismo en forma peyorativa. Ya sea otorgándole una connotación negativa, caracterizándolo como una patología política en opinión de Leo Straus o como el enfant perdu(1) de la ciencia política. Se lo ha venido estudiando en forma vergonzante por aquellos que lo han hecho. La más renombrada estudiosa del tema, la inglesa Margaret Canovan sostiene que: “el término populismo se usa comúnmente a modo de diagnóstico de una enfermedad”(2)

El término populismo encierra una polisemia de difícil acceso para los politólogos que por formación y disciplina carecen de los medios suficientes para elucidarla(3). De modo tal que la mayoría de los tratadistas se ocupan de descripciones más o menos sutiles según su capacidad personal. Pero todo ello no va más allá de una sumatoria de características que no llegan a la esencia del fenómeno. Cuenta mucho en cada uno de ellos su experiencia personal y su conformación ideológica. Así, por ejemplo, el diccionario de política más reciente editado en Brasil lo define: Designación que se da a la política puesta en práctica en sentido demagógico especialmente por presidentes y líderes políticos de Sudamérica, los cuales con un aura carismática se presentan como defensores del pueblo. Cumple destacar como ejemplo típico Perón en la Argentina, vinculando a los intereses populares reivindicaciones nacionalistas(4). Definir el populismo a través de la demagogia es, no sólo un error de método, sino una posición política vinculada al universo liberal-socialista clásico.

Los tratados de historia de la ciencia política, multiplicados al por mayor en las últimas décadas anuncian en este ítem, acríticamente, una y otra vez una seguidilla de regímenes al que adscriben el carácter de populistas, habiendo entre ellos, diferencias sustanciales. Así van juntos, los movimientos del siglo XIX, tanto el agrario radical de los Estados Unidos como el intelectual de los narodnichevsto de Rusia. La democracia directa Suiza. Getulio Vargas(1895-1974) y su Estado Novo en Brasil. Perón (1895-1974) y su Comunidad Organizada para Argentina. Gamal Nasser en Egipto. El general Boulanger y luego el mouvement Poujade en Francia. Más próximamente George Wallace en USA y Solidarnosc en Polonia. Nos preguntamos:¿ Todo esto junto, involucrado en un solo concepto, sino es un aquelarre....no se parece bastante?

Pero, ¿Qué ha sucedido últimamente para que la gran mayoría de las revistas sobre ciencia política se ocupen asiduamente del populismo?. En nuestra opinión, éste dejó de ser un fenómeno propio de las naciones periféricas como lo fue en los años posteriores a la segunda guerra mundial para transformarse en un fenómeno europeo. Así la Lega Nord de Humberto Bossi en Italia; el Partido rural de Veikko Vennamo en Finlandia; el Font Nacionale de J.M.Le Pen en Francia; en Bélgica el movimiento flamenco de Vlaams Blok; el suceso de Haider en Austria; el Fremskrittsparti en Dinamarca, Suecia y en Noruega; la Deutsche Volksunion en Alemania; el movimiento socialista panhelénico en Grecia, la Unión Democrática en Suiza son algunos de los movimientos caracterizados como “populistas”por los analistas políticos, siguiendo a los académicos de turno.

La instalación política del populismo en Europa estos últimos años ha obligado a los teóricos a repensar la categoría de populismo con la intención de liberarla de la connotación peyorativa que le otorgaran ellos mismos otrora cuando el fenómeno del populismo se manifestaba en los países periféricos o del tercer mundo, como fueron los casos de Perón, Vargas o Nasser.

Es muy difícil levantar la demonización de una categoría política luego de cincuenta años de ser utilizada en un sentido denigrante y peyorativo. Es por ello que proponemos utilizar un neologismo como popularismo para caracterizar los fenómenos políticos populares.

Rasgos del Popularismo

Estos movimientos consideran al pueblo como: a)fuente principal de inspiración b) término constante de referencia y c) depositario exclusivo de valores positivos.

El pueblo como fuerza regeneradora es el mito más funcional para la lucha por el poder político.

El popularismo excluye la lucha de clases y es fuertemente conciliador. Para él la división no se da entre burgueses contra proletarios sino entre pueblo vs. antipueblo.(ej. descamisados vs. oligarquía en Argentina).

Su discurso es, entonces, antielitista y canaliza la protesta en el seno de la opinión pública en forma de interpelación a los poderes públicos y al discurso dominante.

Su práctica política radica en la movilización de grandes masas que expresan más que un discurso reflexivo, un estado de ánimo. Las multitudinarias concentraciones son el locus del discurso popularista. Los muros y paredes de las ciudades aún no han sido reemplazado por los mass media como vehículo de expresión escrita del discurso interpelativo del popularismo.

Finalmente su vinculación emocional en torno a un líder carismático que en una especie de democracia directa interpreta el sentir de ese pueblo.

Conciliación de clases, discurso interpelativo, movilización popular y líder carismático son los rasgos esenciales del popularismo.

Existe una diferencia sustancial entre los movimientos populares periféricos y los de los países centrales. Estos últimos tienen una tendencia racista ostensible para expulsar de sí a todo aquello que no es verdadero pueblo en tanto que en los países subdesarrollados o dependientes existe en ellos una tendencia a la fusión étnica de los elementos marginales. Acá el pueblo es un modo de ser abierto en tanto que en los países centrales es cerrado. Hoy, el horror al inmigrante es el ejemplo más evidente.

Los popularismos tienen una exigencia fundamental de arraigo o pertenencia a una nación o región determinada, ello hace que por su propia naturaleza se opongan siempre a todo internacionalismo, manifestado hoy bajo el nombre de globalización.

El ejercicio político del plebiscito a través de esa especie de democracia directa que es la movilización popular convocada por un líder carismático con un discurso de protesta al discurso oficial elaborado a partir de lo políticamente correcto, mete en contradicción a los politólogos demócratas que ante la crisis de representatividad política buscan nuevas fórmulas para la alicaída democracia liberal. Pues esto teóricos bien intencionados comprenden, a ojos vista, que son los movimientos populares quienes ejercen la verdadera democracia: aquella donde el gobierno hace lo que el pueblo quiere y no tiene otro interés más que el del pueblo mismo.

Esta contradicción no se puede zanjar con libros ni papers eruditos, se soluciona legalizando lo que legítimamente los pueblos vienen haciendo en busca de su más genuina representación. Y esto supone una “revolución legal” que ningún gobierno occidental, hoy por hoy, está dispuesto a realizar.

* Doctor en filosofía, ensayista y director de Disenso.

NOTAS

1.-Bosc,René: Un enfant perdu de la science politique: le populisme, en “Projet” N°96, junio 1975, pp.627-638.
2.-Canovan, Margaret: Populism, Hartcourt Jovanovich, Nueva York-Londres, 1981, p.300.
3.- Un hombre lúcido como Enrique Oliva se pregunta un tanto ingenuamente ¿Quién, y de mala fe, inventó la palabra populismo como una categoría política criticable, algo relativo a demagogia, autoritarismo, antidemocrático o envilecimiento de masas?. Y la respuesta es: Los centros de producción de sentido, que son quienes manejan las significaciones y hermenéutica de lo que sucede en el mundo. Ellos son la matriz del pensamiento único y políticamente correcto que fundamenta el totalitarismo democrático en que vivimos. 
4.-Galvao de Souza et Alia: Dicionário de Política, T.A.Queiroz Editor, Sao Paulo, 1998, p.427.

 

vendredi, 03 février 2012

Carl Schmitt y el Federalismo

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Carl Schmitt y el Federalismo

Por Luís María Bandieri*

Ex: http://www.disenso.org/

Cuando se trata de abordar la relación que el título de este trabajo propone,  entre nuestro autor y el concepto jurídico-político de federación, aparece de inmediato una dificultad. El federalismo resulta un tema episódico en su obra -un índice temático de la opera omnia schmittiana registraría escasas entradas del término. Más aún, puede sospecharse que se trata, antes que de una presencia restringida y a contraluz, de una ausencia a designio.  Entonces, además de reseñar lo que dice sobre el federalismo, cabría preguntarse, también, el por qué de lo que calla. Schmitt es un autor tan vasto y profundo que, como todos los de su categoría, habla también por sus silencios, dejando una suerte de "escritura invisible" que el investigador no puede desdeñar.

El lector de Schmitt advierte, ante todo, que cuando nuestro autor se refiere al Estado, a la "unidad política" por excelencia, no suele detallar las modalidades de su organización interna y, especialmente, de cómo se articula hacia adentro, funcional o territorialmente, el poder. Autodefinido como último representante del jus publicum europaeum, Schmitt destaca en el Estado su capacidad de lograr la paz interior, sin preguntarse demasiado por cuáles mecanismos se alcanza. Las preguntas iniciales, pues,  podrían ser: formuladas así: ¿cabe el federalismo dentro de la estatalidad clásica, propia de aquel jus publicum y tan cara a Schmitt? ¿Nuestro autor concibió otras formas políticas trascendentes a aquella estatalidad clásica? Si ese ir más allá se dio ¿hubo lugar para el federalismo?

En principio, aunque luego se verá que esta caracterización resulta insuficiente, cuando nos referimos al federalismo, según surge de la literatura jurídica corriente en nuestro país, nos  referimos a una forma particular de articulación territorial del poder. El control de un territorio por el aparato de poder del Estado.

El control de un territorio por parte del Estado puede realizarse fundamentalmente de dos maneras:

  • conun modelo de articulación territorial del poder en que las partesnacen y dependen del todo -el centro-, que posee el monopolio delcontrol.

  • conun modelo de articulación territorial del poder donde el todo -elcentro- nace y depende de las partes, entre las cuales y el centrose reparten dicho control.

El primero es un modelo unitario o centralista. El segundo es el modelo federal o más exactamente “federativo”. La Argentina, por ejempo, es un Estado federativo compuesto por estados provinciales federados. La confederación resulta un procedimiento de articulación territorial del poder donde un cierto número de Estados acepta delegar ciertas competencias a un organismo común supraestatal. Basten, por ahora, estas nociones rudimentales.

Schmitt se forma en un medio jurídico-político donde las ideas de lo federal y confederal   están vivas y presentes. Después de todo, aquéllas toman entidad en la Lotaringia y el Sacro Imperio Romano Germánico, donde se desarrollan aldeas, ciudades y comunas, cada una de ellas con objetivos y alcances propios, sin perjuicio de estar relacionadas con los conjuntos más amplios del reino o el imperio, originándose así la idea de la unidad como una "concordia armoniosa", presente en el pensamiento medieval[1]. Cuando Napoleón derriba al antiguo imperio alemán, comprende que los múltiples principados alemanes no pueden sobrevivir aislados y, para organizar la Mitteleuropa, crea, bajo su protectorado, la Confederación del Rhin (1806-1813), excluída Prusia.. A la caída de Napoleón, se establece la Confederación Germánica (1815-1866), integrada por treinta y ocho  estados soberanos donde se cuentan un Imperio (Austria) y cinco reinos (Prusia, Baviera, Wurtemberg, Sajonia y Hannover). El II Reich alemán se organiza en 1871 como un Estado federal, formado por veinticinco estados federados bajo hegemonía prusiana. El Consejo federal, o Bundesrat, estaba presidido por el rey de Prusia, que llevaba el título de emperador de Alemania y designaba al canciller del Reich. La República de Weimar de 1919, es federal, parlamentaria y democrática, si bien los Länder retenían facultades limitadas. En fin, sean cuales fueren las limitaciones y problemas que manifestaron estas confederaciones y federaciones, lo cierto es que un jurista, en la Alemania de principios del siglo XX, no podía evitar la reflexión inmediata sobre el federalismo[2].

En la vasta obra schmittiana, sólo hay dos textos donde se desarrolla su pensamiento sobre el federalismo. El primero es la "Teoría  de la Constitución", Verfassungslehre, publicada en 1928. La otra, aparecida en 1931, aunque reúne estudios publicados ya en 1929, es "El Guardián de la Constitución", Der Hütter der Verfassung.  Reseñemos lo que ambas dicen sobre nuestro tema.

El primero, "Teoría de la Constitución", es la única obra de Schmitt concebida y desarrollada mediante el formato del tratado jurídico convencional y clásico. Podría pensarse en un desafío de nuestro jurista renano a sus colegas más reconocidos de la época: escribo en igual molde que ustedes, diciendo todo lo contrario de lo que inveteradamente repiten ustedes. Schmitt, que fue, al fin de cuentas, más jurista -más Kronjurist- de la república de Weimar que del Tercer Reich, donde terminó como un outsider, construye esta obra como una empresa de demolición del Estado de derecho, esto es, del tipo de Estado que la constitución weimariana pretendía más adecuadamente reflejar. Ella, sin embargo, lo convierte, paradójicamente, en uno de los mejores y más agudos expositores de los aspectos del  Rechtstaat  en general más descuidados por los análisis habituales[3].

Hasta ese momento, y salvo la opinión de Max von Seydel, sobre la que se apoya nuestro autor, la teoría dominante contraponía la confederación de Estados -Staatenbund- (al modo de la Confederación de 1815) al Estado federal -Bundstaat- (como el II Reich de 1871). Para Schmitt, en cambio, no existen diferencias entre ambas formas.

Para él, "federación [en el sentido amplio y abarcativo señalado] es una unión permanente, basada en libre conveniencia y al servicio del fin común de la autoconservación de todos los miembros, mediante la cual se cambia el total status político de cada uno de los miembros en atención al fin común"[4]. La federación da lugar a un nuevo status jurídico-político de cada miembro. El pacto federal es un pacto interestatal de status con vocación de permanencia (toda federación es concertada para la "eternidad", esto es, para la eternidad relativa de toda forma política, mortal por definición).

Toda federación, según nuestro autor, reposa sobre tres antinomias o contradicciones:

  1. Derechode autoconservación vs. renuncia al ius belli.

  1. Derechode autodeterminación vs. Intervenciones.

  1. Existenciasimultánea, por un lado. de la federación común y, por otro, de los estados miembros.La esencia de la federación reside, pues, en un dualismo de laexistencia política. Tal coexistencia de una unidad políticageneral y de unidades políticas particulares da lugar a unequilibrio difícil.   Se presenta, ante todo,  elproblema de la soberanía: ¿serán soberanos los estados federadosy no la federación? ¿o  la federación  es la únicasoberana y los estados federados carecen de tal atributo?. Se tratade soberanía, es decir, de una decisión (soberano es el que decidesobre el estado de excepción; en este caso, el que decide sobre su propia existencia política o, invirtiendo la fórmula, acerca deque un extraño no decida sobre  su propia existenciapolítica). Si la decisión  es deferida a un tribunaljudicial, éste se tornaría inmediatamente soberano, en otraspalabras, poder político existencial. La respuesta, según nuestroautor, tampoco puede consistir (según la teoría corriente en sutiempo, y vigente entre nuestros constitucionalistas) en ladistinción entre confederación y federación: en la confederación los estados federados son soberanos y en el Estado federal  lasoberanía reside en la federación misma. Ya hemos visto su rechazode  esa distinción, que no tiene en cuenta -afirma - cómosurge una decisión soberana en caso de un conflicto en que esté enjuego la propia existencia de la forma política en cuestión. Enpuridad, dice Schmitt,  conforme aquel criterio  dominanteresulta que la confederación se disuelve siempre en caso deconflicto, y que la federación se resuelve siempre, cuando mediaconflicto, en un Estado unitario. Schmitt, citándolo a través delos escritos de Max von Seydel, se refiere a las doctrinas de JohnCalhoun, que sirvieran a la argumentación  de los confederadossudistas[5].Calhoun no  admitía que, al sancionarse en Norteamérica laconstitución federativa de 1787, los estados federados hubiesenrenunciado a  sus derechos soberanos, los State Rights,anteriores a la federación y en principio ilimitados, salvo lascompetencias  que expresamente se delegaron en la constitución.Calhoun, como Seydel hará suyo, sostiene que una suma decompetencias delegadas no transmite soberanía  al delegado, niimplica renuncia a ella por parte del delegante. Los estadosfederados conservaban, pues, un derechoa la anulación delas leyes y actos federales y, cuando estuviese comprometida suseguridad y existencia, un derechoa la secesión (loque condujo a la guerra civil de 1861-65). Derrotada esa posiciónen  el campo de batalla (a partir de allí anulación ysecesión equivalen a rebelión y sobre las cuestiones entre estadosfederados decide en último término la Corte Suprema) no queda,según Schmitt, refutado por ello el argumento calhouniano. Lo queocurre es que la Constitución como tal ha cambiado su carácter yla federación ha cesado: subsiste tan sólo una autonomíaadministrativa y legislativa de los estados federados; en otraspalabras, una seudofederación.

A continuación, nuestro autor se plantea cómo se diluyen las antinomias que afectan a la federación. La federación supone homogeneidad de todos sus miembros. Para Montesquieu, esta homogeneidad significaba que los federados fueran estados republicanos, es decir, que tuviesen homogeneidad de  organización política. La homogeneidad podría ser, también, de nacionalidad, de religión, de civilización etc. Schmitt parece privilegiar la homogenidad nacional de la población, esto es, para él, la homogeneidad de origen.

Así, la primera antinomia (derecho a la autodefensa y renuncia al ius belli) se diluye porque la homogenidad con los otros federados excluye la la hostilidad entre ellos.

La segunda antinomia (autonomía e intervención) se disuelve porque la voluntaCarl Schmitt y el Federalismo - SILACPOd de autodeterminación se plantea frente a una ingerencia extraña, pero no  resulta extraña la de la propia federación.

La tercera antinomia (dualismo existencial entre federación soberana y estados miembros soberanos) se disuelve porque la homogeneidad excluye el conflicto existencial decisivo. Como las cuestiones de la existencia política pueden presentarse en campos diversos, se da así la posibilidad de que la decisión de una clase de cuestiones tales como, por ejemplo, de la política exterior, competa a la federación y que, por el contrario, la decisión de otras, por ejemplo, mantenimiento de la seguridad y el orden público dentro de un estado federado, quede reservada al propio estado miembro. No se trata de una división de la soberanía, porque en caso de una decisión que afecte a la existencia política como tal, la tomará por entero sea la federación, sea el estado miembro[6]. Donde hay homogeneidad, el caso de conflicto decisivo entre la federación y los estados miembros debe quedar excluída. De otro modo, el pacto federal se convierte en un "seudonegocio jurídico nulo y equívoco"[7].

El traductor español de la obra, Francisco Ayala, apunta en el prólogo, respecto de esta conclusión: "se las ingenia de manera a asegurar que tanto las federaciones como los estados miembros aparezcan al mismo tiempo como unitarios y soberanos". Pero Schmitt, en verdad, está señalando como propio de toda organización federativa la tensión conflictual entre federación y federados, que puede llegar al pico de la situación excepcional y resolverse por decisión soberana de la primera o de los segundos. Las antinomias que están en la base de esa tensión conflictual pueden diluirse, para Schmitt, mientras la homogeneidad que ha llevado al foedus o pacto originario, en cuya virtud ha cambiado el status de los federados, se mantenga. En el momento  en que alguno de los federados sienta su propia existencia amenazada porque aquella homogeneidad se ha roto o no es reconocido como integrándola, entonces, o el foedus se revelará como pacto de origen de un Estado, en el fino fondo, "uno e indivisible", o será quebrado por ejercicio de los derechos de anulación y secesión. En otras palabras, en el primer caso, ante  la situación excepcional, la federación ejerce la soberanía irrenunciable y deviene, en los hechos, un Estado centralizado y, en el segundo, el acto soberano proviene del estado federado, que rompe la federación.  La Ausnahmezustand, la situación o estado de excepción, en ese caso, y cualquiera sea quien protagonice la decisión (federación o estado federado), da lugar al acto soberano y consecuente re-creación de un nuevo orden jurídico[8]. De todos modos, las circunstancias bien apuntadas por Schmitt no significarían una debilidad especial de la federación con respecto a otras formas de articulación territorial del poder. Basta observar el Estado unitario descentralizado italiano o español ("Estado de regiones" o "Estado de las autonomías"), o el caso del Reino Unido de la Gran Bretaña, para advertir la misma tensión existencial entre Estado central y comunidad particular que nuestro autor apunta como meollo antinómico y foco conflictivo de la federación, con situaciones extremas y excepcionales cual el Ulster o el País Vasco. Hasta en Francia, república "una e indivisble" por antonomasia, apunta, sobre otros, el caso inmanejable de Córcega. A tal punto que Raymond Barre, ex primer ministro francés, medio en broma medio en serio, proponía devolvérsela a Génova.

Volvamos a nuestro autor. Nos ha presentado las dificultades mayúsculas y tensiones conflictivas que, a su juicio, aparecen allí donde una federación exista.  Luego aparenta disolverlas acudiendo al recurso de la homogeneidad, especialmente la homogeneidad de origen, la homogeneidad nacional de un pueblo. Pero a continuación, nos plantea una nueva dificultad, en la que aquella homogenidad amenaza destruir la federación. Se trata de una antinomia sobreviniente, que enfrenta a democracia y federalismo.

A mayor democracia, menor esfera propia de los Estados federados. Democracia y federación descansan, ambas, en el supuesto de la homogeneidad. El pensamiento de Schmitt, como se sabe, apunta en este aspecto a separar la noción de democracia de la noción de Estado liberal-burgués. Democracia, para Schmitt, es una forma política que corresponde al principio de identidad entre gobernantes y gobernados, de los que mandan y de los que obedecen, dominadores y dominados, esto es, identidad del pueblo y de la unidad política. Ello por la sustancial igualdad que es su   fundamento y que supone, parejamente, una básica homogeneidad, en el pueblo. Por ello, en el desarrollo de la democracia dentro de una federación, la unidad nacional   homogénea del pueblo transpasará las fronteras políticas de los Estados federados y tenderá a suprimir el equilibrio de la coexistencia de federación y estados federados políticamente independientes, a favor de una unidad común.

Ello conduce a un "Estado federal sin fundamentos federales"[9], como los EE.UU. o la República de Weimar, según nuestro autor. En ellos, la constitución toma elementos de una anterior organzación federal y expresa la decisión de conservarlos, pero el concepto democrático de poder constituyente de todo el pueblo, a juicio de Schmitt, suprime el concepto de federación. Se organiza un complejo sistema de distinción de poderes y descentralización, pero falta el fundamento federativo: hay una unidad política (la unidad política de un pueblo en un Estado) y no una pluralidad de unidades políticas, que es lo que supone la federación propiamente dicha. No existe, apunta Schmitt, un pueblo bávaro, prusiano, hamburgués en la constitución de Weimar: sólo existe el pueblo alemán. Sin embargo, la contradicción entre democracia y federación, donde la consecuencia de la primera, el poder constituyente del pueblo uno y único, socava los fundamentos de la segunda, no parece haber afectado a Suiza, por ejemplo. Una respuesta más afinada nos la dará Schmitt en la segunda obra donde se encuentran referencias al federalismo: Der Hüter der Verfassung.

En ella, sostiene que el presidente es el custodio de la constitución, como poder neutro y super partes. No podría serlo un tribunal judicial o corte constitucional porque, en ese caso, se le trasladaría la decisión soberana, convirtiéndose la Corte Suprema o el Consejo Constitucional en soberanos "legisladores negativos" (la expresión es de Kelsen). Detalla los peligros concretos que acechan a la defensa de la constitución que asigna al presidente del Reich. Por un lado, la existencia de partidos dotados de Weltanschauungen   o cosmovisiones totales y encontradas (el nacionalsocialismo y el comunismo), es decir, partidos totalitarios. Cada uno de ellos trata de arrebatarle al Estado su prerrogativa propiamente política, esto es, trazar la línea divisoria entre el amigo y el enemigo. Al lado de estos partidos totalitarios, se manifiestan coaliciones parlamentarias lábiles, que acentúan tendencias pluralistas, es decir, para nuestro autos, fragmentantes de la unidad política. También contribuye a desarticular el Estado weimariano, prosigue nuestro autos, el "policratismo" de los diversos sectores de la economía pública (correo, ferrocarriles, Reichbank, etc.) que se mueven cada uno independientemente del otro y hasta chocando entre sí. Por otra parte, al haberse dado la república de Weimar una organización al mismo tiempo parlamentaria y federal, continúa nuestro autor, resurge la antinomia ya señalada en Verfassungslehre entre federalismo y democracia. Schmitt no oculta que la organización federativa   de la república de Weimar le parece desestabilizante para el Estado, y la función presidencial de guardián de la constitución. Este peligro se acentúa cuando federalismo y pluralismo político se refuerzan mutuamente, consiguiéndose, dice nuestro jurista, "un doble quebrantamiento del hermetismo y de la solidez de la unidad estatal"    En un   Estado al mismo tiempo federal y parlamentario el federalismo, según nuestro autor, puede justificarse sólo de dos maneras:

  1. Comorecurso de auténtica descentralización territorial, contra lospoderes pluralistas y policráticos enquistados en el gobierno y enla actividad económica.

  2. Como"antídoto contra los métodos peculiares del pluralismo de lospartidos" [10].Esta última es una observación de gran actualidad: la realidad deun sistema de articulación territorial del poder reside en elsistema de partidos. Con partidos nacionales de direccióncentralizada, como en el caso de nuestro país, y más aún con sistemas electorales donde tales partidos monopolizan larepresentación y la manejan a través de listas cerradas,reduciéndose así, poco a poco, la democracia a un ejercicioautorreferencial de lo que se ha llamado el englobante "partidode los políticos", la variedad de las comunidades federadas sediluye en cacicazgos locales dentro de los bloques partidarios. Otra consecuencia es la aparición defensiva de partidosparticularistas, como se ve en España, Italia, Escocia, etc., comoreacción simétrica a lo anterior. Por lo tanto, y esto explica lainaplicabilidad, en principio, de la reflexión schmittiana enVerfassungslehre al caso suizo, la antinomia más virulenta se daríaentre federación y democracia monopolizada por partidos nacionalesy centralizados.

Muchos conocedores de Schmitt sostienen que, si bien advirtió la declinación del Estado-nación como forma política, jamás pudo superar   el horizonte teórico estatalista. José Caamaño Martínez afirma, por ejemplo, ante la dúplice soberanía que otorga nuestro autor a la federación y a los miembros federados: "esta teoría   de la federación nos muestra claramente que la forma histórica del Estado nacional unitario sigue siendo un dogma del pensamiento de Schmitt"[11].

"No deja lugar -dice Francisco por su parte Ayala- a un tipo de organización de la convivencia política distinto del Estado nacional [centralizado]"[12].

Gary Ulmen, por su lado, resume así la cuestión: Schmitt consideraba sustancialmente al federalismo como una fase del pasaje entre el mundo plural y parcializado de los Estados Naciones y el mundo contemporáneo, que tiende a la unidad homogeneizante. Schmitt plantea en el federalismo algunas antinomias fundamentales: partiendo del presupuesto que una federación es un contrato de status entre unidades más o menos iguales, que adhieren a la federación con finalidad de mutua protección, gestión e integración,   conlleva una permanente tensión entre la autonomía de las unidades federadas y la intervención federal. Con el tiempo, la mayor fuerza de la federación respecto de las unidades federadas producirá una creciente centralización, mientras que la heterogeneidad de las diversas unidades (ej. los EE.UU) choca con el principio democrático del pueblo soberano, que trasciende las diferencias entre los Estados miembros y tiende a una única homogeneidad. En ese punto la contradicción se manifiesta insoluble: sin homogeneidad la federación democrática no puede funcionar, pero si la homogeneidad se logra, las diferencias resultan superadas y, de hecho, se realiza un Estado unitario. Un proceso, pues, de gradual reductio ad unum [13].

En Schmitt hay una permanente tensión entre la nostalgia del jus publicum europaeum, derecho público interestatal,   y su percepción de la declinación de la forma estatal. Es muy claro respecto a esto último cuando prologa la reedición de "El Concepto de lo Político":

"Hasta los últimos años la parte europea de la Humanidad vivió una época cuyas nociones jurídicas eran acuñadas desde el punto de vista estatal. Se supuso al Estado modelo de la unidad política. La época del estatismo está terminando ahora. No vale la pena discutirlo. Con ello se termina toda la infraestructura de construcciones relacionadas con el Estado, que una ciencia europeo-céntrica del derecho internacional y del derecho político había erigido en cuatrocientos años de trabajo espiritual. Se destrona al Estado como modelo de la unidad política, al Estado como portador del monopolio de la decisión política. Se destrona a esta obra maestra de la concepción europea y del racionalismo occidental. Pero se mantienen sus nociones e incluso se mantienen como ideas clásicas, aunque hoy día la palabra clásico suena casi siempre equívoca y ambivalente, por no decir irónica"[14].    Se advierte, junto a la claridad de la toma de posición, el tono elegíaco respecto de la época que se cierra y   un   pronóstico ominoso respecto de la que se abre. Hay una cierta renuencia a pensar más allá de la forma estatal. Nuestro autor es claro, preciso y de seguimiento ineludible en cuanto a la pars destruens respecto de lo que asoma tras la retirada de la estatalidad y el jus publicum europaeum, donde aquélla se expresaba. Recoge la frase de Proudhon, "quien dice Humanidad quiere engañar" y alerta sobre la intensificación de la enemistad hacia posiciones absolutas que encubre el interventismo humanitarista.   Pero, a la vez, desde la pars construens, no alcanza a concebir una pluralidad superadora de la estatalidad moderna, un orden jurídico postestatal, tanto hacia adentro del Estado y la articulación terriotorial del poder, como hacia fuera de los Estados, que suceda sin traicionar en lo esencial y valioso aquel jus publicum moribundo. Para Schmitt, la unidad política estatal fue el unum necessarium; ahora, marchamos hacia una unidad política de alcance planetario, que no podría cumplir con lo que el Estado consiguió ad intra: la paz interior, la deposición de la enemistad intestina; en otras palabras, se perdería, a escala global, el vivere civile, la dimensión civilizatoria de la política. Pero a Schmitt no le interesó jamás cómo se articulaba hacia adentro, funcional y territorialmente, aquella paz interior. Lo seduce la unitas, pero no lo atrae   la universitas donde se articulan diversidades y diferencias. Así, deja a un lado la corriente de pensamiento medieval, con culminación en Dante, luego reaparecida con Altusio, que resulta basilar para la noción federativa. Los jurisconsultos del medioevo hablaban de una bóveda de universitates locales ordenadas desde el domus, el vicus, la civitas, la provincia, el regnum, el imperium. Es probable que nuestro autor viese en esta corriente una manifestación del romanticismo político que solía fulminar. Así, por ejemplo, en las fórmulas de Adam Müller acerca de una   concepción "orgánica" y estamental del Estado como una comunidad superior de comunidades, transmitidas por la obra de Gierke y recogidas por un contemporáneo de Schmitt, Othmar Spann. Schmitt polemizó en varias   ocasiones   con las teorías organicistas que asimilaban el Estado a las otras comunidades, tanto las menos como las más amplias, afectando así la summa potestas del soberano[15]. En "El Concepto de lo Político" (1927) hace referencia expresa a Gierke, cuya teología política, según nuestro autor, en la búsqueda de una unidad última, de un "cosmos&apos; y de un "sistema" resulta "superstición y reminiscencia de la escolástica medieval"[16].   En "El Leviatán en la Teoría del Estado de Tomás Hobbes" (1938) señala que los mecanismos estamentales, generadores de un derecho de resistencia, conducen a la guerra civil, cuando la misión del Estado es ponerle un cierre definitivo[17]. Pero su ataque se concentró, especialmente, sobre las concepciones pluralistas de Harold Laski y G.D.H. Cole, que, entre 1914 y 1925, habían propiciado, desde posiciones cercanas al socialismo inglés y los fabianos, la descentralización y repartición del poder estatal. Aunque las notas polémico de Schmitt son de 1927[18], cuando Laski ya había abandonado el pluralismo o policratismo, le servían a nuestro autor para reafirmar su pensamiento nuclear de rechazo de toda forma de contestación o recorte de la superioridad ad intra del Estado.

Nuestro autor, como se sabe, desde los años 40 comienza a hablar de los imperios y de los grandes espacios, los Grosseraume, como las formas políticas surgentes tras la estatalidad. El mundo quedaría parcelado en una pluralidad de grandes espacios, pero como pluralidad de unidades estancas. Habría, en otras palabras, un nuevo jus publicum con menos protagonistas que el antiguo: "un equilibrio de varios grandes espacios que creen entre sí un nuevo derecho de gentes en un nuevo nivel y con dimensiones nuevas, pero, a la vez, dotado de ciertas analogías con el derecho de gentes europeo de los siglos dieciocho y diecinueve, que también se basaba en un equilibrio.de potencias, gracias al cual se conservaba su estructura"[19]. Nada nos dice de cómo se organizarían ad intra los grandes espacios: súlo sabemos que deberían mantener alguna homogeneidad interna y que algún Estado ejercería en ellos un papel hegemónico (el ejemplo es el papel de los EE.UU respecto al resto de América, luego de que la doctrina Monroe estableciera límites y exclusiones configuradoras de este gran espacio).

Los Grosseraume se plantean como alternativa al gran peligro, a la remoción del katéjon (es decir, lo que retiene, ataja   u obstaculiza, concepto recurrente en la teología política final de nuestro autor). El katéjon actúa en toda época y es, por lo tanto, variable con el decurso de aquéllas. El katéjon asienta o mantiene el Nomos epocal y desaparece con él[20]. Se lo menciona en Pablo de Tarso (II epístola a los tesalonienses, 2, 6/7), que lo considera el obstáculo o retardo, qui tenet nunc,   el que retiene   ahora la manifestación del Anticristo.   El Anticristo de Schmitt es la soberanía global, el mundo uno y uniforme correspondiente al pensamiento técnico-industrial. El sistema de Estados nacionales en pugna controlada, construcción de la racionalidad europea, edificadores al mismo tiempo, cada uno, de su propia paz interior, he allí el verdadero katéjon para Schmitt. Ninguna virtualidad le ve en ese sentido a la provisoria federación, contrato temporario de status, fuente de desestabilizaciones, que prefiere mostrar a contraluz o no mostrar, como dijimos al principio de este trabajo. Aunque, a pesar de su desconfianza hacia las formas federativas, dejó sobre ellas notables observaciones jurídico-políticas, como hemos visto. Quizás, alguien ha señalado, se consideraba el mismo Schmitt como el katéjon intelectual al  diseño maligno de la soberanía global desde la unidad política del mundo. De todos modos, advierte que un Nomos de la tierra desaparece y no ha apuntado el otro todavía. No alcanza a divisar si es posible un nuevo Nomos pluralístico donde la conflictualidad se canalice y yugule, sin proclamar su desaparición, como sueña la soberanía global mientras desarrolla sin pausa sus operaciones de policía humanitaria.

Schmitt advertía una sustancial oposición entre estatalidad y federalismo. Por eso decía que el Estado federal, seudonegocio jurídico nulo y equívoco se resuelve, como el federalismo hamiltoniano, en la forma de Estado unitario más o menos matizado. Hoy reaparece el federalismo de raíz lotaringio germánica, cuyo teórico más reciente fuera Proudhon, como visión comprensiva del mundo y de la sociedad, no como simple forma de Estado (su fórmula   podría ser, en lugar de   e pluribus, unum, del federalismo norteamericano, la de   ex uno, plures[21]). El katéjon schmittiano está removido. Una soberanía global es posible. Hasta hace poco, se pensaba que esa soberanía residía impersonal y ubicuamente en los mecanismos,   soportes y programas autosuficientes de las redes tecnológicas, de comunicación, informáticas y financieras que rodean el planeta[22]. Al no haber un Leviatán visible, se lo suponía muerto o dormido. Después del 11 de septiembre de 2001, Leviatán debe manifestarse otra vez, ahora para asegurar el globo ante la amenaza del terrorismo global y "privatizado".    En esa bufera o borrasca dantesca nos toca movernos, y las reflexiones schmittianas permiten allí algunos vislumbres. Decía Hölderlin que en el peligro crece también lo que salva. Y nuestro autor agregaba que, al borde del abismo, en la situación excepcional, "la mente se abre al arcano".

* Doctor en Ciencias Jurídicas, Universidad Católica Argentina.

NOTAS

[1]) Ver Otto von Gierke, "Teorías Políticas de la Edad Media",con introducción de F.W. Maitland, traducciónindirecta del ingléspor Julio Irazusta, Editorial Huemul, Bs. As., 1963, p. 108/109.

[2] )Tras la Segunda Guerra Mundial, la República Federal Alemana seconfiguró en 1949, como su nombre lo indica, bajo un sistemafederativo. La República Democrática Alemana, en cambio, como"Estado socialista de la nación alemana", se configuróbajo un sistema unitario. Anteriormente, bajo el III Reich, la Leyde Plenos Poderes del 24 de marzo de 1933, que en los hechos derogóla Constitución de Weimar, otorgó la potestad legislativa laGobierno del Reich, es decir, al Fuehrer., que designaba algobernador (Gauleiter) en cada uno de los distritos. La organizacióndel Reich fue asimilándose (Gleichschaltung) a la organizacióncentralizada y uniforme del Partido Nacional Socialista ObreroAlemán. Alemania, hoy, es un Estado federal.

[3] )Ver Carl Schmitt, "La Defensa de la Constitución", trad.de Manuel Sénchez Sarto, prólogo de Pedro de Vega, ed. Tecnos,Madrid, 1998, 2ª. Edición, p. 12

[4] )Carl Schmitt, "Teoría de la Constitución", traducción ypresentación de Francisco Aala, epílogo de Manuel García-Pelayo,Alianza editorial, Madrid, 1982, p. 348.

[5] )Schmitt solía adherir a la causa de los vencidos: victrix causadiis placuit, sed victa Catoni,la causa de los vencedores place alos dioses, pero la de los vencidos a Catón..y a Schmitt.

[6] )Contra James Madison en "El Federalista", XXXIX, XLIV yXLV: se propone una soberanía distributiva, donde los estadosfederados retienen una porción no delegada, un residuo inviolable,y la federación ejerce sólo la delegada. Ello es posible porque elpueblo, organizado en ciudadanía, no en masa, manifiesta suvoluntad soberana parcialmente en varias represdentaciones: comoindividuo, como miembro del estado federado, como miembro de lafederación. Ver Hamilton, Madison y Jay, "El Federalista",prólogo y traducción de Gustavo R. Velasco, FCE, Mexico,6ª.reimpresión, 1998. Para Schmitt, este deslinde, esta especie definium regundorum entre federación y estados miembros de la mismasoberanía, no resulta concebible. En la situación excepcional,quien decida, federación o estado miembro, resulta plenamentesoberano.

[7] )Op. cit. n. iv, p. 359

[8] )Sobre las dificultades de traducción de Ausnahmezustand como"estado" o "situación" excepcional puede versela nota del traductor, Jean-Louis Schlegel en "ThéologiePolitique, 1922,1969", Gallimard, 1988, p. 15. Para otrosdesarrollos sobre el concepto de soberano en Schmitt me remito a miprólogo a "Teología Política", Ed. Struhart y Cía.,2ª. Ed., Bs. As. 1998.

[9] )Op. cit nota iv, p. 369.

[10] )Op. cit. n. iii, p. 161.

[11] )José Caamaño Martínez: "El Pensamiento Juídico-Político deCarl Schmitt", prólogo de Luis Legaz y Lacambra, Ed. Porto yCía, Santiago de Compostela, 1950, p. 159.

[12] )Op. cit. n iv, p. 17

[13] )  Gary L. Ulmen en Paul Piccone y otros, "La RivoluzioneFederalista", Settimo Sigillo, Roma, 1995.

[14] )Carl Schmitt, "La Noción de lo Político", en Revista deEstudios Políticos, Instituto de Estudios Políticos, nº 132, Madrid, noviembre-diciembre 1963, p.6

[15] )Una de ellas fue en una conferencia de 1930 en honor de Hugo Preuss,discípulo de Gierke. Ver George Schwab, "Carl Schmitt, lasfida dell&apos;eccezione", introducción de FrancoFerrarotti, traducción de Nicola Porto, Laterza, Bari, 1986, p.92

[16] )Carl Schmitt, "El Concepto de lo Político", trad. deFrancisco Javier Conde, en "Estudios Políticos", Doncel,Madrid, 1975, p. 118.

[17] ) Carl Schmitt, "El Leviatán en la Teoría del Estado de TomásHobbes", traducción de Francisco Javier Conde, Ediciones Haz,Madrid,1941 p. 72/73.

[18] )Op. cit. nota anteror, loc. cit. Un eco de este ataque al pluralismo"extremista" del "judío Laski" aparece en "ElConcepto de Imperio en el Derecho Internacional" (1940), trad.de Francisco Javier Conde, Revista de Estudios Políticos, Madrid,1941, p. 97.

[19] )Carl Schmitt, "La Unidad del Mundo", Ateneo, Madrid, 1951,p.24

[20] )Carl Schmitt, "El Nomos de la Tierra en el Derecho de Gentesdel jus publicum europaeum", trad. Dora Schilling Thon,Estudios Internacionales, Madrid, 1979, p. 37 y sgs.

[21] )Me remito a mi trabajo "El Federalismo Argentino en elNovecientos o de cémo perdimos el siglo", IV Congreso Nacionalde Ciencia Política, UCA -SAAP, Buenos Aires, RA, noviembre 17 al20 de 1999,.

[22] )Ver Bandieri, Luis María, "¿Soberanía Global vs. SoberaníaNacional? (Hacia una Micropolítica Federativa)" Ponencia en laPrimeras Jornadas nacionales de derecho Natural, San Luis, RA, 14 al16 de junio de 2001, RA